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"Je joue mon semestre sur des devoirs à la maison" : comment la grève dans les transports chamboule aussi la vie des étudiants

Le mouvement social contre la réforme des retraites a contraint de nombreuses universités à trouver des aménagements pour leurs étudiants, même si certaines font preuve de moins de souplesse. Plusieurs jeunes ont répondu à notre appel à témoignages sur le sujet.

Article rédigé par Clément Parrot
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 6min
En raison de la grève dans les transports en commun, des personnes marchent ou roulent sous la pluie, le 16 décembre 2019, porte de Vanves, à Paris. (DOMINIQUE FAGET / AFP)

"Je ne sais pas si j'aurai un train pour aller passer mon partiel demain. La grève me pose beaucoup de problèmes." Anis, 23 ans, a répondu à l'appel à témoignages de franceinfo et ne cache pas son inquiétude. Etudiant en licence de mathématiques à la faculté Jean-Perrin de Lens (Pas-de-Calais), le jeune homme habite à 40 km de là, à Lille (Nord). Il a raté presque tous ses cours depuis le 5 décembre, en raison de la grève des transports, conséquence de la mobilisation syndicale contre la réforme des retraites. "Pour demain, j'ai regardé les sites de covoiturage, il y a un trajet le matin à 8h20, mais mon partiel est à 13 heures."

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Pour Anis comme pour de nombreux étudiants, la fin du premier semestre se révèle difficile. "J'ai eu une semaine de cours compliquée la semaine dernière, car je devais faire deux heures de trajet pour rentrer au lieu de 45 minutes habituellement, en sachant que mes cours se terminaient à 18 heures et que je devais réviser pour les examens", se plaint Emma*, étudiante en M2 (2e année de master) de biologie moléculaire à la Sorbonne, à Paris, et qui habite le Val-de-Marne.

Des examens reportés en janvier

La jeune femme souligne néanmoins que son université s'est montrée conciliante en annulant certains cours. "Ils ont même prévenu qu'il y avait une possibilité de reports pour les partiels, mais c'est un peu embêtant… J'aimerais bien m'en débarrasser pour passer des vacances tranquilles et ne pas me rajouter des révisions."  Damien, étudiant en L2 (2e année de licence) de sciences sociales à Strasbourg, a vu la moitié de ses partiels reportés à cause de la grève. Mais le jeune Strasbourgeois, qui soutient le mouvement social, préfère voir le verre à moitié plein : "Ce n'est pas plus mal, ça force la faculté à répartir le travail, vu qu'habituellement tous les partiels tombent en même temps."

Au final, on a davantage de temps pour réviser avec les vacances. 

Damien

à franceinfo

Plusieurs universités ont choisi de se montrer arrangeantes avec les étudiants en reportant ou en aménageant les épreuves, comme à Bordeaux, Lille, Lyon, Poitiers ou Rennes. À Amiens, les examens de la faculté de droit et de sciences politiques, prévus cette semaine et la semaine prochaine, ont ainsi été reportés au mois de janvier. "L'ensemble des partiels de sciences politiques en présentiel a été annulé au dernier moment, nous les passons en ligne ou en janvier pour ceux qui ne se prêtent pas à ce format", témoigne Naomie, étudiante en double licence en sciences et sciences sociales.

"On a perdu deux semaines de cours" 

Paul, étudiant en licence info-com à la Sorbonne, a également bénéficié d'un aménagement pour le calendrier de ses examens : "L'université a décidé de faire passer tous les partiels avant le début de la grève, entre fin novembre et début décembre (...), du coup, on a perdu deux semaines de cours."  Le jeune homme, qui habite Melun (Seine-et-Marne), a tout de même un partiel final de lettres modernes programmé mercredi et s'inquiète un peu en constatant que certains de ses amis mettent trois heures pour rejoindre le centre de Paris.

"Les professeurs acceptent que l'on passe les épreuves depuis chez nous, si la situation se justifie par notre éloignement par rapport aux locaux de la Sorbonne, située dans le 5e arrondissement", précise-t-il. Pour bénéficier de cette mesure, il faut pouvoir justifier que son domicile se trouve à plus d'une heure et demie à pied de la faculté ou d'un transport en commun fonctionnant bien aux heures de pointe. Dans le cas contraire, "si votre état de santé vous le permet, vous devez vous rendre à vos examens sous peine de vous voir attribuer un zéro pour absence injustifiée", prévient l'université. 

Pour Baptiste*, ces aménagements peuvent poser aussi problème. "Certains de mes partiels ont été déplacés après les vacances et les autres se sont transformés en devoir maison à rendre pour le 20 décembre. Je joue mon semestre sur des devoirs à la maison !" souffle cet étudiant de L3 (3e année de licence) information-communication à Paris XIII-Villetaneuse.  

"Ils ne veulent pas repousser les partiels"

Certains étudiants dénoncent aussi le manque de compréhension de l'administration. "L’Ecole de formation des barreaux (EFB) de Paris ne tolère aucune absence, assure Nicolas*. Elle nous a répété plusieurs fois, pour les examens oraux, de prendre nos dispositions et que si nous étions absents, nous aurions la note de 0. Nous sommes particulièrement inquiets pour l’examen final du 19 décembre car le seul moyen de se rendre au centre d'examen est le RER A [très perturbé par la grève]." Certains étudiants de l'EFB ont par conséquent décidé d'alerter par courrier le bâtonnier de Paris, qui en l'occurrence est une bâtonnière, Marie-Aimée Peyron.

Nous avons appelé plusieurs fois l’administration pour demander le report ou la délocalisation de l’examen, mais l’administration veut son maintien.

un étudiant à l'EFB

à franceinfo

Alexis est étudiant en première année de médecine à Amiens et regrette également la fermeté de sa faculté : "Certains étudiants vont avoir du mal à venir aux partiels ou vont arriver en retard, or un retard est considéré comme une absence... Ils prônent l'équité des chances sur leur site mais ne veulent pas repousser les partiels." 

Marine, étudiante en première année de médecine à Montpellier, a la chance de pouvoir compter sur sa famille pour contourner les problèmes de transports causés par la grève : "Je passe le concours le 17 décembre à environ une heure de chez moi en transport en commun. J’ai de la chance car mes parents ont fait le déplacement depuis Bordeaux en voiture afin de pouvoir m’emmener le jour du concours."

*Les prénoms ont été modifiés à la demande de nos interlocuteurs.

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