Reportage "Si on veut se protéger, à part la vaccination, on n'a aucun moyen" : les éleveurs de brebis démunis face à l'épidémie de fièvre catarrhale

Plusieurs éleveurs des Hauts-de-France ont pu commencer à administrer des doses de vaccins à leurs brebis, dans l'espoir de les protéger contre cette nouvelle fièvre catarrhale qui inquiète.
Article rédigé par Lauriane Delanoë
Radio France
Publié
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La campagne de vaccination des brebis a commencé dans l'élevage d’Allan Briois (à droite), à Marenla, dans le Pas-de-Calais. (LAURIANE DELANOË / RADIO FRANCE)

La nouvelle fièvre catarrhale se propage dans les élevages du nord de la France. Le premier cas de sérotype 3, arrivé des Pays-Bas et de Belgique, a été confirmé le 5 août, et depuis, il y a plus d'une quarantaine de nouveaux foyers, selon les derniers chiffres du ministère de l'Agriculture, publiés vendredi 16 août. Cette maladie transmise par des moucherons, aussi appelée "maladie de la langue bleue", touche particulièrement les ovins et peut entraîner la mort des brebis et bélier.

Pour faire face, le gouvernement a lancé une campagne de vaccination volontaire, dans une zone régulée qui couvre le quart nord-est de la France. Depuis la semaine du 12 août, 1,1 million de doses sont mises à disposition des éleveurs gratuitement, en passant commande auprès de leur vétérinaire.

La "peur" de retrouver "une brebis touchée"

Ses brebis enfin rassemblées dans un coin de prairie, Allan Briois les vaccine, une par une, avec une grosse seringue. Puis un ami, venu en renfort, leur met de l'insecticide, pour tuer les moucherons, transmetteurs du virus. "Pour vacciner les 250 brebis, on aura mis à peu près quatre heures. Si on veut se protéger, à part la vaccination, on n'a aucun moyen", observe-t-il.

Installé à Marenla, dans le Pas-de-Calais, Allan Briois redoute cette nouvelle forme de fièvre catarrhale. "La mortalité est forte, on entend parler de 40 % de mortalité avec un sérotype 3. C'est énorme. Cela représenterait pas loin d'une centaine de mes brebis, ce qui ferait couler l'exploitation, ce serait impossible de remonter le troupeau", s'inquiète l'éleveur. "Tous les jours, on va faire un tour, voir les bêtes. On a toujours peur de retrouver une brebis touchée. Le choix de vacciner, c'est de sauver le troupeau et pouvoir continuer pour les années à venir."

"On ne vaccine pas ces animaux pour le plaisir. On préférerait les laisser tranquilles."

Allan Briois, éleveur de brebis

à franceinfo

L'agriculteur de 26 ans sera plus tranquille dans trois semaines, quand ses bêtes auront développé leur immunité. À 80 km de là, à Irles, dans la Somme, Thierry Cartier, lui, attend les résultats du test, d'une de ses brebis, qui "n'avait pas trop d'appétit et des croûtes au niveau du museau", un des symptômes de la fièvre catarrhale.

La vaccination devrait être "obligatoire"

En attendant de savoir, Thierry Cartier vient de vacciner ses 500 bêtes. Il salue la gratuité des flacons, prise en charge par l'État, mais regrette une campagne tardive, selon lui. "Le virus sévit déjà depuis plusieurs mois, voire depuis cet hiver aux pays-Bas, donc on aurait dû réagir avant et nous procurer un vaccin plus rapidement, ne pas attendre que la maladie arrive", déplore-t-il.

"J'ai entendu dire qu'aux Pays-Bas, ils avaient perdu 36 000 brebis. C'est colossal. C'est pour ça qu'il faut vacciner. Je pense que ça devrait être obligatoire, d'ailleurs." Thierry Cartier espère d'ailleurs "qu'on pourra se procurer un vaccin pour la prochaine saison et éviter d'être pris au dépourvu et de le faire en catastrophe comme on le fait maintenant".

Thierry Cartier (à gauche) et son salarié qui vaccinent leurs brebis contre la fièvre catarrhale, dans leur élevage à Irles, dans la Somme. (LAURIANE DELANOË / RADIO FRANCE)

Ces éleveurs se tiennent prêts à vacciner à nouveau leur troupeau dans les prochaines semaines, s'il le faut. Ils craignent l'autre sérotype de la maladie, qui se propage dans le sud de la France. Un sérotype qui touche aussi les bovins, mais avec moins de gravité. L'État prévoit plus de cinq millions de doses pour vacciner aussi les vaches de la zone régulée.

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