Mangas, séries télé ou romans : les adaptations d'œuvres japonaises crèvent l'écran
Longtemps critiquées pour leur manque de fidélité, les adaptations d'œuvres japonaises à la télévision ou au cinéma rencontrent aujourd'hui un succès sans précédent. Les créateurs nippons doivent s'organiser en conséquence pour répondre à la demande croissante de producteurs occidentaux, alimentée par des réussites comme celle de la série Shogun.
L'an dernier, l'adaptation du mastodonte One Piece, manga aux plus de 500 millions d'exemplaires vendus, avec un acteur mexicain dans le rôle principal, avait été saluée par les spectateurs comme par la critique. D'autres adaptations de mangas majeurs en films et en séries sont en préparation, tel les aventures du ninja Naruto ou les péripéties des super-héros de My Hero Academia.
La France à l'honneur
La France n'est pas en reste puisque fin novembre 2024, la série télévisée inspirée du manga Les gouttes de dieu sur l'œnologie a été sacrée Meilleure série dramatique des International Emmy Awards. Une relecture de l'œuvre Cat's Eyes de Tsukasa Hojo, mangaka à l'origine de City Hunter, a également été diffusée fin novembre sur la chaîne TF1.
"La demande depuis les marchés occidentaux est clairement en augmentation" pour les œuvres japonaises, popularisées notamment grâce aux plateformes de streaming, explique Kaori Ikeda, directrice du Tiffcom, le marché des contenus audiovisuels organisé en marge du Festival international du film de Tokyo. Pour aider l'offre à rencontrer cette demande, et conscient que "le Japon manque encore de savoir-faire" dans la négociation des droits, le Tiffcom a mis en place depuis l'an dernier un dispositif baptisé "Story Market", auquel participaient cette année six maisons d'édition japonaises.
Des fans hyper vigilants
Beaucoup de producteurs étrangers se sont cassé les dents sur des adaptations par le passé, comme pour la version hollywoodienne avec Scarlett Johansson de Ghost in the Shell (2017), accusée de "whitewashing", la pratique de choisir des acteurs blancs pour jouer des personnages dans ce cas japonais.
Jugé trop éloigné du matériau d'origine, Death Note, transposition à l'écran du célèbre manga éponyme, avait lui aussi été éreinté. "Les auteurs de mangas sont très respectés et les communautés de fans très vigilantes", souligne Klaus Zimmermann, producteur de la série télévisée adaptée du manga Les Gouttes de Dieu consacré au milieu de l'œnologie.
Cette adaptation franco-japonaise s'autorise des libertés, notamment en y introduisant une protagoniste française. Mais elle a été élaborée en étroite collaboration avec les auteurs de l'œuvre originale, explique le producteur. "Il s'agissait de trouver l'esprit du manga pour ne pas le dénaturer."
"À chaque étape de la production, il y avait une grande compréhension" de la part de toutes les parties prenantes, salue Yuki Takamatsu, responsable de la négociation des droits chez l'éditeur de ce manga, le géant japonais Kodansha. Pour lui, les échecs passés s'expliquent en partie par les difficultés des éditeurs à expliquer leurs souhaits aux producteurs étrangers, mais aussi par une moins bonne connaissance des mangas et films d'animation autrefois. Il explique qu' "aujourd'hui, surtout depuis le Covid, les producteurs regardent des animés avec leurs enfants" et "cherchent des contenus de plus en plus diversifiés".
L'effet stimulant de Shogun
La série historique Shogun, qui a triomphé en septembre 2024 aux Emmy Awards en remportant 18 récompenses, a aussi "changé la donne" pour le Japon en attirant l'attention du monde entier, estime Masaru Akiyama de l'Association japonaise pour l'exportation des programmes télévisés (BEAJ).
Cette fresque du Japon du XVIIème siècle, adaptée d'un roman de l'écrivain James Clavell mais réalisée avec un casting, des producteurs et des auteurs nippons, est "une très forte stimulation pour les créateurs japonais qui ont vu qu'un tel succès était possible", souligne Ken Muratsu, l'un des responsables du Tiffcom.
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