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Tarn : ce que l'on sait de l'arrachage de milliers d’arbres fruitiers sur trois hectares

Plus de 7 000 pommiers ont été saccagés dans le verger d'un agriculteur du Tarn. Le directeur du domaine soupçonne une association de riverains d'être responsable, mais celle-ci a démenti.
Article rédigé par franceinfo
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Des pommes au pied d'arbres fruitiers à Pélussin (Loire), le 22 août 2022. (ROMAIN DOUCELIN / HANS LUCAS / AFP)

Un verger dévasté. Plus de 7 000 pommiers ont été arrachés, dans la nuit du jeudi 13 au vendredi 14 juillet, sur les terres du domaine de Fontorbe, à Lavaur (Tarn). Le directeur de l'exploitation, Lucas Crosnier, soupçonne l'association de riverains Vaurais Nature Environnement (VNE) d'être derrière ce saccage, ce que l'organisation dément. Voici ce que l'on sait de cette affaire.

Des greffons de pommiers arrachés et jetés au sol

Une parcelle de trois hectares d'arbres fruitiers a été dégradée sur le domaine de Fontorbe, soit près de 1% de cette exploitation qui s'étend sur 325 hectares et emploie cent personnes. Vendredi matin, le directeur du domaine et son équipe ont constaté les dégâts : sur toute la surface, les greffons de pommiers ont été arrachés et jetés au sol.

"C'est (de) la bêtise humaine. Certains de mes salariés ont vu 100% de leur travail des trois derniers mois arraché."

Lucas Crosnier, directeur du domaine de Fontorbe

à France Bleu Occitanie

Lucas Crosnier a précisé à nos confrères de France Bleu Occitanie que les "vergers de pommiers tout juste surgreffés" étaient concernés. "On fait les comptes et on espère que cela ne détruira pas les porte-greffes", a ajouté l'exploitant, soulignant que renouveler un verger représentait "beaucoup d'investissements".

Une association mise en cause et qui dément

Le directeur du domaine soupçonne des membres d'une association de riverains d'être derrière ces dégradations. La surface saccagée est "en déconversion", a-t-il expliqué, c'est-à-dire que certaines parcelles bio reviennent en culture conventionnelle. Or, le 1er juillet, l'association Vaurais Nature Environnement a organisé une marche citoyenne, qui s'est déroulée dans le calme, pour contester ce choix de revenir à une agriculture conventionnelle, rappelle France Bleu Occitanie.

"Cet acte de vandalisme intervient quinze jours après la marche (...) suite à laquelle nous avions légitimement le sentiment que les échanges constructifs pouvaient se poursuivre. L'action destructive dont nous avons été victimes cette nuit tend à montrer que la volonté de certains militants n'est qu'un affichage", a fustigé Lucas Crosnier dans un communiqué consulté par France 3.

De son côté, l'association VNE a nié toute responsabilité. "Nous déplorons l’action de destruction sur les vergers, dont Vaurais Nature Environnement n’est aucunement responsable et qui n’est en rien liée à l’action de notre association", a-t-elle assuré sur Facebook, précisant que cela ne rentrait pas dans ses "manières d’agir, pacifiques et légalistes".

"Ce n'est pas une action qui a été portée par l'association, ce n'est pas notre mode opératoire", a insisté Olivier Chollet, l'un des représentants de VNE, auprès de l'AFP. "On déplore cette action et elle nous cause du tort, nous appelons à l'apaisement", a-t-il ajouté.

Des conflits avec les riverains par le passé

Les relations entre le domaine de Fontorbe et les riverains ont déjà été tendues dans le passé. En avril 2021, le responsable du verger avait brûlé des tonnes de paille pour protéger ses arbres du gel. Les fumées avaient intoxiqué une vingtaine d'habitants. Les riverains s'étaient mobilisés et le maire de Lavaur, Bernard Carayon (Les Républicains), avait porté plainte.

En mars 2022, rappelle France Bleu Occitanie, Lucas Crosnier avait été placé en garde à vue pour son utilisation de pesticides. Le département du Tarn était alors placé en vigilance orange vent violent et cette pratique est interdite par grand vent pour éviter que les produits ne se dispersent sur les propriétés voisines.

Peu après, le domaine de Fontorbe avait porté plainte pour dénigrement contre cinq associations environnementales, la Confédération paysanne du Tarn et une réalisatrice, après la diffusion du documentaire intitulé On nous enfume : quand la pomme empoisonne notre vie. Le film dénonçait le risque lié aux pesticides lors des épandages. En avril dernier, le tribunal judiciaire de Castres avait déclaré "nulles" ses assignations, décision accueillie dans la liesse par VNE.

Une enquête pour "dégradations en réunion"

Lucas Crosnier a porté plainte pour les arrachages perpétrés cette semaine. Le parquet de Castres a ouvert une enquête pour "dégradations en réunion", estimant que l'ampleur des dégâts était telle qu'elle n'avait pas pu être réalisée par un seul individu.

La préfecture "condamne fermement cet acte", mais ne fait pas de lien avec la manifestation qui s'est tenue deux semaines auparavant. Le parquet estime également que les éléments "ne permettent pas de déterminer" si des militants écologistes sont les auteurs des dégradations.

Des réactions politiques d'indignation

Des élus n'ont pas tardé à réagir. "Obscurantisme et police de la pensée et des choix agricoles. Voilà où mènent les excès verbaux et la désinformation sur des sujets qui ne supportent pourtant pas la caricature. Nous ne céderons rien", a écrit le ministre de l'Agriculture, Marc Fesneau, sur Twitter, citant le tweet du collectif Sauvons les fruits et légumes de France, qui regroupe maraîchers et arboriculteurs.

Le maire de Lavaur a soutenu auprès de l'AFP que la marche organisée par VNE avait selon lui "un lien direct" avec les dégradations. "On sait que ça vient d'une partie des manifestants", a assuré Bernard Carayon, regrettant "une obsession des militants écolos radicaux depuis un an contre ces vergers". La cheffe de file du Rassemblement national, Marine Le Pen, a, elle, dénoncé sur Twitter des "actes de destruction et de ravage" qui "doivent être maintenant lourdement sanctionnés par la justice, leurs auteurs, systématiquement recherchés, poursuivis et condamnés".

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