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Réquisition des personnels d'Esso-ExxonMobil : "C'est un geste politique très fort", estime le directeur de l’Institut supérieur du travail

La Première ministre Elisabeth Borne a demandé aux préfets d'engager la procédure de réquisitions des personnels indispensables au fonctionnement des dépôts Esso. Pour la CGT, "le gouvernement lance une déclaration de guerre aux salariés en grève pour les salaires".

Article rédigé par franceinfo
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Un homme se dirige vers l'une des entrées d'un dépôt de carburant Esso-ExxonMobil à Toulouse,  le 11 octobre 2022.  (VALENTINE CHAPUIS / AFP)

"Ce que nous vivons, avec la décision de la Première ministre, c'est un coup de poing sur la table. Ce n'est pas forcément la méthode la plus efficace mais c'est un geste politique très fort", a expliqué mardi 11 octobre sur franceinfo Bernard Vivier, directeur de l’Institut supérieur du travail. Elisabeth Borne a demandé aux préfets d'engager la procédure de réquisitions des personnels indispensables au fonctionnement des dépôts Esso.

franceinfo : La CGT dénonce une atteinte au droit de grève et suspend ses participations aux réunions avec le gouvernement et le patronat. Qui a raison ?

Bernard Vivier : Le droit de grève est un droit installé dans la Constitution, il a été reconnu en 1864, et il est indiqué que le droit de grève s'exerce dans le cadre des lois qui le réglementent. Donc, il peut y avoir des restrictions au droit de grève, ce n'est pas un droit au-dessus de tous les autres droits. Le droit d'aller et de venir au travail est un droit fondamental et occuper les locaux de travail est une entrave à la liberté du travail. Fermer le lieu de travail pour obliger les non-grévistes à faire pression sur les grévistes est aussi une entrave à la liberté du travail. L'autre restriction est motivée par le besoin de sauvegarder l'ordre public et assurer la continuité des services publics. Donc, on en est à la réquisition. C'est un dispositif qui est prévu notamment dans le code des collectivités territoriales et qui permet en cas d'urgence de réquisitionner les salariés. Ce n'est pas pour faire revenir tous les travailleurs, c'est pour assurer un service minimum.

La CGT a-t-elle tort quand elle évoque le précédent de 2010 et une décision de l'Organisation internationale du travail ?

C'est un peu exagéré. En 2010, il y a des réquisitions, certaines ont été confortées par la justice en disant qu'il fallait assurer la livraison de carburant, à l'époque à Roissy où il n'y avait plus que trois jours de stock de carburant. Dans d'autres circonstances, les juges, qui décident si le préfet a eu raison ou pas, ont retoqué les décisions prises. La CGT a fait un recours auprès de l'Organisation internationale du travail, qui n'a pas condamnée la France. Elle a dit, attention ce droit de la réquisition doit être utilisé après avoir mené beaucoup de concertations, c'est un droit à usage limité. Ce que nous vivons ce soir, avec la décision de la Première ministre, c'est un coup de poing sur la table, ce n'est pas forcément la méthode la plus efficace, mais c'est un geste politique très fort.

C'est donc un geste légal pour éviter un trouble à l'ordre public ?

Oui, mais avec beaucoup de nuances. Nous sommes dans une situation un peu floue où l'appréciation du caractère urgent, grave, de la tranquillité, la sécurité publique, n'est pas clairement définie. Nous sommes dans une situation où on peut considérer qu'il y a trouble possible, menace pour l'ordre public, et qu'il y a besoin d'assurer un service minimum. Mais il faut être très prudent parce qu'inévitablement la CGT va engager des actions devant les juges et il n'est pas certain que les juges accordent une réponse à l'ensemble des démarches de réquisitions. Les réquisitions sont lancées par les préfets dans les départements.

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