Et si Marine Le Pen n'obtenait pas les 500 signatures ?

Presque de la politique fiction. Certes, le Front national fait le coup à chaque élection, mais il ne se passe pas un jour maintenant sans que Marine Le Pen n'alerte sur les signatures qui lui manquent pour pouvoir se présenter à l'élection présidentielle. Mardi 31 janvier encore, debout sur une petite estrade ornée de trois drapeaux tricolores devant le Sénat, à Paris, elle s'écrie : "Nous en sommes à 340 promesses, c'est 70 à 80 de moins qu'en 2007 où nous n'en avions déposé que 507 au Conseil constitutionnel !" 

"Entre deux nuls, je préfère m'abstenir"

Une cinquantaine de militants bien emmitouflés, mais congelés, l'applaudissent. Si elle dit qu'elle ne les a pas, c'est qu'elle ne les a pas. Ils lui font confiance. Mais n'osent pas s'imaginer la situation. "Ce serait la catastrophe", s'étouffe une sympathisante qui veut rester anonyme. "Je ne voterai pas du tout", assure Denise, militante au FN depuis deux ans, les yeux écarquillés d'incrédulité quand on lui pose la question. "Je ferais la grève volontaire du vote même si j'y suis très attachée", finit-elle par lâcher, parce que "entre deux nuls, je préfère m'abstenir". 

Même son de cloche chez Agnès, manteau de fourrure et cheveux argentés : "Je serais tellement écœurée que je ne voterais pas", s'indigne-t-elle. De toute façon, elle ne voit personne d'autre : "Bayrou non, il a trop zigzagué ; Nicolas Dupont-Aignan, c'est comme Philippe de Villiers autrefois, il a les bonnes idées, mais ne passera jamais  [au second tour]." Et de rêver qu'il apporte ses signatures à "Marine".

Dubitatifs sur Nicolas Dupont-Aignan

Même s'ils reconnaissent que ses idées sont proches de celles défendues par le Front national, peu de militants voteront pour le candidat de Debout La République si Marine Le Pen échouait à réunir le nombre de parrainages requis. "Trop proche de l'UMP" pour les uns, "pas assez sincère" pour les autres. Ou encore "pas assez de personnalité, de charisme". 

Bref "c'est Marine ou rien", tranche Annie, militante des Hauts-de-Seine. "Si elle ne peut pas se présenter, je ne voterai pour personne, j'irai à la pêche", marmonne Nicolas. Bernard, ancien expert numismate et magistrat, hésite. Ne pas voter, ou bien "voter blanc pour écrire 'République bananière'" sur son bulletin.

Un peu comme Michèle, carré Hermès et bout du nez tout rouge, qui réfléchit à voix haute : "Dans ce cas, il faudrait boycotter l'élection, mais pas s'abstenir parce que s'abstenir, ça veut dire ou qu'on s'en fiche, ou qu'on ne sait pas pour qui voter, ce qui n'est pas vrai pour nous." Alors c'est inimaginable pour ces militants du FN, "ce serait la honte pour la France". Mais si "Marine" n'a pas ses signatures, ils trouveront un moyen de "mettre une bonne claque à ceux qui organisent ça !"