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Présidentielle 2017 : pourquoi les chances de succès de Macron sont microscopiques

Article rédigé par Vincent Daniel
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
Emmanuel Macron sur le perron du palais de l'Elysée, à Paris, le 22 août 2016. (JULIEN MATTIA / NURPHOTO / AFP)

L'ancien ministre de l'Economie bénéficie d'une cote de popularité importante. Mais sans l'appui d'un grand parti, la course de cet électron libre jusqu'à la présidentielle s'annonce semée d'embûches.

Pour Emmanuel Macron, le plus dur commence. Après avoir démissionné du gouvernement, mardi 30 août, l'ancien ministre de l'Economie veut désormais "porter avec d'autres [un projet] pour notre pays". "Ce projet, nous voulons le porter pour 2017", martèle l'ancien protégé de François Hollande.

S'il n'a pas encore annoncé sa candidature à la présidentielle, Emmanuel Macron affiche désormais clairement son ambition. Pour être présent au premier tour de l'élection en avril 2017, il va devoir désormais se confronter à un redoutable parcours d'obstacles. Voici les raisons pour lesquelles les chances de l'ancien ministre de mener à bien son entreprise présidentielle sont minces. 

Parce qu'un candidat à la présidentielle doit être à la tête d'une machine de guerre

Il affiche une popularité insolente, mais Emmanuel Macron apparaît actuellement très isolé sur la scène politique. Selon Le Monde (article abonnés), seuls trois députés socialistes le soutiennent ouvertement, ainsi que Gérard Collomb, sénateur-maire PS de Lyon. De son côté, le député socialiste Pascal Terrasse assure qu'une "quinzaine de députés [soutient] l'action d'Emmanuel Macron et je dirais une vingtaine de sénateurs"Pas encore de quoi constituer un solide réseau politique pour le soutenir et ainsi rassembler les 500 parrainages d'élus nécessaires pour se présenter à l'élection présidentielle.

Macron va apprendre que, dans ce vieux pays qui s’appelle la France, on ne peut pas être élu président de la République sans appareil politique fort, ni ressorts importants dans les territoires.

Un dirigeant du Parti socialiste

dans "Le Monde"

Le mouvement de l'ancien locataire de Bercy, En marche !, fondé en avril, revendique 60 000 adhérents. Mais l'adhésion, gratuite, se fait en quelques clics sur le web. Impossible donc de comparer En marche ! avec une formation politique capable de mobiliser ses militants sur le terrain, et organisée de façon à ce que ses troupes couvrent l'ensemble du territoire français. Enfin, pour concourir à la présidentielle, il faut disposer de moyens financiers conséquents. Pour cela, l'ancien banquier d’affaires devra faire jouer son carnet d'adresses, épaissi par son passage au ministère de l'Economie.

Parce qu'avant lui, d'autres électrons libres ont échoué

Avant Emmanuel Macron, bien d'autres candidats, populaires dans les sondages mais lancés dans la course à la présidentielle sans structure politique solide, ont échoué. En 1965, Jean Lecanuet fait figure d'homme neuf face au général de Gaulle et à François Mitterrand. Maîtrisant les codes de la télévision, "il mène une campagne 'à l'américaine' en s'appuyant sur les techniques de marketing politique élaborées outre-Atlantique", rappelle RFI. Lecanuet ne passe pas le premier tour, totalisant 15,6% des voix, derrière Mitterrand (31,7%) et De Gaulle (44,6%). 

On peut aussi citer le cas de Michel Rocard, qui échoue au premier tour de l'élection présidentielle de 1969 avec 3,1% des suffrages. Il tentera en 1981 et en 1994, après avoir été un Premier ministre pourtant populaire incarnant la "deuxième gauche", de représenter la gauche, sans succès. Autre exemple, celui de l'ancien animateur de télévision Nicolas Hulot, pourtant doté d'une solide cote de popularité, et qui est malgré tout battu en 2011 lors de la primaire des écologistes face à Eva Joly.

Parce que la popularité ne se traduit pas forcément dans les urnes

La popularité d'Emmanuel Macron est "seulement un bon socle de départ", explique à franceinfo Jean-Daniel Lévy, directeur du département politique et opinion d'Harris Interactive. Mais rien ne garantit que cette popularité solide se concrétise dans les urnes. "La popularité est multiple, mais le vote est exclusif", rappelle Jean-Daniel Lévy. 

On peut aujourd'hui être à droite et aimer à la fois Alain Juppé et Emmanuel Macron, par exemple. Mais lorsqu'on vote, on ne prend qu'un seul bulletin.

Jean-Daniel Lévy, sondeur à Harris Interactive

à franceinfo.fr

Par ailleurs, la ligne "ni droite, ni gauche" de l'ancien ministre de l'Economie pourrait se retourner contre lui. "Auprès des électeurs de gauche, il n'est que le neuvième ministre préféré. Et à droite, les électeurs souhaitent surtout se débarrasser de François Hollande, auquel Emmanuel Macron reste tout de même lié."

Difficile aussi d'anticiper la manière dont les Français vont percevoir les raisons de sa démission. "Soit ils verront cela comme une sorte d'aventure personnelle, avec un risque d'effritement de sa popularité, soit il y a la perception d'une dynamique politique qui lui est propre", poursuit le spécialiste d'Harris Interactive. "Les démissions de Cécile Duflot, Benoît Hamon et d'Arnaud Montebourg n'ont pas créé de dynamique d'opinions. Au contraire de celle de Christiane Taubira." Enfin, Jean-Daniel Lévy estime que les semaines et les mois qui viennent seront décisifs pour Emmanuel Macron : "Il va devoir montrer qu'il a un projet, que le mouvement En Marche ! fonctionne, et continuer à occuper l'espace médiatique alors qu'il ne sera plus ministre."

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