Cet article date de plus de dix ans.

Rachat de SFR : la partie vire-t-elle à l'avantage de Numericable ?

Le conseil de surveillance de Vivendi se réunit vendredi pour décider du sort de sa fililale télécoms. Les opérateurs candidats au rachat jouent leurs derniers coups et le suspense reste entier. 

Article rédigé par franceinfo avec AFP
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6min
Une boutique SFR à Paris le 6 mars 2014. (REMY DE LA MAUVINIERE / AP / SIPA)

Qui va remporter la mise ? Le conseil de surveillance de Vivendi se réunit vendredi 14 mars pour décider du sort de SFR, deuxième opérateur télécom français. Le groupe avait initialement décidé d'introduire en sa filiale Bourse avant de recevoir d'alléchantes offres de rachat de Bouygues et d'Altice/Numericable. Selon Les Echos, les patrons de Vivendi sont très partagés et la décision pourrait même être reportée. Le ministre du Redressement productif, Arnaud Montebourg, favorable à l'offre de Bouygues, a indiqué au contraire sur Europe 1 avoir "cru comprendre que les dirigeants de Vivendi ont décidé coûte que coûte de vendre SFR à Numericable"

DLTFTV_MAM_3876427 (EUROPE 1)

En attendant, les opérateurs concurrents jouent leurs derniers coups dans cette partie de pocker à plus de 10 milliards d'euros. 

Bouygues fait monter les enchères

Le groupe de communication et de BTP Bouygues a abattu son jeu dès le début de matinée, jeudi, en annonçant qu'il proposait 800 millions d'euros supplémentaires en numéraire pour mettre la main sur SFR. Ce qui porte son offre à 11,3 milliards d'euros, la valorisation de SFR à 15,5 milliards d'euros et la participation de Vivendi dans la société issue de la fusion à 43%

Martin Bouygues lors d'une visite du chantier du nouveau ministère de la Défense à Balard, le 17 janvier 2014. (JOEL SAGET / AFP)

Ses atouts L'offre de Bouygues, sur laquelle pesait des problèmes de concurrence, a été confortée par l'accord passé dimanche avec Iliad (Free), qui reprendra le réseau et les fréquences de Bouygues Telecom en cas de rachat de SFR.

Arnaud Montebourg a par ailleurs ouvertement soutenu la candidature de Bouygues en indiquant, dimanche, que "la concurrence par la destruction s'arrêtera si nous revenons à trois opérateurs mobile tout en maintenant des prix bas. Elle ne s'arrêtera pas si Numericable conquiert SFR puisque la concurrence restera à quatre dans le mobile."

En outre, Bouygues a un avantage fiscal sur Numericable. Ce dernier "a une holding au Luxembourg, son entreprise est cotée à la Bourse d'Amsterdam, la participation personnelle de son patron est à Guernesey dans un paradis fiscal de sa majesté la Reine d'Angleterre et ce dernier est résident suisse", a rappelé le ministre du Redressement productif sur Europe 1. "Il faut que monsieur Drahi [son principal actionnaire] rapatrie l'ensemble de ses possessions et de ses biens en France et nous aurons des questions fiscales à lui poser", a-t-il prévenu.

Numericable surenchérit et joue la carte de l'emploi

Jeudi, les salles de marchés ont bruissé de rumeurs d'un ultime relèvement de la partie "cash" de l'offre d'Altice, la maison-mère de Numericable, à 11,75 milliards d'euros. L'opérateur offrait jusque-là à Vivendi 10,9 milliards d'euros en cash et 32% de l'entité combinée.

Le groupe, donné moins favori que Bouygues au départ, joue également la carte du maintien de l'emploi s'il remporte la partie. Dans Le Parisien daté de jeudi, le PDG de Numericable, Eric Denoyer, tire à boulets rouges sur l'offre de Bouygues. Il affirme qu'"au moins 3 000 emplois seront affectés" si celui-ci est choisi pour racheter SFR, pointant "de graves problèmes de doublons"

Le PDG de Numericable, Eric Denoyer, lors d'une conférence de presse à Paris, le 28 octobre 2013.  (ERIC PIERMONT / AFP)

Ses atouts Selon Les EchosJean-René Fourtou, le président du conseil de surveillance de Vivendi, estime que l’opération avec Numericable "valorise correctement SFR, qu'elle pose relativement peu de problèmes d'exécution et qu'elle pourrait être mise en œuvre rapidement".

"Même s'il permet de générer de substantielles synergies, un rapprochement Bouygues Telecom/SFR fera face à une forte pression sur ses revenus car Iliad aura besoin de faire augmenter significativement ses parts de marché pour générer un retour sur les 1,8 milliard d'euros que lui aura coûté l'acquisition du réseau et du spectre, et Vivendi pourrait préférer détenir une position minoritaire dans un groupe Numericable/SFR plus stable", estiment les analystes financiers de la société Nomura.

Free entre dans le jeu

Au tour de Xavier Niel de mettre son grain de sel. Le fondateur d'Iliad (Free mobile) promet d'embaucher un millier de personnes si Bouygues Telecom fusionne avec SFR aux dépens de Numericable, dans un entretien aux Echos, vendredi 14 mars.

Xavier Niel a tout intérêt à ce que Bouygues l'emporte. Pour réduire le risque de blocage de l'achat de SFR par les autorités de la concurrence, Bouygues a en effet passé un accord avec Free Mobile pour lui céder son réseau et ses fréquences. Avec cette acquisition, "notre réseau sera quasiment équivalent à celui de nos concurrents", se félicite Xavier Niel.

Le fondateur d'Iliad, Xavier Niel, lors d'une conférence de presse, le 10 mars 2014 à Paris.  (ERIC PIERMONT / AFP)

Ses atouts Free a le soutien du gouvernement dans cette opération, notamment parce que celle-ci permettrait de revenir à trois opérateurs sur le marché. "L'objectif pour le marché et notamment le régulateur des télécoms, c'est d'avoir un bon équilibre entre les opérateurs. Ce sera le cas", ajoute Xavier Niel. Et selon lui, il faudra recruter "massivement" pour "entretenir et maintenir" ce nouveau réseau.

Au passage, Xavier Niel décrédibilise l'offre d'Altice. Il estime que le câble, technologie utilisée par Numericable, "n'est que du 'Canada Dry' de fibre jusqu'à l'abonné". Et d'ajouter : "Ce sont les fourreaux d'Orange plus une terminaison câble obsolète. Rien à voir avec les réseaux du futur." Un avis partagé par Arnaud Montebourg, qui s'inquiète, sur Europe 1, du fait que "Numericable est une petite entreprise par rapport à ce qu’est SFR. C’est une entreprise de cinq milliards qui s’endette à hauteur de dix milliards pour acheter plus gros qu'elle. Quand on a les yeux plus gros que le ventre, on risque de se mettre en danger", prévient le ministre.

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.