A quoi ressemblerait la France de Jean-Luc Mélenchon ?
Le candidat de la France insoumise prône un renouveau démocratique, de nouveaux droits sociaux et une relance de l’économie par des investissements à but social et écologique.
Il est le candidat de la France insoumise et compte bien incarner l'alternative à gauche pendant la campagne. A 65 ans, le député européen Jean-Luc Mélenchon brigue une nouvelle fois l'Elysée, après avoir obtenu 11,1% des voix lors de l'élection présidentielle de 2012. Son livre-programme, L'Avenir en commun, veut répondre à ce qu'il appelle une "urgence démocratique, sociale, écologique" et internationale. Mais concrètement, à quoi ressemblerait la France s'il était élu en mai prochain ?
Sur l'économie, une relance par "la planification écologique"
Le programme économique de Jean-Luc Mélenchon prône une politique de relance budgétaire et d'investissement. Le candidat promet d'emblée d'injecter "100 milliards d'euros supplémentaires dans l'économie, pour des investissements écologiquement et socialement utiles". Les 41 milliards d'euros par an du pacte de responsabilité et de solidarité – qui sera supprimé – devront désormais financer "la transition énergétique" et des activités à but social. Sur cinq ans, l'Etat consacrera 173 milliards d'euros supplémentaires à la lutte contre la pauvreté, à l'éducation ou à la réforme des retraites.
Comme son ancien rival Arnaud Montebourg, le candidat affiche une ligne protectionniste et prône la réindustrialisation de la France "par l'investissement". Il promet de défendre des "industries stratégiques" comme l'acier ou le photovoltaïque, à travers des mesures antidumping ou l'augmentation des droits de douane pour les pays "aux droits sociaux limités". Certains programmes de privatisation seront remis en cause, notamment pour les aéroports et les autoroutes. Jean-Luc Mélenchon appelle également à la mise en place d'"une autre politique internationale des échanges commerciaux", protégeant davantage "les droits sociaux et l'emploi" en France.
En matière de finance, le candidat compte bien interdire "les licenciements boursiers", créer une "taxe réelle" sur les transactions financières et contrôler davantage les mouvements de capitaux. Les banques d'affaires seront séparées des banques de détail. Sur la fiscalité, Jean-Luc Mélenchon promet de réduire l'impôt sur les sociétés pour les "bénéfices réinvestis en France". Il propose de créer un impôt sur le revenu comptant 14 tranches — contre cinq aujourd'hui. La tranche supérieure à "vingt fois le revenu médian" sera imposée à 100%.
Sur le social, un "droit opposable à l'emploi" et une politique "vers les 32 heures"
Très critique à l'égard du quinquennat de François Hollande, le candidat de la France insoumise promet l'abrogation de la loi El Khomri s'il est élu. Jean-Luc Mélenchon compte "rétablir la hiérarchie des normes sociales", soit la primauté de la loi et de l'accord de branche sur l'accord d'entreprise. Autre promesse : le contrat de travail à durée indéterminée (CDI) sera réaffirmé comme étant la "norme". Les grandes entreprises ne pourront compter que 5% de "contrats précaires", les PME, 10%. Le député européen défend également un "droit opposable à l'emploi" pour les chômeurs de longue durée. Concrètement, l'Etat devra être "l'employeur en dernier ressort" : il devra proposer à ces demandeurs d'emploi un travail rémunéré d'intérêt général, adapté à leurs qualifications.
L'Avenir en commun défend ensuite une réduction du temps de travail – mais refuse l'idée d'un revenu universel, considéré comme "une trappe à pauvreté". Jean-Luc Mélenchon compte "généraliser une sixième semaine de congés payés", "appliquer réellement et immédiatement les 35 heures" et "aller vers les 32 heures". Lui président, les salariés travaillant de nuit ou ayant des métiers pénibles bénéficieront déjà de ce temps de travail réduit.
L'une des mesures-phares de la France insoumise est aussi de porter le Smic mensuel à 1 326 euros nets, soit une augmentation de 16%. Les salaires des fonctionnaires seront revalorisés, tout comme les minima sociaux et les pensions de retraite. L'âge légal de départ sera d'ailleurs baissé à 60 ans pour une retraite à taux plein. En parallèle, Jean-Luc Mélenchon promet une "Sécurité sociale intégrale", avec un remboursement intégral des "frais médicaux et des droits fondamentaux inconditionnels". En clair, il s'agirait d'un "droit aux premiers mètres cubes d'eau, de gaz et aux premiers kilowattheures gratuits", a-t-il précisé dans un entretien au Monde (édition abonnés).
Sur l'écologie, la sortie du nucléaire et du diesel et une "règle verte" constitutionnalisée
"L'urgence écologique doit être au point de départ de ma campagne", annonçait Jean-Luc Mélenchon dans un entretien à Reporterre en juin dernier. L'écologie fait aujourd'hui partie intégrante du projet du député européen. Le candidat compte "constitutionnaliser la règle verte", soit "ne pas prélever sur la nature davantage que ce qu'elle peut reconstituer, ni produire plus que ce qu'elle peut supporter". Il veut ensuite lancer un vaste plan "de transition énergétique vers les énergies renouvelables". L'objectif est clair : atteindre 100% d'énergies renouvelables en France en 2050. Jean-Luc Mélenchon entend ainsi "sortir du nucléaire", "engager la sortie du diesel" ou encore lancer un "plan de rénovation écologique de tout le bâti".
Les "biens communs" tels que l'air, l'eau, le vivant ou l'alimentation seront protégés. Le candidat de la France insoumise propose en parallèle une "contribution carbone sur le transport de marchandises" et une "taxe kilométrique aux frontières de la France". Les circuits courts et les productions locales seront privilégiés dans les commandes publiques, et une alimentation "100% biologique locale" sera imposée dans la restauration collective.
Sur les sujets de société, de nouveaux droits et la lutte contre les discriminations
Comme pour la règle verte, Jean-Luc Mélenchon entend "constitutionnaliser (...) le droit fondamental de disposer de soi en toutes circonstances". Il défend l'accès à la contraception et à l'IVG, mais aussi le "droit de mourir dans la dignité (y compris avec assistance)". Comme ses deux principaux rivaux à gauche, le député européen veut garantir un droit à la procréation médicalement assistée (PMA) "pour toutes les femmes". Il veut ouvrir l'adoption plénière conjointe "à tous les couples", mais se prononce contre la gestation pour autrui (GPA).
En matière d'immigration, Jean-Luc Mélenchon promet de régulariser les travailleurs sans-papiers et d'accélérer l'accès à la nationalité française pour les étrangers réguliers. Le candidat compte également lutter contre les discriminations, en introduisant notamment le récépissé de contrôle d'identité contre le contrôle au faciès. Il promet aussi une "loi de lutte contre le sexisme", et des moyens renforcés contre les violences faites aux femmes. Sur l'éducation, enfin, le candidat de la France insoumise compte abroger la réforme du collège et rendre la scolarité obligatoire jusqu'à 18 ans. Il annonce le recrutement de 60 000 enseignants supplémentaires s'il est élu – soit le même engagement que François Hollande en 2012.
Sur les institutions, une VIe République et le pouvoir du référendum
"C'est l'ère du peuple qui doit commencer !", clame Jean-Luc Mélenchon dans L'Avenir en commun. Première étape de ce renouveau démocratique : la VIe République et la mise en place d'un régime parlementaire. Pour cela, une Assemblée constituante "sous le contrôle des citoyens" devra "changer de fond en comble la Constitution". Ce processus constituant – et la nouvelle Constitution qui en découlerait – seront soumis à référendum. Avec ce type de consultation populaire, les citoyens auront également le droit de proposer une loi ou de révoquer un(e) élu(e). Mais Jean-Luc Mélenchon reste flou sur le nombre de citoyens pouvant lancer une telle initiative.
Dans son programme, le candidat développe également d'autres mesures emblématiques pour répondre à "l'urgence démocratique" : non-cumul des mandats dans le temps, généralisation de la représentation proportionnelle et vote obligatoire. Les Français devront voter dès l'âge de 16 ans, et le vote blanc sera reconnu. En matière d'institutions, l'ancien sénateur se veut radical. En cas de victoire, il promet la suppression du Sénat, du Conseil économique, social et environnemental (CESE), et de la Cour de justice de la République (CJR).
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.