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Guerre en Ukraine : sans gaz russe, l'impact serait "immédiat" pour la France, selon une économiste

Anna Creti, économiste spécialisée en questions énergétiques, réagit sur franceinfo à l'annonce mardi par les États-Unis de placer sous embargo les hydrocarbures russes.

Article rédigé par franceinfo
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Du gaz domestique brûle sur une gazinière. (GLYN KIRK / AFP)

Anna Creti, économiste spécialisée en questions énergétiques et directrice de la chaire d'économie et du climat à l'Université de Paris Dauphine, estime mercredi 9 mars sur franceinfo que "l'impact serait immédiat" si la France adoptait un embargo sur les hydrocarbures russes, comme les États-Unis ont annoncé le faire mardi sur le gaz, à cause de la guerre en Ukraine.

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Au niveau de l'Union européenne, la commission a de son côté proposé mardi aux 27 États membres de diversifier leurs sources d'approvisionnements, de gonfler leurs stocks et de diminuer leur consommation d'énergie, plutôt que d'adopter un embargo complet.

franceinfo : Si la France adopte un embargo sur le gaz russe, comme le font les Etats-Unis, pourrait-on tenir sans ?

Anna Creti : Des mécanismes pourraient être mis en place rapidement pour substituer dans certains usages le gaz, mais l'impact serait immédiat. Le premier serait celui sur les prix. Ce genre de mesures qui crée un effet de panique, comme c'est le cas maintenant sur les bourses d'échange de matières premières, ne font qu'augmenter les prix. Il y a sans doute l'éventualité de devoir faire face à des prix encore plus élevés que ceux qu'on a aujourd'hui. Deuxièmement, il y aura sans doute des phénomènes de rationnement. On ne peut pas imaginer éliminer une source d'approvisionnement et ne pas ressentir l'impact. Est-ce-qu'on peut tenir sans ces sources d'approvisionnement ? Malheureusement, non.

Peut-on se passer des hydrocarbures russes sur le long terme ?

La France est un des pays qui a le plus diversifié les sources d'approvisionnement gazier. On a le Kazakhstan, la Norvège, l'Algérie et toute une série d'autres fournisseurs qui permettent de combler l'écart via le GNL, le gaz liquéfié. La production est suffisante. Avec les prix qu'on a maintenant, les pays producteurs de gaz et de pétrole ont une incitation forte à augmenter leur taux de production, probablement aussi à aller chercher du nouveau pétrole et du nouveau gaz qui est pour l'instant sous terre.

La Commission européenne propose de réduire l'importation de gaz russe de deux tiers d'ici un an : est-ce réaliste ?

Il y a une série de mesures qui sont, à mon avis, optimistes. Je me demande pourquoi ces mesures n'ont pas été déjà prises lors de la discussion du Green Deal [plan vert européen]. On est face aujourd'hui à une contradiction qui n'est pas nouvelle. On s'en rend compte sous les coups de ces conflits de phénomènes structurels qui ont caractérisé l'économie européenne depuis plus de 80 ans et qui auraient dû être remis en question déjà il y a longtemps. Je suis un peu pessimiste sur le fait qu'on arrive à tenir cette feuille de route, même en admettant qu'elle ait le consensus des pays européens en huit mois, alors qu'on a fait des objectifs beaucoup moins ambitieux pendant dix ans.

Cette crise peut-elle accélérer la transition vers les énergies propres ?

C'est ce qu'on souhaite, même si c'est triste d'en arriver là pour favoriser la transition énergétique. Les énergies propres sont évidemment électriques, aussi le biogaz, qui est un gaz non fossile produit localement. Il y a aussi un nouvel accent sur la diminution de la consommation. C'est peut être la première fois qu'on entend ces besoins soulignés avec autant de force.

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