Retraites : les pistes du rapport Delevoye pour corriger les inégalités entre les femmes et les hommes
Les femmes ont plus souvent des carrières incomplètes, ce qui les pénalise au moment de la retraite. Le haut-commissaire assure que ses préconisations vont permettre de gommer certains écarts.
Le haut-commissaire à la réforme des retraites, Jean-Paul Delevoye, a promis un système "plus égalitaire", jeudi 18 juillet, lors de la remise de son rapport au Premier ministre Edouard Philippe. Selon lui, le passage d'un système par annuités à un système par points devrait notamment permettre d'atténuer certaines inégalités entre les hommes et les femmes. Comment ? Voici les pistes principales.
Une majoration dès le premier enfant
Dans son rapport, Jean-Paul Delevoye recommande de mettre en place une majoration des points de 5% dès le premier enfant et pour chaque enfant. Ces points seront par défaut attribués à la mère, mais il sera possible de demander à les partager au sein du couple. Cette préconisation doit permettre de revaloriser les droits pour les familles monoparentales, "désavantagées dans le système actuel". Les familles nombreuses pourront bénéficier d'une majoration, par exemple de 25% pour cinq enfants. "Ce sera un système plus redistributif, qui privilégiera d'abord ceux qui ont des carrières hachées, les femmes, ceux qui galèrent à rentrer sur le marché du travail", a estimé Laurent Berger, secrétaire général de la CFDT.
"Cette réforme est une arme de guerre contre les femmes, bondit au contraire Catherine Perret, membre du bureau confédéral de la CGT, dans un entretien à Libération. La règle des 25 meilleures années protège des accidents de la vie." La représentante syndicale affirme que Jean-Paul Delevoye "veut transformer les points liés à la maternité – donc réservés aux femmes – à des points liés à l'éducation, à répartir au sein du couple. Mais, à la fin, un couple sur deux divorce..." Jean-Paul Delevoye, lui, assure que "les hommes bénéficient quasiment de 60-70% des droits familiaux" dans le système actuel.
Un départ plus tôt pour les carrières courtes
Le rapport estime que le système actuel défavorise les salariés aux carrières courtes, incomplètes, "parmi lesquels les femmes sont surreprésentées". Ainsi, parmi les retraités de la génération 1946, 78% des hommes avaient eu une carrière complète au sens de la "durée requise pour le taux plein", alors que les femmes n'étaient que 56%, soulignait la Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (Drees) en 2017. Les hommes cotisent en moyenne 40 trimestres de plus que les femmes, soulignait encore un rapport d'information parlementaire le mois dernier. L'écart se réduit mais il reste important.
Conséquence ? De nombreuses femmes (19% d'entre elles, contre 9% des hommes) doivent aujourd'hui attendre 67 ans pour partir à la retraite avec un taux plein, du fait d'un travail à temps partiel ou d'une carrière courte. Si les préconisations du rapport sont retenues par le gouvernement, il ne sera plus nécessaire d'attendre aussi longtemps pour obtenir l'annulation de la décote, car le taux plein sera atteint à 64 ans. Jean-Paul Delevoye a rappelé que ce sont parfois les professions les plus précaires qui partent le plus tard pour obtenir l'annulation de la décote. Il a donc décrit le système proposé comme une "avancée sociale".
Une pension de réversion unique
Les carrières des femmes sont globalement "moins favorables et moins souvent complètes que celles des hommes", rappelle la Drees dans une étude récente. En moyenne, leur pension est inférieure de 42% à celle des hommes (1 099 euros brut contre 1 908 euros). En réalité, cet écart est toutefois réduit à 25% grâce aux pensions de réversion, un dispositif qui permet au bénéficiaire de toucher une partie de la retraite de son époux ou de son épouse. Jean-Paul Delevoye souhaite désormais harmoniser les 13 règles actuellement en vigueur pour mettre en place un dispositif de réversion unique pour tous.
Les femmes sont les plus concernées par cette mesure. Lors du décès d'un conjoint, la personne toujours en vie aura un niveau de vie garanti à hauteur de 70% du total des retraites cumulées perçue par le couple. Le rapport prend appui sur l'exemple fictif d'un homme bénéficiant d'une pension de 2 000 euros par mois et d'une femme bénéficiant de 850 euros par mois. Avec le nouveau système, cette dernière obtiendrait 1 995 euros à la mort de son époux, contre 1 965 euros actuellement.
Un minimum retraite à 85% du smic
Fin 2016, 38% des femmes et 22% des hommes touchaient moins de 1 000 euros brut par mois de pension. Le rapport préconise l'augmentation du minimum de retraite à 85% du smic net (995 euros), contre 81% pour les salariés dans le système actuel et 75% pour les agriculteurs. Cette mesure devrait bénéficier aux salariés qui ont travaillé à temps partiel, souvent des femmes. Ceci "bénéficiera notamment aux exploitants agricoles, aux artisans, aux commerçants et aux personnes, souvent des femmes, qui ont durablement travaillé à temps partiel", a fait valoir Jean-Paul Delevoye.
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