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Reconversion professionnelle : un bilan de compétences et du coaching avant de franchir le pas

Article rédigé par Catherine Fournier
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 12min
Définir son objectif est une étape cruciale pour bien débuter sa reconversion professionnelle. (FRANCETV INFO / PASCALE BOUDEVILLE)

La réforme de la formation professionnelle est un des grands chantiers du gouvernement. Alors que les négociations entre les partenaires sociaux touchent à leur fin, francetv info propose son tutoriel pour ceux qui veulent changer de métier. 

Elle bénéficie surtout à ceux qui en ont le moins besoin. La formation professionnelle, ou formation tout au long de la vie, est l'un des grands chantiers du gouvernement Ayrault. Sa réforme, actée mi-décembre après de longues négociations entre partenaires sociaux et présentée mercredi 22 janvier en Conseil des ministres, vise à inverser la donne. Et à permettre aux moins qualifiés et aux demandeurs d'emploi de profiter davantage de cette seconde chance. 

Entre le poids du diplôme et les ratés de l'orientation scolaire, qui privilégie toujours la voie générale, il reste difficile de refaire sa vie professionnelle en France. Pourtant, plus d'un Français sur cinq envisage de changer de métier, selon un sondage CSA pour les Notaires de France publié en octobre. Les carrières linéaires se raréfient, de gré ou de force, et les salariés ne passent plus toute leur vie dans la même entreprise. Comment rebondir ? Comment se repérer dans le maquis des dispositifs existants ? Francetv info a défriché le terrain. Premier épisode : comment (re)trouver sa voie ? 

Le "bilan de compétences", étape quasi incontournable

Créé en 1991, le bilan de compétences est le dispositif le plus connu dans le domaine de la formation continue. Loin d'aboutir systématiquement à un changement de métier, il constitue néanmoins une première étape quasi incontournable. Notamment parce qu'il permet, à terme, d'appuyer une demande de financement pour une formation. 

Quand y penser ? Vous n'avez plus envie de vous lever le matin pour aller au travail ? Il est temps de vous interroger. "Certains attendent trop longtemps avant de venir nous voir et arrivent fragilisés", souligne Isabelle Bertrand, consultante à l'Apec, organisme qui conseille les cadres, à Dijon. "J'ai changé une fois de poste, et puis je me suis retrouvé face aux mêmes limites au bout d'un certain temps, témoigne Alexandre, ancien cadre commercial parisien de 28 ans, reconverti en professeur d'histoire-géo. Je n'avais pas envie d'être confronté à ça pendant les quarante prochaines années." 

Lassitude, quête de sens, crise de la quarantaine, deuil ou rupture... Voici quelques-uns des principaux facteurs qui poussent un salarié à envisager une reconversion. Certains savent déjà ce qu'ils rêvent de faire. D'autres n'en ont pas la moindre idée. Le bilan de compétences peut leur apporter des réponses.  

Qui aller voir ? Si vous êtes salarié en CDI (avec au moins cinq ans d'activité professionnelle, dont 12 mois dans votre entreprise actuelle) ou en CDD (24 mois d'activité, dont quatre au cours des 12 derniers mois), vous avez deux options : aller voir le service ressources humaines de votre entreprise, ou faire les démarches de votre côté. La deuxième solution est souvent privilégiée, car elle permet de ne pas informer son employeur de son désir de changement. Dans ce cas, commencez par vous rendre sur le site du Fongecif, principal organisme de financement. Cliquez alors sur l'onglet en haut à droite "Un centre de bilan de compétences". Là, vous trouvez les centres agréés près de chez vous ou proches de votre travail.

 

Capture d'écran du site du Fongecif. (  FRANCETV INFO )

Choisissez-en plusieurs, et allez sur place pour rencontrer le conseiller potentiel qui mènera votre bilan de compétences. Un bon contact est essentiel dans ce type de démarche. Quand vous avez trouvé la bonne personne, appelez le Fongecif de votre région et demandez-lui de vous faire parvenir un dossier à remplir. 

Si vous êtes demandeur d'emploi, le bilan de compétences devient un CPP pour "Confirmer son projet professionnel". Prenez directement rendez-vous auprès de votre agence Pôle emploi pour en parler avec un conseiller.   

Les fonctionnaires, eux, doivent se tourner vers leur administration (le rectorat pour un enseignant par exemple). Attention, dans la fonction publique d'Etat, il faut attendre 10 ans avant de pouvoir prétendre à un bilan de compétences. Pour la fonction publique territoriale et hospitalière, les délais sont détaillés ici

Combien ça coûte ? Généralement, rien. Un bilan de compétences, dont les tarifs varient de 1 200 à 3 000 euros, est quasiment toujours financé avec les fonds de la formation professionnelle, que vous soyez salarié, demandeur d'emploi ou fonctionnaire. Même les entreprises de moins de 10 salariés doivent s'acquitter d'une cotisation. 

Pour un salarié en poste, le bilan peut être réalisé sur le temps de travail et financé par l'entreprise, à condition que l'employeur soit au courant, s'il n'est pas à l'initiative du bilan. Il peut aussi être effectué hors du temps de travail, au titre du DIF (Droit individuel à la formation), et pris en charge par l'Opca (Organisme paritaire collecteur agréé) dont votre entreprise dépend. Pour vérifier que vous relevez du Fongecif, par exemple, appelez ce dernier et donnez-lui le numéro de siret (un code Insee d'identification des établissements) qui figure sur votre feuille de paie. Si ce n'est pas le cas, ils vous renverront vers le bon Opca. En toute confidentialité.

Toutes les entreprises, même celles de moins de 10 salariés, s'acquittent de cotisations pour la formation professionnelle. (MYCHELE DANIAU / AFP)

Votre demande de bilan de compétences peut essuyer un refus. Par votre entreprise, qui a le droit de le reporter de six mois. Par l'organisme de financement (Opca, Pôle emploi...), qui tient compte de plusieurs critères. Au Fongecif Ile-de-France, la priorité est donnée aux personnes de niveau inférieur au bac, âgées de plus de 45 ans, salariées d'une petite entreprise et au parcours professionnel chaotique. Il n'empêche. Insistez. Il est rare de se voir refuser un bilan de compétences plusieurs fois.

Comment ça marche ? Un bilan de compétences dure 24 heures, réparties sur une période comprise entre trois semaines et quatre mois. Il se déroule en trois phases : analyse des besoins de la personne et de ses "valeurs", approfondissement de ses motivations, de ses intérêts et de ses compétences, et repérage des métiers qui pourraient lui correspondre. Le bilan, conclu par un rapport écrit, aboutit parfois à une formation. "Cela permet de trouver des pistes", admet Caroline, 34 ans, passée de la communication aux ressources humaines après un bilan de compétences. Le service proposé par Pôle emploi, le CPP, dure un peu moins longtemps : 12 heures, réparties sur 42 jours. 

Et si ça n'aboutit pas ? Nombreux sont les salariés qui en restent au stade du bilan de compétences. Pour Olivier*, cadre commercial de 36 ans, le processus lui a surtout permis de trouver une écoute psychologique lorsque cela n'allait plus dans son travail. Au final, il a simplement changé d'entreprise. S'il souhaite réitérer l'expérience, il lui faudra attendre cinq ans, délai nécessaire pour bénéficier d'un nouveau financement. Entre-temps, il peut se tourner vers l'Apec, qui propose aux cadres un service un peu équivalent, baptisé "Perspectives". Gratuit, il se découpe en 7 à 9 heures de travail avec un consultant. Il suffit de laisser ses coordonnées sur le site pour être contacté. 

Le coaching, un bilan nommé "désir" 

Coach de look, coach de vie, coach sportif, et maintenant coach de reconversion... Le coaching, arrivé tout droit des Etats-Unis, est désormais bien implanté en France. Selon la Société française de coaching, ils étaient 1 500 en France à déclarer exercer cette activité en 2010. Si cette profession n'a pas de statut reconnu par les pouvoirs publics, elle commence à faire ses preuves dans le monde de l'entreprise. 

Quand y penser ? Quand un bilan de compétences n'a pas suffi à dessiner un nouveau projet professionnel. Et quand on souhaite aller plus vite. Le salarié cale lui-même ses rendez-vous, au rythme qui lui convient. "Le coaching est complémentaire, explique Renaud Wakselman, coach professionnel à Paris. Le bilan conforte souvent les salariés dans leurs compétences mais n'interroge pas assez leur désir. Dans le coaching, tout part de là." 

Qui aller voir ? Si vous souhaitez rester dans la confidentialité, faites jouer le bouche-à-oreille. C'est ce qui marche le mieux, comme lorsque l'on cherche un bon psy, d'autant que le secteur n'est pas à l'abri de dérives sectaires. Sinon, vous pouvez consulter les listes de professionnels agréés et répertoriés par des structures sérieuses, comme l'Association européenne de coaching (EMCC France). Ou vous renseigner auprès de l'université Paris-8, qui propose un diplôme de coaching et peut donc vous mettre en contact avec ses intervenants. Comme pour le bilan de compétences, si le coach ne vous convient pas, changez de crémerie. 

Combien ça coûte ? Le prix d'une séance varie de 80 à 150 euros. Actuellement, aucune prise en charge n'est prévue dans le cadre de la formation professionnelle. Mais des solutions existent pour ceux qui n'ont pas les moyens de s'autofinancer. L'EMCC France propose ainsi du "coaching solidaire" pour les personnes dont les revenus mensuels n'excédent pas 1 000 euros net par part fiscale. Pour s'inscrire, il faut cliquer ici.

Capture d'écran du site de l'EMCC France, Association européenne du coaching. (  FRANCETV INFO )

L'Ecole française de coaching propose, quant à elle, "une bourse aux coachés". Les personnes intéressées doivent appeler l'établissement pour connaître la marche à suivre. Le principe est simple : un étudiant de l'école s'exerce en vous coachant pendant une dizaine de séances. Il est "accompagné et supervisé", précise Marie-Hélène Dini, la directrice. 

Comment ça marche ? Il faut compter entre 5 et 10 séances, d'une heure à une heure et demie chacune. Le coach commence par vous interroger sur vos désirs professionnels enfouis. "Qu'est-ce qui vous faisait rêver quand vous étiez petit ? Qu'est-ce que vous ne vous êtes pas autorisé à faire ?" Il vous incite également à demander à quelques amis dans quel métier ils vous verraient, sans tenir compte d'aucune réalité. C'est comme cela que Fabrice, journaliste scientifique âgé de 39 ans, a (re)trouvé sa voie. Une amie avait suggéré chocolatier. "Ce métier s'est complètement imposé. Je l'ai senti dans mes tripes, c'était une espèce de réconciliation", raconte-t-il.

Si les rêves exprimés sont trop loin de la réalité, "on referme les pistes petit à petit, pour ne pas rester dans le fantasme, explique Renaud Wakselman. Une fois qu'on a identifié trois-quatre métiers, on regarde ce qu'il y a de commun et de différent entre eux et on invite la personne à commencer à se renseigner sur ces activités professionnelles."  

Et si ça n'aboutit pas ? Si les 10 séances n'ont pas suffi à trouver un nouveau métier, peut-être la personne n'est pas encore prête ou s'est trompée sur son besoin de changement. "Parfois, une mise à plat des difficultés suffit. Il faut toujours vérifier que la demande porte vraiment sur une reconversion professionnelle", souligne Renaud Wakselman. D'autres résistances peuvent également être à l'œuvre : celle du conjoint ou de la famille, dont le soutien est absolument nécessaire, ou le problème de l'argent sont des freins récurrents. Une baisse de niveau de vie va souvent de pair avec une reconversion professionnelle. 
 
"Il n'est pas nécessaire de faire le 'bon choix' ou de prendre la 'bonne décision' tout de suite, reprend le coach. On peut y aller par étapes et par priorités." Un virage à 180 degrés ne se prend pas forcément en une fois.
 
* Le prénom a été modifié

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