Vélib' : trois questions sur la bataille entre JCDecaux et Smoove
La PME héraultaise a remporté le marché des vélos en libre-service parisiens face à JCDecaux, qui le détenait depuis 2007. Une petite révolution.
Smoovengo a détrôné JCDecaux et son service parisien de vélos en libre-accès Vélib'. La PME héraultaise s'est attribué le marché, mercredi 12 avril, à l'issue du vote définitif des adhérents du syndicat mixte Autolib' Vélib' Métropole. Le nouveau contrat doit entrer en vigueur à compter de janvier 2018 et pour une durée de quinze ans. L'offre de Smoovengo entend proposer des vélos plus légers et plus solides, avec un tiers de vélos électriques, et le service sera élargi à la métropole du Grand Paris.
Que craignent les salariés ?
La filiale de JCDecaux en charge de Vélib', Cyclocity, emploie 315 salariés inquiets pour leur avenir. "Nous sommes mécontents, résume Bambo Cissokho, secrétaire du comité d'entreprise. Nous, nous voulons continuer à travailler pour Vélib'.On ne veut pas laver des abribus ou coller des affiches pour JCDecaux." Une centaine de personnes ont manifesté devant la mairie de Paris, début avril, et une délégation a été reçue par le syndicat Autolib' Vélib' Métropole. Nous voulons que Smoove "s'engage à nous reprendre tous, avec les mêmes contrats et les mêmes acquis sociaux", a indiqué Bambo Cissokho, cité par France 3 Paris Ile-de-France.
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Les élus écologistes de Paris ont adressé un courrier à Laurent Mercat, PDG de Smoove, et à Jean-Charles Decaux, président du directoire de JCDecaux, pour leur demander "de s'engager formellement pour qu'aucun licenciement ne soit à déplorer à l'issue du changement du titulaire du contrat Vélib'". Les élus de l'UDI et du MoDem estiment de leur côté qu'il serait "honteux autant qu'inacceptable" que les salariés de Cyclocity "aient été considérés comme une variable d'ajustement" dans le cadre de l'appel d'offres. Smoove s'est engagé à privilégier le personnel en place pour ses recrutements à venir, mais sans autre garantie.
Comment réagit JCDecaux ?
Mardi, le groupement composé de JCDecaux, de la SNCF et de la RATP a déposé un recours en référé auprès du tribunal administratif de Paris. Dans un communiqué, le géant de l'affichage souligne que ce recours a été déposé "pour la défense des 315 collaborateurs qui participent au succès sans équivalent de Vélib’ depuis 10 ans". Le groupe français multiplie les accusations de "dumping social" contre son rival, au point de franchement l'agacer.
Smoovengo a d'ailleurs répondu pour dénoncer ces "méthodes de communication", évoquant "un total manque de fair-play". "Nous avons simplement fait la proposition la plus honnête et la plus juste répondant au cahier des charges", explique le PDG de l'entreprise, Laurent Mercat, dans une interview au Monde (article payant). Dans les colonnes du quotidien, il fait également valoir une "meilleure structure de coût" que JCDecaux, grâce à "des infrastructures mieux conçues".
Smoove, c'est vraiment mieux ?
Créée en 2008 près de Montpellier, la PME Smoove dirige le consortium Smoovengo et a déjà remporté des marchés dans 26 villes en France et à l'étranger. L'entreprise gère actuellement plus de 715 stations, 8 800 vélos en libre-service et 13 000 vélos de location longue durée. Si elle remporte le contrat parisien, elle devrait plus que doubler son parc de vélos et stations. Smoove s'est associée à quatre entreprises, dont le numéro un français du parking, Indigo, et l'un des plus gros vendeurs français de vélos à assistance électrique, Mobivia. En 2015, Smoove a doublé son chiffre d'affaires en décrochant un contrat à Moscou. Celui-ci s'est ainsi élevé à 6 millions d'euros cette année-là.
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Outre son prix, Smoove aurait également bénéficié de très bonnes notes techniques. La PME héraultaise met en avant la "smoove box", un boîtier électronique placé dans la potence du vélo, autonome en énergie car rechargé par la dynamo. Ce boîtier permet un accès direct et rapide au vélo, sans clé ni totem, et assure un système antivol et antivandalisme sophistiqué. Il permet également de rendre un vélo dans une station déjà pleine, en l'accrochant à un autre, via le processus "overflow".
D'après la start-up, ce système a permis d'enregistrer un faible taux de vols dans la capitale russe et son efficacité allège le coût de l'exploitation. Tout le contraire de JCDecaux, note Le Parisien. "Du fait du vandalisme et du surcoût des stations en banlieue, un rapport de l'inspection générale de la Ville pointait en 2016 un coût de 16 millions d'euros annuel. D'où la volonté de tourner la page", écrit le quotidien francilien. A noter pour les utilisateurs que les prix des abonnements Vélib' pourraient passer de 29 euros à l'année à "35 ou 39 euros", selon les informations du Parisien.
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