Infographies Les fruits et légumes cultivés en France sont-ils vraiment plus chers que ceux produits à l'étranger ?

Article rédigé par Pauline Paillassa
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 7min
Un étal de supermarché à Paris, le 20 septembre 2023. (RICCARDO MILANI / HANS LUCAS / AFP)
Si les légumes français sont souvent moins onéreux que leurs concurrents étrangers, les fruits cultivés sur le territoire pâtissent des importations du bassin méditerranéen, d'Amérique du Sud et d'Afrique.

La colère des agriculteurs ne retombe pas. Faible considération pour le métier, normes trop contraignantes, rémunérations trop maigres : beaucoup d'agriculteurs français disent ne plus pouvoir vivre de leur activité. Parmi les motifs de colère de la profession, on compte aussi la concurrence étrangère, que les agriculteurs considèrent comme déloyale.

D'après le ministère de l'Agriculture, la moitié des fruits et légumes, frais et transformés, consommés chaque année en France sont issus de l'importation. Des produits venus de l'étranger qui ont souvent la réputation d'être moins chers pour les consommateurs.

Toutes les semaines, le Réseau des nouvelles des marchés, géré par FranceAgrimer, organisme chargé de surveiller la production agricole en France, relève les prix des fruits et légumes frais d'un panel de 150 grandes et moyennes surfaces, afin de surveiller la concurrence entre produits français et étrangers. Si les données sont parfois absentes, c'est parce que trop peu de références du produit ont été relevées en rayon à cette date. Dès lors, le prix moyen n'est plus jugé représentatif. Alors, les fruits et légumes cultivés en France sont-ils forcément plus coûteux ? Franceinfo s'est penché sur ces données.

Les carottes françaises largement gagnantes

Au rayon légumes, le bilan est plutôt positif. Au cours des douze derniers mois, les carottes made in France sont ainsi presque toujours plus avantageuses pour le consommateur que les carottes importées.

Elles se sont ainsi maintenues en dessous des 2,50 euros le kilo sur l'année glissante. Hormis deux semaines au cours du mois de mai, elles ont toujours été moins chères que les carottes venues de l'étranger, qui n'étaient du reste que peu présentes sur les étals.

La présence de carottes cultivées en Belgique et en Espagne n'était marquée qu'en fin de saison, entre avril et juin, à cause de "l'insuffisance de l'offre nationale", précise l'Agreste, l'organisme chargé de la statistique agricole en France (en PDF).

Les poireaux français quasiment toujours plus abordables

Les poireaux français tirent également leur épingle du jeu face aux concurrents étrangers. Au cœur de la saison, en hiver et en automne, ils occupent la quasi-totalité du marché. Leurs prix, en forte baisse par rapport à l'année dernière, sont liés à une demande qui a chuté, d'après l'Agreste (en PDF).

Les données pour les poireaux étrangers ne sont disponibles qu'entre mai et juin, car c'est le seul moment où ils sont significativement présents sur les étals. Le reste du temps, le Réseau des nouvelles des marchés n'en relève quasiment pas, soit parce que la production étrangère est insuffisante pour être exportée, soit parce que le marché français n'est pas intéressant pour les producteurs étrangers. Toutefois, pour les quelques semaines où ils sont présents en magasin, ces poireaux se révèlent moins chers que leurs concurrents français.

Les oignons français imbattables, même en agriculture biologique

Malgré une forte hausse du coût des oignons, en raison de l'augmentation du coût de l'énergie utilisée pour leur séchage, la production française reste compétitive. Le prix moyen à l'année de l'oignon français est de 2,43 euros le kilo. Même chose hors saison : quand le marché national doit faire face à la concurrence étrangère, l'oignon cultivé dans l'Hexagone est environ 15% plus économique que les bulbes importés.

Même quand ils sont issus de l'agriculture biologique, les oignons français sont nettement moins onéreux que les oignons non biologiques venus de l'étranger, principalement des Pays-Bas, de l'Espagne et de la Belgique, précise le bilan du Réseau des nouvelles des marchés.

Les tomates françaises près de 24% plus coûteuses que la concurrence en pleine saison

Contrairement aux poireaux ou aux oignons, les tomates rondes françaises sont plus onéreuses que les tomates étrangères, que ce soit en agriculture biologique ou conventionnelle.

Pour celles issues de l'agriculture classique, lorsque les consommateurs ont le choix, la tomate française est en moyenne 24% plus chère, avec un prix au kilo de 3,72 euros, contre 3 euros pour la tomate étrangère, venue d'Espagne et du Maroc.

Les bananes africaines et américaines moins onéreuses la plupart du temps

Du côté des fruits, la donne est différente. Les prix sont plus avantageux pour les produits importés, à l'image de la banane.

Souvent venues de Côte d'Ivoire, de Colombie et d'Equateur, ces bananes sont en moyenne 6 centimes/kilo moins chères que celles cultivées dans les Antilles, avec, à certaines périodes de l'année, des variations qui peuvent aller jusqu'à 20 ou 30 centimes.

Les clémentines étrangères 35% moins chères que les clémentines corses

Pendant l'hiver, saison des clémentines, la production étrangère est largement moins chère que la production française. Même les clémentines étrangères issues de l'agriculture biologique sont plus économiques que les clémentines françaises, principalement cultivées en Corse.

Entre octobre et janvier, quand les consommateurs doivent choisir un de ces deux produits, le kilo de clémentines importées est 35% moins cher. Il coûte en moyenne 2,84 euros, contre 4,39 euros pour celles produites localement.

Les kiwis cultivés à l'étranger plus présents et moins chers

Les kiwis d'Aquitaine et de Midi-Pyrénées font eux aussi face à une forte concurrence étrangère. Pour le mois de février 2023, le Réseau des nouvelles des marchés relève par exemple une "concurrence européenne (Italie et Grèce) [qui] reste présente et compétitive en tarifs", venant s'ajouter à la concurrence néo-zélandaise.

En raison des importantes différences de prix à certaines périodes de l'année (notamment hors saison en France), les consommateurs font régulièrement le choix de la production étrangère pour ce fruit, au détriment de la production nationale. Face à ce constat et pour répondre aux demandes des agriculteurs, le Premier ministre a rappelé le 26 janvier l'opposition de la France au traité de libre-échange entre l'UE et le Mercosur.

Mardi, lors de sa déclaration de politique générale, Gabriel Attal a également annoncé un "grand plan de contrôle sur la traçabilité" des produits étrangers afin de "garantir une concurrence équitable".

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