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Néonicotinoïdes: "Il n'y a aucun risque pour la souveraineté alimentaire si on les interdit", estime la Confédération paysanne

Selon Nicolas Girod, porte-parole du syndicat agricole, il faut augmenter de quatre euros le prix de la betterave au kilo pour permettre aux betteraviers de se passer de pesticides.
Article rédigé par franceinfo
Radio France
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Des agriculteurs manifestent contre l'interdiction des néonicotinoïdes, à Paris, mercredi 8 février 2023. (Fabrice Rigobert)

"Il n'y a qu'une minorité d'agriculteurs qui manifestent aujourd'hui [à Paris] et si on ne manifeste pas [avec eux] c'est qu'il n'y a aucun risque pour la souveraineté alimentaire si on interdit les néonicotinoïdes", défend mercredi 8 février sur franceinfo Nicolas Girod, porte-parole national de la Confédération paysanne. Le syndicat dénonce "des raccourcis réactionnaires".

Fin janvier, le gouvernement a finalement interdit les néonicotinoïdes pour la culture de la betterave après que la Cour de justice de l'Union européenne a jugé illégale la dérogation accordée par la France aux betteraviers.

Pourquoi ne manifestez-vous pas à Paris aujourd'hui avec la FNSEA pour dénoncer notamment "les restrictions d'usage des pesticides ?

Nicolas Girod : Déjà il n'y a qu'une minorité d'agriculteurs qui manifestent aujourd'hui et si on ne manifeste pas avec eux, c'est qu'il n'y a aucun risque pour la souveraineté alimentaire si on interdit les néonicotinoïdes. Nous nous opposons à toute dérogation et on propose de réguler davantage le marché du sucre pour permettre aux agriculteurs d'être mieux rémunérés. Ça n'a aucun sens pour nous de manifester pour dénoncer l'interdiction abusive de certains produits, en disant "Laissez-nous continuer à polluer ainsi, on sait ce qu'on fait, sinon votre alimentation est en danger", ce sont de sacrés raccourcis, des raccourcis réactionnaires.

Certains de vos collègues agriculteurs ont perdu jusqu'à 40% de leur récolte en 2020 et pour eux il n'y a pas d'autres alternatives que d'utiliser les néonicotinoïdes.

Ce n'est pas vrai. On a d'autres alternatives. On connaît des producteurs de betterave sucrière en agriculture biologique et d'autres en conventionnel qui n'utilisent plus de néonicotinoïdes. On sait faire sans et dans ce cas-là, on sait qu'on va produire moins de betterave sucrière à l'hectare et on aura donc une baisse des volumes. Il faut comprendre que le revenu des agriculteurs est fixé en fonction du volume mais aussi du prix à la tonne.

Pour nous il faut quatre euros supplémentaires par tonne pour la betterave sucrière pour arriver à mieux rémunérer les paysans pour leur permettre de se passer de ces pesticides.

Nicolas Girod

à franceinfo

C'est aux pouvoirs publics d'agir et aux acheteurs. Si on prend l'exemple de Tereos, géant du sucre en France et dans le monde, il a intérêt à avoir beaucoup de volume au prix le plus bas et organise la concurrence au niveau mondial entre les différents agriculteurs.

Est-ce qu'il y a un risque de voir une filière disparaître, ce qui pourrait contraindre la France à importer plus de betterave ?

Il n'y a pas de risque de faire disparaître la filière, il y a peut-être un risque qu'on exporte moins, car la France est une grande exportatrice de sucre, alors on agite la contrevérité du risque pour la souveraineté alimentaire, mais c'est plutôt un risque pour la balance commerciale française, c'est là où Tereos et l'Etat français ont un intérêt et les agriculteurs certainement moins. Si on continue à produire avec les néonicotinoïdes, on va mettre en difficulté tout l'environnement. On sait très bien que les pollinisateurs, qui sont condamnés par les néonicotinoïdes, on en a besoin pour les fruits et légumes. Or, on importe plus de 50% de fruits et légumes pour notre consommation en France. Est-ce qu'il n'y a pas là une contradiction complète à vouloir continuer à produire avec ces néonicotinoïdes en mettant à mal une filière des fruits et légumes qui n'arrive pas à répondre à la demande en France ?

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