Egypte. Affrontements entre pro et anti-président Morsi
Des manifestants ont également mis le feu aux sièges de son parti dans trois villes du pays.
PROCHE-ORIENT – Regain de violences en Egypte. Des manifestants ont mis le feu, vendredi 23 novembre, aux sièges du Parti de la liberté et de la justice, la branche politique de la confrérie des Frères musulmans, dans les villes de Suez, Ismaïliya et Port Saïd, a rapporté la télévision publique. Un responsable du parti islamiste a en outre indiqué que les locaux de son organisation avaient été pris d'assaut dans la ville d'Alexandrie, alors que des accrochages ont éclaté entre des manifestants pro et anti-Morsi.
Francetv info revient sur les raisons de cette mobilisation.
Acte 1 : le président Morsi étend ses pouvoirs
Ces incidents surviennent au lendemain d'un renforcement considérable des pouvoirs du président islamiste Mohamed Morsi, élu en juin. Arguant la "défense" de la révolution de 2011, le porte-parole de la présidence, Yasser Ali, a indiqué que "les déclarations constitutionnelles, décisions et lois émises par le président sont définitives et ne sont pas sujettes à appel" tant que ne sera pas achevée la nouvelle Constitution. Le décret empêche également toute dissolution par la justice de l'assemblée constituante dominée par les islamistes.
Mohamed Morsi a par ailleurs demandé "de nouveaux jugements" dans les procès sur les meurtres de centaines de manifestants durant la révolte, faisant planer une menace sur de hauts responsables militaires ou policiers. Cela pourrait également entraîner un nouveau procès de l'ancien président Moubarak, indique l'AFP. Enfin, il a décidé de limoger le procureur général, Abdel Meguid Mahm, nommé du temps de Moubarak.
Mohamed Morsi cumule déjà les pouvoirs exécutif et législatif, depuis que la chambre des députés a été dissoute en juin. Le président entretient par ailleurs des relations tendues avec une grande partie de l'appareil judiciaire.
Acte 2 : ses opposants l'accusent de jouer les pharaons
Mohamed El-Baradei, prix Nobel de la paix, a accusé Mohamed Morsi de se proclamer "nouveau pharaon d'Egypte". "Aujourd'hui, Morsi a usurpé tous les pouvoirs. Un énorme coup porté à la révolution qui pourrait avoir d'épouvantables conséquences", a-t-il écrit sur Twitter. Dans la soirée, des centaines de manifestants en colère se sont rassemblés non loin de la place Tahrir, au Caire, pour dénoncer cette annonce du chef de l'Etat. "Nous n'avons pas mené une révolte pour remplacer un dictateur par un autre", a fustigé l'un d'eux. L'opposition, qui parle de "coup d'Etat contre la légalité", a appelé à des manifestations à travers le pays.
A quelques kilomètres de là, des centaines de manifestants réunis devant le palais de justice ont en revanche apporté leur soutien à Mohamed Morsi. "[Sa] décision va permettre de rendre justice aux martyrs et de contraindre les corrompus à rendre des comptes", s'est félicité un participant.
Acte 3 : des manifestations rivales
Dans les rues de la capitale, opposants et partisans du président ont commencé, vendredi matin, à se ressembler pour des manifestations rivales. Les partisans se sont regroupés devant le palais présidentiel dans le nord du Caire. Parmi eux, la puissante confrérie des Frères musulmans, dont est issu le président.
Les opposants, en majorité des libéraux et des laïques, ont pour la part convergé vers la place Tahrir, dans le centre de la capitale égyptienne, symbole de la révolte pro-démocratie de janvier-février 2011.Ils devaient être rejoints par Amr Moussa, un ancien chef de la Ligue arabe, et par Mohamed El-Baradei. Pour eux, les pouvoirs élargis du président remettent en cause les acquis de 2011.
Selon la télévision publique, des manifestants ont mis le feu aux sièges du Parti de la liberté et de la Justice (PLJ), la branche politique de la confrérie des Frères musulmans, dans les villes d'Ismaïliya et Port-Saïd. Les locaux du parti ont été aussi pris d'assaut dans la ville d'Alexandrie, où des accrochages ont éclaté entre manifestants des deux camps, a déclaré un responsable du parti islamiste à l'AFP.
Acte 4 : Mohamed Morsi justifie ses décisions
Devant le palais présidentiel du Caire, le président s'est exprimé devant des milliers de partisans pour défendre le décret pris la veille. Il a indiqué travailler à la stabilité politique, économique et sociale du pays, sans craindre l'opposition. "L'opposition en Egypte ne m'inquiète pas, mais elle doit être réelle et forte", a-t-il lancé, promettant la démocratie.
Auparavant, devant les fidèles d'une mosquée des faubourgs du Caire, Mohamed Morsi a déclaré avoir pris son décret pour "plaire à Dieu et à la nation". "La victoire ne survient pas sans un projet clair, et c'est ce que j'ai", a-t-il assuré.
Lancez la conversation
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour commenter.