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Qui est Christian Troadec, figure de la fronde en Bretagne ?

Francetv info brosse le portrait d'un des personnages incontournables du mouvement des "bonnets rouges" : le maire divers gauche de Carhaix (Finistère).

Article rédigé par Benoît Zagdoun
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6min
Le maire de Carhaix, Christian Troadec, brandit un bonnet rouge, symbole de la contestation en Bretagne, le 5 novembre 2013, devant la préfecture de région à Rennes (Ille-et-Vilaine). (FRANK PERRY / AFP)

Devant les grilles de la préfecture de région, aux côtés des salariés de Marine Harvest, derrière la banderole des ouvriers de Doux… Christian Troadec est de toutes les manifestations depuis le début de la fronde en Bretagne.

A 47 ans, le maire divers gauche de Carhaix et conseiller général du Finistère est l’une des figures emblématiques du mouvement des "bonnets rouges", qui lutte pour la défense de l’emploi et la suppression de l’écotaxe. Francetv info dresse son portrait.

Un habitué des bras de fer

Mardi 5 novembre, à la veille de négociations à Rennes sur le "pacte d'avenir" pour la Bretagne proposé par le gouvernement, Christian Troadec lance un ultimatum : "Nous attendons clairement la suppression de l'écotaxe pour demain, à midi, pour la Bretagne." Et menace, le cas échéant, "de nouvelles actions". Pour Jean-Marc Ayrault, ce n'est pas "une bonne méthode". Cela reste à voir.

Car le maire de Carhaix est l’un des principaux artisans du plus grand succès à ce jour des "bonnets rouges" : la manifestation qui a réuni entre 15 000 et 30 000 personnes, samedi, à Quimper. C’est dans sa mairie que le collectif Vivre, décider et travailler en Bretagne, à l'initiative de ce rassemblement, a vu le jour, souligne Le Parisien (article payant). Une "union sacrée" des agriculteurs, ouvriers et entrepreneurs pour la défense des intérêts économiques de la Bretagne. Ces bonnets rouges sont les "symboles de la résistance contre le pouvoir central", affirme Christian Troadec, cité par Le Nouvel Observateur.

"Les seuls combats qu'on perd, ce sont ceux qu'on ne mène pas", lance l'élu, repris par le JDD. Et il peut se targuer d’une belle réussite. En 2008, sa ville parvient à garder son hôpital, après des mois de mobilisation. Christian Troadec était en première ligne. Le tribunal administratif de Rennes a annulé la fermeture des trois services menacés (anesthésie, chirurgie, maternité), décidée par l’agence régionale de l'hospitalisation. Une lutte sur laquelle revient Le Télégramme

Christian Troadec manifeste sa joie devant l'hôpital de Carhaix (Finistère), dont la fermeture a été annulée par la justice, le 25 juin 2008. (FRED TANNEAU / AFP)

Un élu de gauche, breton avant tout

Christian Troadec "divise, à droite comme à gauche", écrit Libération"Ses adversaires voient en lui un homme plus soucieux de son image que de convictions politiques. Ni de gauche, ni de droite, juste populiste, disent les plus hostiles", explique un journaliste du Télégramme interrogé par le quotidien. Il n’est en effet pas à une contradiction près.

En 2001, lorsqu'il arrive sur la scène politique en s’emparant de la mairie de Carhaix, tenue par la droite, il l’emporte sous l’étiquette "gauche alternative", au détriment du PS. Et quand il est éliminé dès le premier tour des régionales, en 2010, il apporte son soutien à Europe Ecologie. Pourtant, c’est François Hollande qu’il soutient, en 2011, au premier tour de la primaire socialiste, rappelle le JDD.

Un an plus tard, il appelle à voter pour lui à la présidentielle, mais indique à Ouest-France qu'il soutiendra Eva Joly au premier tour. Aux législatives, il est en position de se maintenir dans une triangulaire. Mais comme cela pourrait profiter à la droite, il se désiste au profit du candidat socialiste. Pour les municipales de 2014, un rapprochement avec le PS serait à l’étude, relevait en mai Le Télégramme. Début novembre, Le Parisien (article payant) le disait "proche du Nouveau parti anticapitaliste"

Christian Troadec prend en photo François Hollande, alors candidat à la primaire socialiste pour la présidentielle, le 15 juillet 2011, au festival des Vieilles Charrues, à Carhaix (Finistère). (FRED TANNEAU / AFP)

Des alliances changeantes, mais une constante : le combat politique pour l'émancipation de la Bretagne. En 1999, il cofonde le Collectif breton pour la démocratie et les droits de l'homme. Il lance ensuite le mouvement Nous te ferons Bretagne, puis le Mouvement Bretagne et progrès, qui présente des candidats aux cantonales, aux régionales et aux législatives.

"Il faut arrêter de passer par Paris pour savoir ce qu’il faut faire en Bretagne", martèle-t-il, cité par Le Parisien. "La Bretagne est debout, avec la tête haute et l'envie de construire un projet pour son pays", clamait Christian Troadec samedi à Quimper, rapporte L'Express.

Un entrepreneur qui croit aux initiatives locales

"Vivre et travailler en Bretagne" : ce slogan, remis au goût du jour par les bonnets rouges, est pour ce fils d’agriculteur un engagement de longue date. "Il en avait fait sa devise" en reprenant les bières artisanales bretonnes Coreff, en 1999, relate Le Nouvel Obs. Un rachat rendu possible par la vente au Télégramme du Poher Hebdo, hebdomadaire local qu'il avait lancé après son départ du Télégramme, rapporte Libération

Et c’est aussi parce qu’il "avait la volonté de vivre et de travailler au pays", dit-il à L’Express, qu'il lance en 1992, à Carhaix, le festival des Vieilles Charrues. A cette époque déjà, "la région vivait la crise de plein fouet, et le déclin semblait inéluctable", se souvient Christian Troadec. Les Vieilles Charrues sont désormais le premier festival rock de France. L’édition 2013 a réuni 208 000 festivaliers dans cette ville d'un peu plus de 7 000 habitants – un peu moins que l’année précédente.

Christian Troadec (D) participe au traditionnel tiré de charrues qui ouvre officiellement le festival des Vieilles Charrues, le 18 juillet 2003 à Carhaix (Finistère). ( MAXPPP)

Un défenseur de l’identité bretonne

Car ce Breton de souche se bat aussi pour la défense de la langue bretonne, de moins en moins parlée. Il collecte ainsi des fonds pour les écoles Diwan. Sa mairie délivre aussi des livrets de famille en français et en breton, le "levrig familh". "Environ 1 500" en cinq ans, indiquait en 2012 l'élu à l'AFP, alors qu'une loi remettait leur validité en cause.

Dans les cortèges, Christian Troadec délaisse son écharpe tricolore pour les couleurs du drapeau breton. "Aux médias qui le sollicitent, il répond avec une formule en breton", note L'Opinion. "Re 'zo re : trop, c’est trop."

Ceint de son écharpe bretonne, Christian Troadec participe à une manifestation à Châteaulin (Finistère) contre la fermeture des usines Doux, le 23 juin 2012. (MAXPPP)

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