Un moratoire sur les centrales françaises ? L'ASN fait machine arrière
"EDF doit réfléchir à ce qui est intéressant de faire d'ores-et- déjà pour améliorer la sûreté de ses réacteurs en anticipant sur ce que seront les conclusions de l'audit. Je n'appellerai pas ça un moratoire. Je dirai pratiquement : qu'est-il possible de faire de façon à ne pas bâtir telle ou telle partie de la centrale qui serait ensuite amenée à être modifiée pour améliorer la sûreté."
Ainsi donc dans cette interview à France Info ce matin, il n'est plus du tout question de "moratoire", alors même que le président de l'ASN hier devant les députés évoquait clairement cette hypothèse :
"Je pense que si la question d'un moratoire se pose, et nous
nous la posons, ce sera sur la construction de Flamanville 3".
Le président de l'Autorité de sûreté nucléaire n'était d'ailleurs pas démenti par l'un de ses lieutenants. Thomas Houdré, directeur à la
direction des centrales de l'ASN, chef jusqu'en mars de la division de Caen,
qui couvre notamment la Normandie, ajoutait : "C'est un questionnement, une réflexion. On n'est pas sûr. Ca fait partie du champ des hypothèses".
Grande prudence sémantique, mais le mot avait été lâché. Le voilà ce matin remballé.
Rétropédalage ? La possibilité de suspendre les travaux de l'EPR de Flamanville est en effet un sujet extrêmement sensible. La construction a déjà démarré, mais avec deux ans de retard sur l'échéancier initialement prévu. Elle emploie 3.400 personnes. Et EDF entend bien exporter l'ouvrage.
A moratoire, le président de l'ASN préfère donc ce matin le concept de "construction intelligente tenant compte des possibles retours d'expérience".
"Reprise en main politique" ?
Dans un communiqué, l'Observatoire du nucléaire dénonce les "pressions politiques" exercées entre hier et aujourd'hui sur l'ASN. L'Observatoire met en doute la véritable indépendance de l'ASN, instaurée par la loi de 2006, alors qu'André-Claude" Lacoste était directeur de la sûreté nucléaire depuis 1993 : serait-il devenu indépendant miraculeusement en 2006 ?", s'interroge l'association.
L'Observatoire croit d'ailleurs pouvoir donner dès à présent les résultats de l'audit des 19 centrales françaises commandité par le Premier ministre : "l'ASN annoncera qu'elles sont 'sûres' et peuvent continuer à fonctionner (moyennant peut-être quelques aménagements peu dérangeants pour EDF)".
Pourtant, selon l'Observatoire, le plus grave danger pesant sur les installations nucléaires n'est jamais pris en compte dans les tests de sécurité, "sur pression de l'ASN". Ce danger est celui de la chute d'un avion de ligne sur un bâtiment réacteur. "Il est vrai qu'aucun réacteur français n'est conçu pour résister à la chute d'un avion de ligne, ni les réacteurs actuels, ni l'EPR...", conclut l'Observatoire.
Cécile Quéguiner, Gilles Halais, avec agences
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