"Les raisins mûrissent plus tôt dans l'été" : les vignerons bordelais font face au réchauffement climatique
Les vignerons bordelais doivent désormais prendre en considération l'impact du réchauffement climatique. Des vendanges qui débutent plus tôt, des raisins dont le goût est modifié... Pour s'adapter, les vignerons déceloppent de nouveaux cépages plus résistants.
"L'une des conséquences du réchauffement climatique c'est qu'on a à peine le temps de prendre quelques jours de vacances qu'il faut déjà re-préparer le chai pour les vendanges." Marc Médeville est à la tête de 180 hectares de vignes et il surveille avec attention les toutes premières grappes du millésime qui sont en train d'être rentrées, puis pressées.
Au château Fayau, à Cadillac (Gironde), comme ailleurs dans le Bordelais, les vendanges viennent de commencer. Les blancs ont ouvert le bal en début de semaine et les rouges devraient suivre d'ici une quinzaine de jours. Globalement, les exploitants sont satisfaits de la qualité. Mais depuis quelques années, les vignerons ont de nouvelles préoccupations : le réchauffement climatique.
Grands changements de témpérature
Marc Médeville préside les appellations Bordeaux et Bordeaux supérieur. Plus que le réchauffement, lui est inquiet par le dérèglement climatique : "On a une tendance à démarrer plus tôt les vendanges, mais ce n'est pas très significatif. Ce qui est significatif c'est le démarrage de la vigne au printemps. On a quinze jours à trois semaines d'avance parce qu'on n'a plus d'hiver." Il détaille : "On a du gel cette année, comme l'année précédente. Et en juillet on a eu des températures jusqu'à 43°C. La vigne peut supporter des températures comme ça, mais ce qu'elle n'aime pas c'est d'être une semaine à 27°C, la semaine suivante à 43°C et celle d'après à 31°C."
La vigne souffre, et par conséquence, le vin aussi. Alors ils sont quelques uns à se lancer dans l'expérience de vins et de vignes moins fragiles. C'est le cas de Jérémy Ducourt. Sur ses 450 hectares, il en a réservé treize à des cépages plus résistants : "On est dans une stratégie de réduction des pesticides depuis très longtemps. On a réussi à réduire notre consommation d'environ 30% mais on arrivait à une limite technique. Avec des variétés plus résistantes qui résistent naturellement aux deux maladies principales et qui permettent de réduire de 80 à 90% l'utilisation des traitements. Donc qu'on ne traite plus qu'une à deux fois par an."
L'INRA expérimente de nouveaux cépages
Avantage non négligeable également, ces vins sont moins chargés en alcool. Agnès Destrac-Irvine travaille sur le projet Vitadapt à l’Institut national de la recherche agronomique (INRA) de Bordeaux, elle mesure l’adaptation de la vigne au climat : "Les raisins mûrissent plus tôt dans l'été sous des températures plus élevées qui modifient la composition des raisins. L'impact de cette précocité, c'est un déséquilibre des raisins : des raisins plus sucrés, moins acides, moins aromatiques et qui permettront moins la capacité de garde des vins."
D'où l'idée de chercher des nouvelles variétés plus tardives. Depuis dix ans, l'INRA cultive 52 cépages différents sur une parcelle expérimentale. Un vaste travail de recherche qui vient de trouver un débouché très concret : plusieurs cépages ont été sélectionnés par l'organisme de défense et de gestion (ODG) Bordeaux et Bordeaux Supérieurs. Les premières plantations sont prévues cet hiver. Résultat, en bouteilles, dans trois ans.
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