Après l'incendie de son siège, "Charlie Hebdo" accueilli par "Libération"
L'équipe de l'hebdomadaire satirique a investi les locaux du quotidien, à la suite de l'incendie aux deux tiers dans la nuit. Le journal avait annoncé la publication mercredi d'un numéro spécial intitulé Charia Hebdo.
"Il n'y a plus de quoi faire un journal, tout a fondu, tout a cramé", a décrit le dessinateur Charb, directeur de la publication de Charlie Hebdo, sur Europe 1. Le siège parisien de l'hebdomadaire satirique a été incendié dans la nuit du mardi 1er au mercredi 2 novembre. Son site internet a lui été victime d'un piratage.
La publication, mercredi, d'un numéro polémique intitulé Charia Hebdo et qui fait notamment référence à la Libye et à la Tunisie, est à l'origine de ces actes. En Libye, la loi est maintenant fondée sur la charia et en Tunisie, le parti islamiste Ennahda est arrivé en tête des premières élections libres dimanche 23 octobre.
FTVi fait le point sur ce que l'on sait de ces attaques contre l'hebdomadaire.
• Sur l'avenir de "Charlie Hebdo"
L'équipe de l'hebdomadaire s'est installée temporairement mercredi après-midi dans les bureaux de Libération. Le directeur de la rédaction du quotidien, Nicolas Demorand, l'avait proposé sur Twitter un peu plus tôt. Charlie Hebdo va réaliser quatre pages, une comprise, du quotidien à paraître jeudi.
L'hebdomadaire n'entend pas s'arrêter. La rédaction a décidé d'organiser "une conférence de rédaction publique" jeudi à 15 heures au Théâtre du Rond-Point, à Paris (8e arrondissement). Des visiteurs se sont rendus devant le siège pour manifester leur soutien. "Je suis musulman et je viens vous apporter ma solidarité, si ce sont des musulmans qui ont fait ça, j'ai honte", dit ainsi Tahar Klaa, de nationalité tunisienne.
"On va trouver du matériel d'urgence pour sortir un numéro la semaine prochaine. Il en va de la survie du journal, a affirmé Charb. Je ne laisserai pas le terrain aux islamistes."
Charlie Hebdo avait déjà eu affaire à la colère de certains musulmans après avoir publié des caricatures de Mahomet dans un numéro paru en février 2006. Mais jamais il n'avait été victime de telles attaques. Résultat, le numéro de mercredi, tiré à 75 000 exemplaires, s'est retrouvé rapidement en rupture de stock.
• Sur l'incendie du siège parisien
Des témoins auraient vu des hommes s'enfuir peu après le début de l'incendie. "Il était entre 1h10 et 1h20 lorsque, alerté par un bruit de vitre brisée, un témoin aurait aperçu deux personnes en train de prendre la fuite alors qu'elles venaient de jeter 'un ou deux engins incendiaires' au 62 boulevard Davout, à Paris (20e arrondissement), siège du journal", relate Le Monde. La police a précisé qu'il s'agissait d'un "jet de cocktail Molotov".
Selon le médecin urgentiste et chroniqueur de Charlie Hebdo Patrick Pelloux, le cocktail Molotov aurait été lancé "sur la devanture et aurait mis le feu au système informatique". Maîtrisé en tout début de journée, l'incendie n'a fait "aucun blessé". Pour l'instant, "il n'y a pas d'interpellation", selon la police.
Le ministre de l'Intérieur, Claude Guéant, s'est rendu sur place dans la matinée. "Bien sûr, tout sera fait pour retrouver les auteurs de cet attentat, parce qu'il faut bien appeler ça un attentat", a-t-il martelé, ajoutant qu'il était peut-être le fait de musulmans intégristes.
De son côté, le président du Conseil français du culte musulman (CFCM), Mohammed Moussaoui, a "condamné" l'attaque "tout en étant vigilant sur l'origine de l'incendie".
• Sur le piratage du site
Le site de Charlie Hebdo a été piraté ce matin. Le journal a bloqué dans la matinée l'accès à son site, "hacké à 5 heures depuis l'étranger", selon Eric Torcheault, le directeur administratif du journal.
Un message en anglais et en turc a été diffusé sur la page d'accueil du site, dénonçant le fait que Charlie Hebdo représente le prophète Mahomet sur sa une, ce qui est interdit par le Coran. "C'est la même vengeance de connards", a déclaré Charb au sujet de cette cyber-attaque.
• Le soutien unanime de la classe politique
Outre Claude Guéant, le ministre de l'Intérieur, qui a défendu la liberté de la presse et la "liberté de penser", Jean-François Copé, secrétaire général de l'UMP, et plusieurs membres du gouvernement, dont Frédéric Mitterrand, le ministre de la Culture et de la Communication, ont condamné ces actes.
Le premier ministre, François Fillon, a fait part de son "indignation" et demandé "que toute la lumière soit faite" sur ces événements. Nathalie Kosciusko-Morizet, la ministre de l'Ecologie, a estimé sur France Info que les auteurs des attaques étaient des "ennemis de la démocratie". Sur RTL, le ministre du Travail et de la Santé, Xavier Bertrand, s'est déclaré "profondément choqué".
Même condamnation de la part de François Hollande, candidat socialiste à la présidentielle, et de l'équipe de campagne de Marine Le Pen, présidente du Front national. Quant à Jean-Luc Mélenchon, le candidat du Front de gauche, il a qualifié l'incendie de "répugnant".
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