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Reportage Blocage des raffineries contre la réforme des retraites : "C’est le seul moyen de défense des travailleurs", défend une automobiliste marseillaise, agacée mais solidaire

Des stations à sec et d'autres qui font le plein de clients par crainte de la pénurie, c'est la conséquence du blocage des raffineries. Mardi matin, 8% des stations de l'hexagone n'étaient plus en mesure de fournir au moins un carburant. Une moyenne. À Marseille, plus de la moitié sont touchées.
Article rédigé par Hugo Charpentier
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3 min
Cinq heure du matin mardi 21 mars 2023 dans une station-service la sortie de Marseille. Le blocage des raffineries, dû à la contestation contre la réforme des retraites, créé se premières pénuries. (HUGO CHARPENTIER / RADIO FRANCE)

Dans cette station-service à la sortie de la Marseille, il faut patienter 45 minutes, voire une heure, pour faire le plein. Depuis 5 heures du matin, ce mardi 21 mars, une longue file d'attente dépasse des pompes à essence. Parmi ces automobilistes, Karine a l'impression de revivre le scénario noir de l'automne dernier. "Ça rappelle des souvenirs, commente-t-elle, amère. Il y a d’autres moyens de manifester son mécontentement que de bloquer des gens qui vont travailler. Je ne trouve pas que ce soit une façon sympathique de faire les choses. Je n’ai pas envie de soutenir un mouvement comme ça". 

>> Blocages des raffineries : "Le gouvernement a perdu le contrôle de la situation", lance un syndicaliste du plus grand site TotalEnergies de France

Quelques heures plus tard, la queue s’est allongée. Lionel, infirmier, a dû attendre 1h10 pour faire son plein et est passablement excédé. "J’ai dû annuler mes deux premiers rendez-vous à domicile. Je comprends qu’il y a toujours des gens mécontents, c’est l’histoire de la nature humaine. J’ai bientôt 48 ans, j’ai commencé à travailler tard. S’il faut que je travaille deux ans de plus, je travaillerai deux ans de plus", lance-t-il fataliste.

"On a l'impression que c'est vraiment la seule solution"

Si leur agacement est partagé, la plupart des automobilistes rencontrés sont solidaires malgré tout du mouvement et en veulent surtout au gouvernement. Karim estime, par exemple, que la pénurie n'est pas tellement provoquée par les grévistes, mais plutôt par les choix de l'exécutif. "Le gouvernement fait passer quelque chose en force. Personne ne veut de cette réforme et ils continuent malgré tout", dénonce-t-il. "C’est le seul moyen de défense que les travailleurs ont", expose une femme qui patiente. C'est aussi ce que pense Rolande qui recherche désespérément du gazole depuis lundi.

"Je ne vois pas pourquoi on dit toujours que c’est la faute des gens qui font la grève."

Rolande, une automobiliste marseillaise

à franceinfo

"Ça, ça me sort des yeux, poursuit Rolande, révoltée. Les gens, les pauvres, ils font la grève, ils ne sont pas payés. Ils font des sacrifices et finalement, ça ne sert à rien. Je suis pour aller plus loin. Je suis avec les grévistes et tout ce qui se passe en ce moment". "C'est très désagréable, convient cet autre automobiliste, mais bon, je pense qu'il y a une bonne raison derrière. La seule manière d'obtenir quelque chose, c'est de bloquer le pays. On ne peut pas faire autrement. Le sentiment général, c'est qu'il y a un passage en force avec un non-respect de la démocratie. C'est triste, mais on a l'impression que c'est vraiment la seule solution."

À cinq heures du matin, mardi 21 mars 2023, il fallait déjà patienter de 45 minutes à une heure pour faire le plein, dans cette station à la sortie de Marseille. (HUGO CHARPENTIER / RADIO FRANCE)

Le gouvernement a annoncé mardi de premières réquisitions de personnels pétroliers au dépôt de Fos-sur-Mer, près de Marseille. Concrètement, la réquisition s'applique à trois salariés, chargés notamment du déstockage et du chargement des expéditions du carburant. Karine est bien évidemment favorable à ces réquisitions tout comme cette quinquagénaire croisée à la station. "C’est une très bonne décision, applaudit-elle. Il était temps parce qu’on prend quand même en otage tous les gens qui travaillent". Cet autre client n’est pas du tout d’accord. "La grève est un droit, martèle-t-il. Je ne vois pas pourquoi on irait contre. Ils n’ont qu’à retirer la réforme. C’est le gouvernement qui a les cartes en main".

 >> Blocages des raffineries contre la réforme des retraites : "Le gouvernement a perdu le contrôle de la situation", lance un syndicaliste d'Harfleur

Mardi, 8% des stations-service françaises étaient touchées par le blocage des raffineries contre la réforme des retraites adoptée lundi 20 mars, après le rejet de deux motions de censure contre le gouvernement. Une moyenne. Dans certains départements, comme dans les Bouches-du-Rhône, la situation est bien plus délicate. À Marseille, la moitié des stations manquent désormais de sans plomb ou de gasoil.

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