Automobilistes verbalisés illégalement à Paris : comment réagir après le "couac" de la société Streeteo
La société privée Streeteo, en charge d'une partie du contrôle du stationnement payant à Paris, a dressé des centaines d'amendes illégales.
A Paris, il existe des stationnements illégaux... mais aussi des amendes illégales. La société privée Streeteo, en charge d'une partie du contrôle du stationnement payant à Paris, a dressé des centaines de contraventions illégales, rédigées par des agents non assermentés, a rapporté RTL, jeudi 8 mars.
Reconnaissant avoir été alertée, la mairie de Paris a annoncé ce même jour que ces contraventions de stationnement illégalement infligées, officiellement appelées FPS (forfaits post-stationnement), seraient "annulées". Retour sur un couac qui embarrasse la municipalité, déjà en difficulté pour sa gestion de la crise du renouvellement du parc de Vélib', les vélos en libre-service de la capitale.
Pourquoi ces amendes sont-elles illégales ?
Depuis le 1er janvier 2018, l'exécutif parisien a confié à l'entreprise Streeteo, filiale d'Indigo (ex-Vinci Park), ainsi qu'à Moovia, la gestion des parcmètres et des amendes délivrées dans la capitale. Or, l'une de ces deux entreprises a accompli sa mission de manière frauduleuse. Jeudi 8 mars, RTL a révélé que "des salariés ont été mis sous pression pour verbaliser alors qu'ils n'en avaient pas le droit", et ce, afin de répondre aux "objectifs imposés par le contrat", soit 50 000 contrôles par jour.
Sauf que dans les faits, "le FPS ne peut être appliqué que par des agents qui ont prêté serment devant un tribunal et qui sont donc dûment assermentés". Qui dit agent non-assermenté, dit FPS illégale. Or, l'automobiliste verbalisé, lui, n'a aucun moyen de savoir les conditions dans lesquelles a été réalisé le contrôle de son véhicule en stationnement. Dès le 8 mars, l'avocat au barreau de Paris, Yassine Yakouti, cité par RTL, invitait "tous les automobilistes qui se posent des questions à écrire à la mairie de Paris et à Streeteo afin de faire la lumière sur ces pratiques".
Comment contester un PV ?
Contactée par 20 Minutes, la mairie de Paris assure que "dès que la liste des FPS litigieux sera clairement établie, une procédure de remboursement sera mise en place." Sont concernés les personnes verbalisées entre le 1er janvier et le 22 février, date à laquelle les pratiques ont cessé, selon Christophe Najdovski, adjoint EELV aux transports sur France 3.
L’avocat spécialisé en droit routier, Franck Cohen, recommande de ne pas payer cette amende et de "déposer une réclamation contentieuse auprès du tribunal de police de Paris". Pour ce faire, "il faut simplement envoyer un courrier au tribunal dans lequel on conteste la régularité du PV." Ces affaires sont traitées "sous quatre à six semaines", estime le spécialiste.
Si vous avez déjà payé l'amende, pas de panique : vous êtes tout de même "en mesure de faire une réclamation", affirme Franck Cohen. Il est aussi possible de contester la régularité du PV auprès de Streeteo, en vertu d'une procédure spécifique qui doit encore être mise en place, poursuit 20 Minutes.
Quelles autres pratiques illégales ont été révélées ?
En plus des contrôles sur le terrain, des employés de Streeteo saisissaient des immatriculations de véhicules flashés par les véhicules Lapi (Lecture automatisée de plaques d’immatriculation) qui sillonnent les rues, en prétendant les contrôler, mais sans quitter leur bureau, a révélé un ancien salarié, rencontré par France 3, confirmant une information du Canard enchaîné.
"Des salariés étaient enfermés dans une pièce pour entrer des plaques d'immatriculation dans leur tablette pour prouver – faussement – qu'elles avaient été contrôlées", explique encore RTL. Sur son site, Streeteo assure pourtant que "les véhicules de précontrôle ne seront là que pour orienter les agents de contrôle. Ce sera un agent assermenté qui vérifiera sur place si un conducteur n’a pas ou pas suffisamment payé son stationnement."
Ne pouvant verbaliser ces véhicules, les agents inventaient de faux motifs. Par exemple, "PMR" (personne à mobilité réduite), "personne agressive", personne "dans le véhicule" ou "autre". C'est ce "nombre anormalement élevé d'exemptions de paiement" qui a fini par attirer l'attention de la mairie. La société a ouvert une enquête interne "qui a permis d'établir ces pratiques", a précisé jeudi Christophe Najdovski.
Quelles sanctions pour Streeteo ?
Dans un communiqué, Streeteo, qui a diligenté une enquête interne, a affirmé "avoir identifié des pratiques internes inappropriées, y compris de la part de certains managers, menées évidemment à son insu", sans plus de précision. "Streeteo condamne de la manière la plus ferme ces pratiques", a ajouté la filiale d'Indigo (ex-Vinci Park), qui affirme avoir pris des mesures pour "mettre fin immédiatement à ces comportements". Streeteo "veillera à ce que les automobilistes n'aient à en subir aucun préjudice".
Des sanctions disciplinaires ont également été demandées et des pénalités financières, non chiffrées, ont été réclamées, a fait savoir Christophe Najdovski. Cependant, le contrat de la société n'a pas été résilié.
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