Eaux en bouteilles : Bruxelles décèle de "sérieuses lacunes" dans les contrôles en France
C'est l'une des conséquences des révélations de la cellule investigation de Radio France concernant l'utilisation par Nestlé de traitements interdits pour masquer la contamination de ses eaux minérales naturelles. Selon les conclusions d'une mission de la Commission européenne, le système mis en place par la France pour contrôler les eaux en bouteille est entaché de "sérieuses lacunes" et ne permet pas de garantir l'absence de produits frauduleux dans les rayons.
Selon cet audit, publié mercredi 24 juillet, il existe bien en France un système de contrôle des eaux minérales naturelles et des eaux de source, doté de procédures et de capacités de tests en laboratoire adéquates. Mais "dans son ensemble, le système de contrôle officiel ne vérifie pas efficacement que les eaux minérales naturelles mises sur le marché satisfont aux exigences légales en vigueur", estime l'audit, qui déplore notamment des inspections insuffisamment ciblées et pas assez fréquentes. Le système "n'est pas conçu pour détecter ou atténuer les fraudes dans le secteur des eaux minérales naturelles et des eaux de source et n'est pas non plus correctement mis en œuvre, ce qui rend possible la présence sur le marché de produits non-conformes et potentiellement frauduleux", est-il ajouté.
"Absence de mesures de suivi immédiat"
Bruxelles met également en avant une "collaboration inadéquate au sein des autorités compétentes" et "l'absence de mesures de suivi immédiat" pour garantir que les industriels "remédient aux non-conformités". En clair, l'audit pointe du doigt non seulement des contrôles inefficaces, mais aussi le laisser-faire des autorités françaises vis-à-vis des industriels.
Pour rappel, dès 2021 l’entreprise Nestlé, qui craignait une enquête, avait avoué en toute confidentialité au gouvernement la fraude mise en place pour cacher la contamination de ses ressources en eau. Le gouvernement aurait alors immédiatement dû prévenir la Commission européenne, ce qu'il n'a pas fait. Bruxelles assure qu'elle suivra de très près les mesures mises en place par la France pour remédier à ses "lacunes".
Une filiale française du géant suisse de l'agroalimentaire Nestlé - qui puise en France l'eau des marques Perrier, Vittel, Hépar et Contrex - avait reconnu fin janvier avoir eu recours à des traitements de désinfection interdits (lampe UV, charbon actif) sur les eaux minérales pour maintenir leur "sécurité alimentaire". Une enquête préliminaire pour tromperie a été ouverte par le parquet d'Épinal à l'encontre de Nestlé Waters. Le groupe Alma, qui produit une trentaine de marques d'eaux en bouteilles en France dont Cristaline, Saint-Yorre et Vichy Célestins, fait aussi l'objet d'une procédure judiciaire pour des raisons similaires.
"C'est encore pire que ce que l’on soupçonnait", réagit Foodwatch
L'ONG de défense des consommateurs Foodwatch, qui avait réclamé cet audit après les révélations de Radio France et a porté plainte dans cette affaire, souligne que les conlusions de la Commission européenne confirment "ce qu’elle dénonce à chaque scandale : opacité pour les consommateurs et consommatrices, manque de contrôles des autorités et impunité pour les multinationales". Foodwatch estime que l'audit révèle que "c'est encore pire que ce que l’on soupçonnait", et annonce le lancement d'une pétition appelant les grands groupes agro-alimentaires à "rendre des comptes".
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