Imam interpellé en vue de son expulsion : ce que l'on sait des faits reprochés à Mahjoub Mahjoubi
"Un appel à la haine", selon les mots du préfet du Gard, a mis l'imam tunisien de Bagnols-sur-Cèze au centre d'une vive polémique depuis le week-end dernier. Mahjoub Mahjoubi, accusé de prêche "anti-France" après une vidéo publiée sur les réseaux sociaux, a été interpellé jeudi 22 février en vue d'être expulsé. Son avocat, qui l'a annoncé sur BMFTV, a dit vouloir "contester cette procédure".
Le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin avait réclamé son expulsion dès dimanche dernier. "On est sur des contenus qui remettent fondamentalement en cause nos valeurs et qui tombent sous le coup de la loi", avait déclaré sur franceinfo le préfet du Gard. On vous résume la polémique.
Plusieurs prêches concernés
Le préfet du Gard assure que plusieurs prêches de l'imam sont concernés. Jérôme Bonet dit avoir constaté une "dérive" dans "plusieurs prêches récents", qui "recèlent dans leur contenu un certain nombre d'infractions susceptibles d'être poursuivies."
Un prêche a fait le tour des réseaux sociaux depuis le dimanche 18 février. Dans ce discours prononcé le 9 février dernier, l'imam évoque des "gouvernances qui vont chuter", "des drapeaux tricolores qui nous gangrènent", "qui n'ont aucune valeur auprès d'Allah", "des drapeaux sataniques"... Des propos qui ont suscité de vives réactions jusque dans la classe politique.
Mais selon le préfet du Gard, d'autres faits sont reprochés à Mahjoub Mahjoubi. Selon une source proche, un prêche prononcé une semaine plus tôt, le 2 février, pose aussi problème dans les propos en arabe de Mahjoub Mahjoubi qui ont été traduits par les services de renseignement. Sur ces deux prêches, le préfet évoque aussi la place des femmes et du peuple juif, désigné comme un ennemi. Le parquet de Nîmes a ouvert une enquête pour apologie du terrorisme et incitation à la haine.
L'imam sous surveillance depuis octobre
La surveillance de l'imam a commencé le 3 octobre dernier. La mosquée Ettaouba de Bagnols-sur-Ceze est dans le collimateur de la préfecture pour son accueil pour mineurs, qui sera fermé un mois plus tard, le 9 novembre. Cette fermeture a été décidée pour deux raisons : l'absence de projet pédagogique et des problèmes de sécurité incendie. Deux cours étaient proposés aux mineurs accueillis, l'arabe et un enseignement coranique. Quatre enseignantes étaient présentes et ont indiqués être qualifiées dans les pays du Maghreb.
Deux signalements à la justice ont ensuite été réalisés par la préfecture. Le premier a été fait le 3 novembre pour gestion frauduleuse d'une entreprise, Provence Villa, alors que l'imam était interdit de gestion depuis 2015. C'est sa femme qui avait formellement pris le relais mais il officiait toujours en coulisse. Le deuxième signalement a été réalisé le 17 janvier, sur la gestion administrative de la mosquée, notamment le montant du loyer versé à la mairie.
La bonne foi pour défense et des "excuses"
L'imam plaide la bonne foi en parlant de "lapsus" sur les drapeaux tricolores. Il explique avoir voulu dire "multicolores" et assure qu'il parlait uniquement de la Coupe d'Afrique des Nations, qui se tenait de mi-janvier à mi-février. Un immense malentendu pour son avocat, Samir Hamroun, qui explique que l'imam dénonçait les dangers du nationalisme. Concernant les accusations de propos antisémites, l'avocat poursuit : "Nous apprenons les bras ballants qu'il aurait tenus des propos contre nos compatriotes de confession juive. Ça n'a jamais existé."
L'imam, interrogé mardi 20 février sur la télévision franceinfo, a présenté des "excuses". "Si j'ai blessé, si j'ai heurté, je m'excuse auprès de la population que j'ai blessée", a déclaré Mahjoud Mahjoubi. "Si j'ai heurté la sensibilité de beaucoup de personnes en pensant que j'ai insulté le drapeau français, ce qui n'était pas mon intention, je leur présente mes excuses", a-t-il ajouté.
Interpellé en vue de son expulsion, son avocat va "contester" la procédure
L'imam Mahjoub Mahjoubi a été "interpellé à son domicile" à Bagnols-sur-Cèze, jeudi en vue d'être expulsé. "Il est en route" pour un centre de rétention administrative en région parisienne, a ajouté son avocat Samir Hamroun, sur BFMTV. "Instruction a été donnée de prendre un arrêté ministériel d’expulsion contre cet 'imam' radical aux propos inacceptables", confirme le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin sur le réseau social X. "Je vais contester cette procédure par le biais d'une procédure qu'on appelle le référé expulsion devant le tribunal administratif de Paris", a réagi son avocat, qui précise qu'il a deux jours pour le faire.
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