Reportage "Vous avez l'impression qu'on vous arrache les tripes" : des viticulteurs arrachent leurs vignes en raison de la baisse des exportations

En raison d'une baisse des exportations de vin, les viticulteurs doivent déclarer s'ils se disent prêts à arracher leurs vignes. Une aide financière leur est proposée en échange.
Article rédigé par franceinfo
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Des vignes en train d'être arrachées vers Barsac, près de Bordeaux (Gironde), le 23 novembre 2023. Image d'illustration. (GUILLAUME BONNAUD / MAXPPP)

Les Français consomment moins de vin, les exportations sont en baisse alors pour faire face à la crise viticole, les viticulteurs français doivent se prononcer : sont-ils prêts à arracher leurs vignes en échange d'aide financière ? Mercredi 12 juin, c'est le dernier jour pour répondre à cette question, sous la forme d'une enquête mise en place par FranceAgriMer. Le ministère de l'Agriculture espère pouvoir arracher 100 000 hectares. Dans le Bordelais, ce dispositif existe depuis plusieurs mois : cette année, plus de 8 000 hectares vont ainsi être arrachés d'ici le 31 juillet.

En quelques minutes la pelleteuse arrache tout : le pied de vigne, le support, le fil de fer. Et des vignes qui seront ensuite brûlées. Christophe Duarte représente la troisième génération de viticulteurs à Castelvieil, à une heure au sud-est de Bordeaux. "C'est un crève-cœur d'arracher les parcelles qui ont été mises en place pour des décennies, déplore-t-il. Vous avez l'impression qu'on vous arrache les tripes. C'est très très dur."

Dans ce vignoble de l'Entre-deux-mers (entre la Garonne et la Dordogne), tous ces vignerons partagent cette sensation douloureuse de devoir sacrifier une partie de leurs terres pour survivre économiquement. "Il n'y a plus de trésorerie dans les exploitations, donc les gens arrachent de la vigne pour faire un petit peu de trésorerie par rapport à la prime qui va être touchée, raconte Christophe Duarte. Pour moi, l'intérêt c'est aussi d'avoir moins de surface à exploiter pour avoir moins d'argent à mettre sur la table en frais d'avance aux cultures."

"Environ 8 000 hectares" vont être arrachés

Christophe Duarte va arracher un quart de ses terres, cinq hectares, il va recevoir une subvention de 6 000 euros l'hectare. Comme lui, 1 100 viticulteurs ont fait ce choix. "Depuis un certain nombre d'années, nous avions des années de trop forte production par rapport à ce que nous étions capables de vendre, constate Bernard Farges, vice-président du conseil interprofessionnel du vin de Bordeaux. Nous devons réduire cette offre parce que si nous continuons à produire pour utiliser des financements publics afin de détruire ce vin, c'est un non-sens. Donc ce sont environ 8 000 hectares qui vont être arrachés. Bordeaux c'est entre 105 000 et 110 000 hectares, donc on est quasiment à 5% ou 7%. Mais sur 110 000 hectares, il y a des zones qu'ils ne vont pas arracher, les zones de grands crus, les zones productrices de blanc par exemple."

"On peut dire que ces 8 000 hectares se reportent sur environ 60 000 à 70 000 hectares. On passe tout de suite à pratiquement 10%. Et 10% d'une population de vignes, ou de viticulteurs qui arrêtent, c'est très important."

Bernard Farges, vice-président du conseil interprofessionnel du vin de Bordeaux

à franceinfo

Désormais, ce sont donc aux viticulteurs des autres régions de se prononcer. Dans le Bordelais en tout cas, tous espèrent que ce sacrifice portera ses fruits.

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