Radars, assurances, commerces en centre-ville... Les huit chiffres à retenir sur le coût des "gilets jaunes"
Un peu plus de trois mois après sa création, la mission d'information parlementaire sur les conséquences économiques du mouvement rend ses conclusions, examinées mercredi par les commissions des finances et des affaires économiques.
Quel est le coût économique, social et budgétaire des dégâts commis en marge du mouvement des "gilets jaunes" ? C'est à cette question qu'une mission parlementaire répond, dans un rapport publié mercredi 17 juillet et consulté par franceinfo. Cette mission, baptisée "Impact 'gilets jaunes'", a été lancée le 9 mai à l'initiative de Roland Lescure, président de la commission des affaires économiques.
Tourisme, artisanat et commerce, assurances, banques, emploi et travail, sécurité, santé... Les seize députés qui composent la mission ont auditionné de nombreux acteurs liés aux secteurs qui ont subi les conséquences du mouvement. Certains des élus se sont également déplacés à Rouen, Toulouse et Bordeaux, trois villes concernées par les dégâts. A l'issue de ces travaux, voici leurs conclusions chiffrées et les recommandations qu'ils formulent pour aider les secteurs touchés.
120 à 30% de baisse du chiffre d'affaires pour les commerces en centre-ville
"L’approche adoptée par la mission d’information, davantage centrée sur les entreprises, les secteurs d’activité et les zones géographiques, a permis de révéler un ensemble de coûts bien plus larges et aux effets bien plus durables", peut-on lire dans le rapport. Ainsi, les députés estiment que la baisse de fréquentation des centres-villes le samedi est à l'origine "des pertes de chiffre d’affaires comprises entre 20 et 30% pour les commerces s’y trouvant". Le rapport rappelle que les centres commerciaux n'ont pas été épargnés puisqu'ils ont fait état de pertes de l'ordre de deux milliards d'euros.
La mission recommande de "poursuivre l'effort de revitalisation des centres-villes les plus touchés par le mouvement", mais ne détaille pas comment y parvenir.
2Des pertes d'environ 850 millions d'euros pour la restauration et les hôtels
La mission "Impact 'gilets jaunes'" souligne que le tourisme a particulièrement souffert de la crise. Et cite l'Union des entreprises de proximité (U2P), qui estime que les hôtels, restaurants et cafés ont enregistré des pertes avoisinant les 850 millions d'euros. Par ailleurs, le taux de fréquentation hôtelière au premier trimestre 2019 est en repli de 2,5% par rapport à l’année précédente, une "baisse qui fait suite à deux ans de hausse trimestrielle continue".
3Au moins 46 millions d'euros pour rémunérer les forces de l'ordre
Les heures supplémentaires effectuées pour permettre aux policiers et gendarmes d'assurer le maintien de l'ordre lors des manifestations des "gilets jaunes" ont coûté cher à l'Etat. "Au moins 46,08 millions d'euros ont dû être mobilisés", estiment les députés, qui intègrent dans ce chiffre "la prise en charge de certaines dégradations physiques".
4A terme, 71 millions d'euros pour la rénovation des radars
Côté transports, la facture est également salée. "La remise en état des 2 410 radars détruits et des 577 abîmés pourrait à terme coûter 71 millions d’euros", calculent les députés.
Les services publics de transport sont aussi concernés. Les parlementaires donnent l'exemple de Keolis, à Bordeaux, pour qui le manque à gagner est estimé "à plus de 756 000 euros".
5Pour Rouen, Toulouse et Bordeaux, une addition de plus de 12 millions d'euros
"Les collectivités territoriales, et en premier lieu les communes, se sont trouvées en première ligne face à la gestion du mouvement et de ses impacts", écrivent les parlementaires. Ils citent France urbaine, une organisation représentant l'ensemble des métropoles, qui évalue "les coûts afférents à 30 millions d'euros".
Les députés jugent que le coût du mouvement des "gilets jaunes" pour l’ensemble des collectivités territoriales françaises est "difficile" à estimer. "Toutefois, en additionnant les données recueillies pour les trois villes ayant fait l'objet d'un déplacement de la mission d'information, Rouen, Toulouse et Bordeaux, le coût total du mouvement (incluant notamment les dégradations et les dépenses exceptionnelles), hors mesures d’accompagnement, est de 12,459 millions d’euros", révèlent-ils. Un chiffre qui offre "un ordre de grandeur", mais à prendre, selon eux, avec précaution.
6Un coût humain "considérable" pour les petites entreprises
"Ce sont pour les petites entreprises que les répercussions ont été les plus fortes", estime le rapport parlementaire. De fait, de nombreuses TPE-PME ont rencontré, "en raison des pressions sur la trésorerie", des difficultés pour payer leurs charges fixes, qui entraînent "en cascade" d'autres risques.
Mais surtout, la mission parle du coût humain. Difficile à chiffrer, il est tout de même jugé "considérable". "On note un certain nombre de CDD non renouvelés, mais également un potentiel perdu (révision des plannings d'embauche, notamment, des contrats courts pour les fêtes de fin d'année qui n'ont pas été créés)", relèvent les députés. Ces derniers évoquent aussi le préjudice moral et psychologique après le pillage de magasins détenus par des petites entreprises familiales.
Pour "apporter un soutien aux entreprises les plus touchées", la mission d'information recommande de "prolonger les mesures exceptionnelles mises en place par le gouvernement" et d'"envisager la possibilité de recourir à des dispositifs supplémentaires", comme des exonérations exceptionnelles de cotisations sociales ou la mise en œuvre d'un crédit d'impôt spécifique.
7Un coût macroéconomique estimé à 0,1 point de PIB
Le rapport des parlementaires confirme les chiffres de l'Insee publiés en mars : le mouvement des "gilets jaunes" a coûté 0,1 point de PIB (produit intérieur brut) à l'économie française au dernier trimestre de l’année 2018. C'est "relativement faible par rapport à la richesse nationale", reconnaît la mission. "Néanmoins, l'impact des violences sur l'activité est conséquent et cette perspective macroéconomique est loin de refléter l'étendue des répercussions économiques liées aux débordements", affirme-t-elle.
841% des montants indemnisés par les assurances pour la capitale à elle seule
Les députés révèlent que Paris représente 41% des montants indemnisés par les assurances, bien que "toutes les métropoles et de nombreuses villes moyennes [aient] été concernées". Ils confirment également des chiffres sur les assurances révélés dans un rapport du Sénat fin juin : elles ont versé 217 millions d’euros d’indemnisations, notamment en direction des commerçants.
Sur ce point, la mission recommande de "mener une action auprès des assureurs", afin d'"éviter l'augmentation des primes et l'effet 'double peine'".
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