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"Beaucoup de paroles et peu d'actes" : entre désillusion et peur du coronavirus, l'abstention a atteint des sommets à Châlons-en-Champagne

L'abstention a grimpé à près de 74% au second tour des élections municipales. Les raisons sont diverses, entre contexte sanitaire et défiance vis-à-vis du monde politique.

Article rédigé par franceinfo - Cyrille Ardaud
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3 min
L'hôtel de ville de Châlons-en-Champagne (Marne). (CYRILLE ARDAUD / RADIO FRANCE)

Un taux record d'abstention : à Châlons-en-Champagne (Marne), les électeurs n'ont pas été nombreux à se déplacer pour le second tour des élections municipales, le 28 juin. Seuls 26,07% ont glissé leur bulletin dans l'urne, bien en deçà de la moyenne nationale (41,6% de taux de participation, selon les chiffres définitifs du ministère de l'Intérieur). Dans cette préfecture champenoise, la quadrangulaire s’est conclue par la réélection du maire sortant Benoist Apparu (ancien ministre sous le mandant de Nicolas Sarkozy).

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Parmi les causes de cette abstention impressionnante, il y a bien sûr le contexte sanitaire. Le coronavirus a en effet dissuadé certains électeurs, comme Thomas : "Je suis diabétique, et j'ai peur du Covid. D'habitude je vote." D’autant que quelques semaines avant le scrutin, plusieurs personnes au sein de la mairie, dont le maire, ont été testées positives au coronavirus. La mairie a même été fermée plusieurs jours. Pas de quoi rassurer les électeurs.

Il y aussi ceux qui ne se sentent pas vraiment concernés, comme Siam, 21 ans : "En ce moment, je n'ai pas trop envie de penser à tout ce qui est politique, tout ça. Mais plus tard j'y penserai peut-être. Sur certaines choses je ne me sens pas vraiment concerné, même si je sais que je devrais, ça ne m'intéresse pas."

J'avais d'autres choses à faire et ça ne m'intéressait pas. En fait si j'étais allé voter, j'aurais choisi un vote blanc.

Siam, habitant de Châlons-en-Champagne

à franceinfo

Il y a enfin les dégoûtés, ceux qui n’y croient plus du tout. Ils sont nombreux, notamment dans les quartiers populaires, où les électeurs se sont encore moins déplacés qu'ailleurs. Imen l'assure, depuis 15 ans, elle n’est plus inscrite sur les listes électorales. "On ne sait pas pour qui voter. Moi je suis au RSA, ma mère est au RSA, on ne voit aucun changement. Puis à notre âge on ne trouvera plus de boulot. C'est pour ça que je ne vais pas voter. Et surtout, voter qui ?"

Ils n'arrêtent pas de mentir, ils nous mènent tous en bateau, donc non, ça ne m'intéresse pas.

Imen, habitante de Châlons-en-Champagne

à franceinfo

Opinion semblable pour Marie-Thérèse, 82 ans, qui jure qu’elle ne revotera plus jamais : "Beaucoup de paroles et peu d'actes ! Par exemple, je n'ai pas de bus qui passe suffisamment près de chez moi pour que je circule. Je ne peux plus conduire, alors comment je fais ?"

Une légitimité remise en cause

Autant de raisons qui expliquent donc un taux d’abstention très élevé. Le maire Benoist Apparu, divers droite, a lui encore une autre explication : "Aux élections européennes est arrivé en tête le Rassemblement national, en deuxième La République en marche, en trois les Verts. Le Rassemblement national fait 25% à Châlons. Quand nous n'avez pas de représentant du Rassemblement national, vous avez déjà 15 ou 20 points de gens qui disent 'je n'ai pas ceux pour qui je vote traditionnellement, donc je reste à la maison'."

Aujourd'hui avec ce taux de participation très faible, l'opposition se pose la question de la légitimité. "Comment le maire de Châlons va s'emparer de dossiers avec de lourds investissements en se disant 'j'ai été investi par les Chalonnais', alors qu'il n'a été investi que par 3 000 Chalonnais sur 45 000 habitants et 23 000 électeurs possibles ?", interroge Rudy Namur, qui conduisait une liste divers gauche. [NDLA : il y a eu à Châlons 6 102 votants.] Rudy Namur espère désormais plus de démocratie participative dans la ville et défend le vote obligatoire.

Une abstention aux multiples causes, le reportage à Châlons-en-Champagne de Cyrille Ardaud.

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