Ce que l'on sait de l'agression de deux surveillants à la prison d'Osny
Un détenu incarcéré dans l'unité de prévention de la radicalisation de cette maison d'arrêt du Val-d'Oise a attaqué à l'arme blanche deux agents, dimanche.
L'affaire relance le débat autour des unités de prévention de la radicalisation, installées dans les prisons. Dimanche 4 septembre, un détenu de ce quartier a agressé deux surveillants dans la prison d'Osny (Val-d'Oise). Franceinfo revient, en détail, sur cette attaque.
Que s'est-il passé ?
Les faits sont survenus au moment du départ en promenade. Dans un communiqué, le ministère de la Justice raconte que l'agresseur présumé a blessé "le surveillant venu le chercher" avec un couteau artisanal. Citant des sources pénitentiaires, Le Figaro évoque une "lame très fine et très aiguisée".
D'après les premiers récits, le détenu a attaqué le surveillant en sortant de sa cellule, après que ce dernier lui a demandé de ranger la serviette enroulée autour de son bras. Selon le délégué régional FO Jérôme Nobécourt, l'agent a eu le "cou traversé de part en part par une espèce de poinçon de 15 cm". Alors qu'il prenait la fuite, le détenu l'a poursuivi et frappé "par-derrière, dans le cou". Un collègue venu à son secours a lui aussi été blessé au bras.
Une équipe régionale d'intervention et de sécurité (ERIS) a alors été appelée en renfort. Dans cet intervalle, le détenu a dessiné "un cœur sur une fenêtre avec le sang des collègues et fait sa prière", affirme Jérôme Nobécourt. Puis, il a foncé en direction des renforts, "arme à la main et souriant", avant d'être stoppé à l'aide d'une balle de caoutchouc. Les faits se sont déroulés alors que d'autres détenus étaient présents et sans qu'ils ne prennent "part à l'action violente", a également précisé la Chancellerie. Conduits à l'hôpital, les deux surveillants sont hors de danger.
Que sait-on de l'agresseur présumé ?
Selon Le Monde et Libération, il s'agit de Bilal Taghi, 24 ans, détenu dans l'unité de prévention de la radicalisation de la maison d'arrêt d'Osny. En mars, il a été condamné à cinq ans de prison pour association de malfaiteurs en vue de la préparation d'actes de terrorisme. pour avoir tenté de partir en Syrie. Selon le quotidien, il avait été arrêté en Turquie. Il était parti en direction de la Syrie, dix jours après l’attentat du 7 janvier 2015 contre Charlie Hebdo.
Pour Jérôme Nobécourt, le détenu "arrivé depuis environ trois mois dans l'unité" ne posait "pas de problème particulier". Devant les policiers, il a reconnu avoir prémédité son acte.
Y a-t-il eu des complicités ?
C'est ce que cherchent à savoir les enquêteurs. Mardi, trois autres détenus de la maison d'arrêt d'Osny ont été placés en garde à vue, affirme une source judiciaire, confirmant une information de BFMTV. Ces détenus "se trouvaient dans la cour de promenade au moment des faits", précise la chaîne. Les trois hommes sont entendus par les enquêteurs de la sous-direction antiterroriste (Sdat) de la police judiciaire. Les policiers veulent notamment savoir s'ils avaient une éventuelle connaissance d'un projet d'agression.
Selon Le Figaro, cette agression n'était "pas un acte isolé, mais concerté entre plusieurs détenus". L'agresseur présumé aurait ainsi bénéficié "de fortes complicités parmi les autres détenus avec lesquels cette agression aurait été programmée. Les enquêteurs auraient trouvé sur un autre détenu des liens qui font penser que l'idée était de procéder à une 'exécution'".
Où en est l'enquête ?
Lundi, le parquet antiterroriste de Paris a confirmé à franceinfo s'être saisi de l'enquête sur cette agression. L'enquête de flagrance est ouverte pour "tentative d'assassinat sur personne dépositaire de l'autorité publique en relation avec une entreprise terroriste".
Selon Le Figaro, les enquêteurs s'interrogent notamment sur des liens éventuels entre l'auteur présumé de l'agression et le tueur du couple de policiers de Magnanville, en juin. Dans une vidéo, ce dernier avait en effet incité à exécuter des surveillants de prison.
Quelles questions soulève cette affaire ?
L'affaire jette un nouveau coup de projecteur sur les unités de prévention de la radicalisation, installées dans quatre prisons françaises. Interrogé sur franceinfo, mercredi, Emmanuel Gauthrin, secrétaire général de FO Pénitentiaire, en a réclamé la suppression après cette agression. "C'est extrêmement dangereux. On continue malheureusement à polluer le reste de la population pénale (...) C'est suicidaire de faire une unité dédiée sur Osny", a-t-il expliqué.
La maison d'arrêt d'Osny dispose de "586 places pour aujourd'hui 1 100 détenus écroués". L'unité spécialisée accueille 18 détenus radicalisés. Pour Emmanuel Gauthrin, "il faut reformer très profondément le système pénitentiaire français". "La législation ne nous permet pas de fouiller quand on le souhaite, y compris dans ces unités-là", a-t-il regretté.
Le syndicaliste a lancé un appel au ministre de la Justice, Jean-Jacques Urvoas, pour "créer au moins deux établissements pénitentiaires spécifiques pour ce type d'individus. Il faut revenir aux quartiers de haute sécurité".
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