Les eurodéputés français vice-champions du cumul d'activités
Nos élus au Parlement européen figurent parmi ceux qui déclarent le plus d'activités rémunérées en plus de leur mandat, selon l'"observatoire de l'intégrité" mis en ligne par Transparency International.
Les Français ont élu, en mai, leurs 74 députés au Parlement européen. Mais se consacrent-ils vraiment à 100% à leurs travaux législatifs ? Ont-ils d'autres activités ou d'autres revenus, susceptibles de créer un conflit d'intérêts ?
Pour le savoir, l'association Transparency International a publié, lundi 13 octobre, une base de données intitulée EU Integrity Watch (en anglais). Cet "observatoire de l'intégrité" du Parlement européen liste les activités des eurodéputés et leurs émoluments non liés à leur mandat, à partir de leurs déclarations d'intérêts (PDF). Il établit également des classements en fonction de divers indicateurs. Qu'en ressort-il ?
Deuxièmes au classement des activités parallèles
Les eurodéputés français arrivent en deuxième position du palmarès au regard de l'"indicateur d'activité extérieure" mis au point par l'association (méthodologie expliquée ici en anglais). "Plus l'indicateur est élevé, plus les élus ont déclaré d'activités et de revenus", explique Transparency International. La France obtient l'indice 7, le plus élevé après l'Autriche (8), tandis que la moyenne européenne est de 3.
"La France est le mauvais élève de l'Europe. Elle a une vraie différence de culture avec les autres grands pays comme l'Allemagne, la Grande-Bretagne et l'Italie", affirme à francetv info Daniel Freund, qui s'est occupé de ces indicateurs chez Transparency International. Une assertion fondée sur les déclarations des parlementaires, à supposer que tous aient bien signalé l'ensemble de leurs activités extérieures.
"Cet indicateur ne préjuge pas a priori de conflits d'intérêts, puisque les eurodéputés ont le droit d'exercer toute activité ou profession à l'extérieur, précise encore Daniel Freund, mais ils ont l'obligation d'être transparents et, s'il y a un conflit d'intérêts, ils sont tenus de le déclarer et de ne pas voter sur certains dossiers." La multiplication d'activités extérieures risque tout de même de multiplier les risques.
Quatre Français sur les douze élus qui gagnent le plus
Autre classement dans lequel les Français se distinguent : celui des revenus. Ainsi, sur douze députés qui déclarent plus de 10 000 euros de revenus brut mensuels (hors leur traitement parlementaire de 6 200 euros net, comme l'indique Le Journal du Net, et sans compter l'indemnité de frais généraux de 4 299 euros par mois), quatre sont français.
Michèle Alliot-Marie (PPE, droite européenne) arrive en tête. Elle a déclaré au Parlement européen 10 000 euros mensuels de conférences et 5 000 euros de droits d'auteur. "Les revenus concernent les 12 derniers mois, et il est évident que Michèle Alliot-Marie a cessé en 2014 ses conférences internationales, qui représentaient l’essentiel de ses revenus", assure son assistant parlementaire au site Euractiv. Avant les élections européennes, la tête de liste UMP pour le Grand Sud-Ouest avait affirmé qu'elle allait "perdre de l'argent au Parlement européen", comme le rapporte Sud-Ouest.
Vient ensuite Renaud Muselier (PPE). Il déclare plus de 10 000 euros, notamment comme directeur d'une clinique et d'une société d'immobilier.
Suit la centriste Sylvie Goulard (Alliance des démocrates européens et libéraux). Elle gagne "10 000 euros ou plus" grâce à son travail au Conseil pour le futur de l'Europe, une organisation à but non lucratif.
Enfin, Rachida Dati gagne également "10 000 euros ou plus" comme avocate.
Daniel Freund avoue avoir été surpris de constater qu'"il y a une douzaine de députés européens qui ont plus de 10 000 euros de revenus externes par mois".
Les conflits d'intérêts mal surveillés
Pour Daniel Freund, "quand on voit des eurodéputés déclarer des activités comme consultant ou avocat sans spécifier quels sont leurs clients, on ne peut pas savoir s'il y a conflit d'intérêts. Certaines déclarations sont très détaillées, d'autres se cachent derrière des abréviations incompréhensibles."
Il ajoute : "Il n'y a aucune instance au sein du Parlement européen pour vérifier les déclarations des eurodéputés. Il n'y a pas non plus de sanction s'il y a des irrégularités dans les déclarations, si quelqu'un a une activité qu'il ne déclare pas. Transparency International veut tout mettre dans le domaine public." Charge aux autres de s'en emparer.
Le Parlement européen, pointe-t-il enfin, a passé au crible la candidature du très controversé commissaire européen au Climat et à l'Energie, l'Espagnol Miguel Cañete, soupçonné de liens avec l'industrie pétrolière, comme le relate le site Toute l'Europe. Il reste maintenant aux eurodéputés de s'appliquer la même exigence, selon Daniel Freund, en "regardant ce qui se passe au sein du Parlement et en prenant les mêmes standards".
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