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Retraites : pourquoi la réforme promise par Emmanuel Macron n'est pas économiquement nécessaire pour maintenir le système

Selon le Conseil d'orientation des retraites, même sans allonger l'âge de départ comme le souhaite Emmanuel Macron, les dépenses n'exploseront pas. Le solde redeviendra même positif à partir de 2035.

Article rédigé par Sarah Lemoine
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3min
Une manifestation pour l'augmentation des pensions de retraite, à Clermont-Ferrand, le 24 mars 2022. (ADRIEN FILLON / HANS LUCAS)

Parmi les chantiers du nouveau quinquennat, Élisabeth Borne, Première ministre, va avoir la lourde tâche de piloter la réforme des retraites promise par Emmanuel Macron. Le dossier s'annonce explosif. Tous les syndicats, y compris la réformiste CFDT, ont déjà annoncé la couleur : ils combattront le recul progressif de l'âge légal à 64 ou 65 ans. L'un de leurs arguments, partagés par certains économistes, c'est que cette réforme n'est pas nécessaire pour équilibrer le système des retraites. Et le Conseil d'orientation des retraites (COR), instance publique indépendante, ne leur donne pas tort.

Les dépenses de retraites ne vont pas exploser

Si l'on en croit le dernier rapport du COR de juin 2021, la situation n'est pas alarmante. Certes, le système de retraite - tous régimes confondus - va encore générer des déficits dans les 10 ans à venir. Mais le solde devrait redevenir positif à partir de 2035, dans le meilleur des scénarios, sans réforme supplémentaire. L'indicateur le plus fiable pour le Conseil, c'est la part des dépenses de retraite dans la richesse nationale. Et ce que dit le COR, c'est que la trajectoire est maîtrisée, dans tous les cas de figure, jusqu'en 2070.

Concrètement, cela veut dire que les dépenses de retraites ne vont pas exploser. Bien au contraire, elles sont stables et vont même diminuer progressivement. Cela peut paraître contre-intuitif alors que la France vieillit, et qu'il y a moins de cotisants par retraités. Ce phénomène s'explique en réalité par la force des réformes passées. Notamment l'indexation des pensions sur l'inflation depuis 1987. Elle fait baisser progressivement le montant des pensions par rapport au dernier salaire. Ce que les Français ne savent pas forcément.

Une réforme pour financer d'autres mesures

La vraie question, résumait le président du COR il y a quelques semaines devant l'association des journalistes de l'information sociale, c'est : combien veut-on dépenser pour les retraites en France ? Aujourd'hui, c'est 325 milliards d'euros par an, soit 25% des dépenses publiques. Est-ce trop ou pas assez ? Le choix est avant tout politique.

Si le système de retraite n'est pas fondamentalement en danger, alors pourquoi vouloir faire travailler les Français plus longtemps ? Emmanuel Macron ne l'a pas caché, augmenter l'âge légal à 64 ou 65 ans, c'est permettre de dégager des moyens financiers - 9 milliards d'euros par an à horizon 2027 - pour financer d'autres avancées sociales, promet-il, sans augmenter les impôts. À l'intérieur du système de retraite, le chef de l'État souhaite augmenter les petites pensions à 1 100 euros pour une carrière complète. À l'extérieur aussi, puisqu' il s'agit de payer la réforme de la dépendance, de la santé ou de l'Éducation.

Une stratégie là aussi contestée par les syndicats. Ils estiment que ce n'est pas au système de retraite de financer ces réformes. Il y a d'autres moyens avance Laurent Berger de la CFDT qui propose par exemple de taxer plus les successions. Dans ce contexte, la concertation s'annonce donc très compliquée.

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