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Rappel des ambassadeurs français en Australie et aux États-Unis : "C'est une façon d'exprimer son mécontentement", selon le chercheur Bertrand Badie

Le chef de la diplomatie française Jean-Yves Le Drian a dénoncé un "coup dans le dos" de l'Australie.

Article rédigé par franceinfo
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Le ministre français des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian s'exprime en marge d'une réunion marquant le 30e anniversaire du "Triangle de Weimar" à Weimar (Allemagne), le 10 septembre 2021. (JENS SCHLUETER / AFP)

"C'est un langage, une façon d'exprimer son mécontentement", a estimé sur franceinfo Bertrand Badie, professeur émérite à Science Po et spécialiste des relations internationales, suite au rappel historique des ambassadeurs français en Australie et aux États-Unis, consécutivement à la rupture par l'Australie du contrat qui la liait à la France sur l'achat de sous-marins.

"Il y a deux façons d'agir sur les relations diplomatiques : soit vous rompez les relations diplomatiques et alors vous interrompez toute relation entre deux pays, ou alors vous rappelez votre ambassadeur, mais ça n'interrompt rien puisque les administrations des ambassades continuent à fonctionner de part et d'autre, a affirmé Bertrand Badie. Mais c'est un langage, c'est une façon de manifester sa colère, son mécontentement."

Le professeur à Science Po rappelle toutefois que ce type d'évènements est extrêmement rare : "On a vécu ça avec l'Italie il y a quelque temps, au moment où Luigi Di Maio s'était fait photographier avec des 'gilets jaunes', autrement, cela n'est pratiquement jamais arrivé."

Un "camouflet" pour la France

À travers ce geste diplomatique fort, il ne faut pas s'attendre à des conséquences immédiates et concrètes. "Ce n'est pas la rupture des relations diplomatiques, mais c'est peut-être une façon de dire qu'il faut revoir le dossier de nos relations, explique le spécialiste des relations internationales. Finalement, il y a eu un camouflet que la France a reçu de la part de l'Australie et des États-Unis. Mais il y a plus important que cela. Il y a l'idée même d'alliance qui se trouve ébranlée et requestionnée."

Cette alliance est un héritage de la guerre froide qui opposait le bloc occidental aux soviétiques. "L'alliance fait-elle encore sens ?, questionne Bertrand Badie. On a fait comme si de rien n'était depuis 1989, comme si les données étaient les mêmes. Aujourd'hui, ce n'est plus la même chose."

"À partir du moment où le camp d'en face est dissous [le bloc URSS], les relations s'assouplissent, se fluidifient, la notion d'alliance perd de son sens."

Bertrand Badie, professeur émérite à Science Po

à franceinfo

"Aujourd'hui ce sont des interdépendances extraordinairement complexes qui lient les pays les uns aux autres, analyse le professeur émérite à Science Po. Y compris les États-Unis et la Chine, y compris l'Australie et la Chine. On parle beaucoup et a tort de ce bloc Pacifique contre la Chine mais c'est plus compliqué que ça. L'Australie est entrée dans le plus grand des accords commerciaux régionaux qui la lie à la Chine et à ses voisins. Donc, on ne peut plus raisonner en termes de confiance automatique. On est dans le conjoncturel et l'évènementiel."

Si les ambassadeurs de France aux États-Unis et en Australie sont rappelés, ce n'est pas le cas de celui à Londres. "Cela s'explique par une moindre responsabilité des Britanniques dans cette affaire. Il ne faut pas oublier que ce qui a mis le feu aux poudres, c'est un accord américano-australien qui se substitue à un accord franco-australien. Ce sont ces deux pays qui ont asséné directement une humiliation à la France. La Grande-Bretagne n'est intervenue que de manière subsidiaire."

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