Cinq propositions de la Fondation Abbé-Pierre pour en finir avec le mal-logement
Quatre millions de personnes souffrent du mal-logement ou d'absence de logement personnel en France, selon le rapport annuel de la Fondation Abbé-Pierre.
Migrants, SDF, locataires ou propriétaires en difficulté... Au total, quatre millions de personnes souffrent du mal-logement ou d’absence de logement personnel en France, selon le rapport annuel de la Fondation Abbé-Pierre, publié mardi 31 janvier.
Derrière ce chiffre se dessine une multitude de problématiques : hébergement d'urgence, logement social, impayés, expulsions, surpopulation, insalubrité... Pour venir à bout de la crise du logement en France, la fondation liste 15 propositions. Franceinfo vous présente cinq d'entre elles.
1Créer une "sécurité sociale" du logement
Le droit au logement opposable, instauré en 2007 par la loi Dalo, est de plus en plus mal appliqué, selon le rapport d'une mission d'évaluation rendu en décembre dernier, relayé par L'Express. Ce texte prévoit que toute personne menacée d'expulsion et n'étant pas en situation de se reloger par elle-même peut être reconnue prioritaire pour l'accès à un logement social. Mais le nombre de ménages reconnus au titre du Dalo est en baisse depuis 2013 et 59 000 d'entre eux sont toujours en attente.
C'est en partie pourquoi la Fondation Abbé-Pierre propose d'aller beaucoup plus loin et de créer une véritable "sécurité sociale" du logement, une politique globale. "Elle implique, pour les pouvoirs publics, d’appliquer une politique du 'logement d’abord', de produire 150 000 logements vraiment sociaux par an et de respecter les règles d’attributions prioritaires, de sécuriser l’accession à la propriété, de défendre les aides personnelles au logement…"
Pour la fondation, l'Etat doit modérer les loyers "en faisant respecter les règles de décence, en évitant les expulsions locatives et en proposant une garantie universelle des loyers". Et de prôner "un véritable New Deal des rapports locatifs".
2Généraliser le système par points pour attribuer les logements sociaux
La Fondation Abbé-Pierre part d'un constat : le système d’attribution des logements sociaux en France "souffre toujours d’opacité et de complexité". Elle recommande ainsi une généralisation du système de cotation, qui "permet une évaluation objective des demandes en fonction de la pondération de critères donnant droit à un certain nombre de points permettant de hiérarchiser les demandes".
Concrètement, pas de passe-droit : chaque demandeur reçoit une note, selon ces critères objectifs. De quoi, selon le rapport, "améliorer la transparence des attributions, limiter les risques de discrimination et permettre un débat public sur les critères à favoriser, tout en interdisant les choix discrétionnaires".
La fondation préconise aussi de développer la "location choisie" qu’expérimentent aujourd’hui un certain nombre de villes. Elle permet aux demandeurs de postuler eux-mêmes sur les offres de logements sociaux disponibles pour éviter de se voir proposer un logement trop éloigné de leurs besoins et diminuer ainsi le nombre de refus et de logements vacants.
3Aider les ménages à faire valoir leurs droits
Bien souvent, les personnes logées dans un habitat indigne ignorent leurs droits et n'en usent pas. C'est pourquoi la Fondation Abbé-Pierre juge "indispensable" de "proposer un accompagnement (social, technique, juridique et financier)" aux ménages concernés, qu'ils soient locataires ou propriétaires. Un dispositif déjà amorcé avec l’accompagnement aux droits liés à l’habitat (ADLH), mais qu'il convient de développer.
4En finir avec les logements mal isolés
Bronchites, arthrose, anxiété, maux de tête, dépression… Selon l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), habiter un logement mal chauffé accroît de 50% le risque de se déclarer en mauvaise santé. Or, 18,8% des ménages se sont plaints du froid en 2013, contre 10,9% en 1996.
En outre, le coût des sources d'énergie dans les logements grève le budget des ménages modestes. Au total, 3,6 millions d’entre eux y consacrent plus de 10% de leurs revenus. La fondation plaide donc pour des aides financières accrues afin de "subventionner presque entièrement les travaux chez certains et un accès plus facile aux allocations logement pour rembourser les prêts".
Ce sera la seule manière, souligne le rapport, de respecter l'objectif de la loi de transition énergétique de 2015 pour éradiquer les "passoires énergétiques" : 500 000 rénovations par an, dont au moins la moitié concernant des logements occupés par des ménages modestes.
5Développer le "bail réel solidaire" pour favoriser l'accession à la propriété
La fondation alerte sur le danger du "tous propriétaires". Bien souvent, "le ménage s’aperçoit trop tard des coûts sous-estimés, de charges, de chauffage ou de transports liés à un logement, ou tout simplement que le quartier ne lui convient pas", écrit-elle. Pour éviter ce genre de déconvenues coûteuses, elle encourage le développement d'une "piste originale, actuellement en voie d’expérimentation" : le bail réel solidaire.
Ce dispositif permet à un organisme de foncier solidaire (à but non lucratif) d'acquérir et de gérer des terrains sur lesquels des ménages, sous conditions de ressources, peuvent louer ou acheter un logement à un prix modéré. Le ménage loue le terrain pour une somme modique et pour une très longue durée (entre 18 et 99 ans). Selon la fondation, "l’avantage de la dissociation de propriété est de permettre d’offrir des logements à moindre prix à des ménages modestes".
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