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Enregistrements de Merah : que risquent les médias ?

Le CSA doit auditionner mardi des dirigeants de TF1, puis ceux de BFMTV et i-Télé. Le parquet de Paris a ouvert une enquête préliminaire.

Article rédigé par franceinfo
France Télévisions
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Mohamed Merah, l'auteur de la tuerie de Toulouse en mars 2012, sur un document amateur. (FRANCE 2 / AFP)

Le temps des sanctions ? Le président du Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA), Michel Boyon, s'est dit "profondément choqué" après les fuites et la diffusion, dans le magazine "Sept à huit" sur TF1, des échanges entre les policiers du Raid et Mohamed Merah lors du siège de son appartement. L'instance doit auditionner, mardi 10 juillet, des dirigeants de chaînes de télévision. Des responsables de TF1, puis ceux de BFMTV et I-Télé, qui ont rediffusé des extraits de l'enregistrement, doivent être entendus. FTVi fait le bilan de ce que risquent ces médias.

• Mise en garde ou mise en demeure par le CSA

Le CSA a demandé aux médias français de ne pas diffuser les extraits incriminés, invoquant un "grave manquement au respect dû à la mémoire des victimes et à leurs familles". Chargé de la régulation du secteur audiovisuel, le Conseil peut donc relever les manquements des chaînes.

"S'il y a matière pour le CSA à intervenir, notamment par la voie de sanctions, nous le ferons, sans hésiter", a prévenu Michel Boyon. Toutefois, les éventuelles pénalités qu'il prononce relèvent en général de la simple mise en garde ou mise en demeure, les deux premiers niveaux de sanctions dont il dispose.

Mais selon un journaliste du site spécialisé Puremédias, Michel Boyon a évoqué mardi "des sanctions financières ou bien la lecture d'un communiqué à l'antenne".

Un an de prison et 15 000 euros d'amende

Le parquet de Paris a ouvert dimanche une enquête préliminaire pour violation du secret de l'instruction. Elle a été confiée à l'Inspection générale de la police nationale, la "police des polices". L'article 11 du code de procédure pénale précise que "la procédure au cours de l'enquête et de l'instruction est secrète" et que "toute personne qui concourt à cette procédure est tenue au secret professionnel". Cela concerne les policiers, magistrats, greffiers et avocats.

En acceptant de recevoir un objet issu d’une violation du secret professionnel, TF1 pourrait alors être condamnée pour "recel de violation du secret de l’instruction", ce qui est passible d'un an de prison et 15 000 euros d'amende. Cette peine peut être portée à cinq ans de prison et 75 000 euros d'amende si les informations sont divulguées à "des personnes que l'on sait susceptibles d'être impliquées" dans l'affaire ou "dans le dessein d'entraver". "Toutefois, si l’auteur du recel n’est pas identifié, il n’y a pas de violation du secret de l’instruction, donc pas de receleur", explique le site Quoi.info.

Mais d'autres recours sont possibles. "Des poursuites et des condamnations judiciaires pourraient éventuellement être envisagées pour des faits de provocation ou d'apologie de crime, par exemple", précise à L'Express Emmanuel Derieux, professeur à l'Université Paris 2, spécialiste du droit des médias.

• Les médias écrits pas à l'abri

"Si des sanctions étaient effectivement prononcées par les juges à l'encontre de TF1 et des autres chaînes, elles pourraient s'appliquer également à tous les médias ayant relayé ces enregistrements, y compris aux journaux papiers ayant retranscrit des extraits de ces enregistrements", explique Emmanuel Derieux.

Retombées peu probables

Ces procédures contre des journalistes aboutissent rarement car "la jurisprudence, en particulier sous l'impulsion de la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH), considère que le droit à l'information prime", selon l'avocat spécialiste du droit de la presse, Richard Malka, interrogé par l'AFP. Par exemple, la juridiction européenne avait condamné la France en 1999 dans l'affaire dite du "Canard Enchaîné" [arrêt Fressoz et Roire du 21 janvier 1999]. La condamnation du journal satirique, pour violation du secret fiscal, a été sanctionnée par la CEDH car, selon elle, "l'information diffusée soulevait une question d'intérêt général".

Toutefois, "le journaliste doit vérifier que ses sources lui fournissent des documents obtenus légalement", explique à Libération l'avocat Christophe Bigot, également spécialiste du droit de la presse.

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