Congés imposés aux salariés : "Une bonne idée" qui "ne pourra pas être mise en place du fait de la complexité administrative", regrette un représentant de la restauration
Pour permettre aux employeurs de reprendre sereinement leur activité, la ministre du Travail Elisabeth Borne propose aux employeurs la possibilité d'imposer huit jours de congés à leurs salariés contre six aujourd'hui. Une solution impossible "à mettre en place"; estime le Groupement national des indépendants en hôtellerie et restauration.
Didier Chenet, président du Groupement national des indépendants en hôtellerie et restauration (GNI) a salué lundi 19 avril sur franceinfo "une bonne idée sur le papier" qui "ne pourra pas être mise en place du fait de la complexité administrative". La ministre du Travail, Elisabeth Borne, propose de laisser plus de latitude aux employeurs sur les congés payés : les entreprises pourraient ainsi imposer aux salariés huit jours contre six aujourd'hui pour éviter une sortie de crise trop complexe à gérer.
franceinfo : Ces deux jours supplémentaires de congés payés imposés aux salariés sont-ils une bonne nouvelle ?
Didier Chenet : Les chefs d'entreprise n'imposent pas comme cela, de façon aussi drastique et sans un minimum de concertation, les congés à leurs salariés. Il faut savoir que les congés qui ont été acquis pendant toute cette période de fermeture devront être pris avant le 31 mai. Cette possibilité qui nous est offerte, à la très grande majorité de nos entreprises qui sont des TPE, elle ne pourra pas s'appliquer et être mise en place du fait de la complexité administrative qu'elle impose. Si vous êtes une entreprise de moins de 20 salariés, pour recourir à cette possibilité, vous devrez proposer un projet d'accord aux salariés. Il faudra que cet accord soit approuvé aux deux tiers des salariés. C'est encore beaucoup trop complexe. Si vous êtes une entreprise de moins de 50 salariés, il faut trouver un salarié mandaté par une organisation syndicale et l'accord devra être approuvé par la majorité des salariés. C'est une bonne mesure. C'est une bonne idée sur le papier, mais la complexité administrative française fait qu'une fois de plus on ne pourra pas y arriver.
Depuis mars 2020, vous pouviez imposer 6 jours de congés à vos salariés. Avez-vous pu appliquer cette mesure ?
Cela a pu être appliqué, notamment dans les grands groupes, moins dans les petites entreprises. Mais le problème pour nos entreprises n'est pas tant de dire aux personnels : prenez vos congés. Le problème, c'est le coût pour les entreprises. Pendant les périodes de fermeture, les salariés ont continué à avoir des droits à congés. Nous nous retrouvons avec dix mois d'inactivité et en face, des congés payés du personnel qui n'aura jamais travaillé chez nous. C'est une charge, à peu près 3% du chiffre d'affaires, extrêmement difficile à supporter. Nous avions obtenu de pouvoir mettre dix jours en congés sur le chômage partiel jusqu'au 31 mars. Ce que nous demandons, c'est la même possibilité jusqu'à fin mai. Quelqu'un est au chômage partiel, on le met en congés payés, mais on continue de le considérer comme étant au chômage partiel.
Craignez-vous que vos salariés soient obligés de prendre des congés au moment de la reprise d'activité ?
La crainte vient des entreprises qui vont avoir effectivement à payer, de façon échelonnée certes, ces congés payés, alors même qu'ils n'ont pas eu d'activité et qu'ils n'ont pas la trésorerie pour le faire. C'est la grande crainte que nous avons. Et l'autre crainte, c'est la difficulté pour un certain nombre de nos salariés de retrouver le rythme de travail. Ils ont eu un rythme de travail calé sur une vie privée ordinaire, comme tous les Français, alors que nous avons une activité à midi, le soir, pendant les fêtes. Nous avons coutume de dire que plus les gens font la fête, plus nos salariés ont du travail.
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