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"Sécurité globale" : arrêtés lors d'un rassemblement à Paris, des manifestants racontent leur interpellation

Peut-on encore aller manifester en France, sans craindre de se faire interpeller arbitrairement ? Dans une enquête, l'ONG Amnesty International dénonce des "arrestations arbitraires" lors d'une manifestation à Paris, le 12 décembre dernier. Certains manifestants, encore choqués, témoignent sur franceinfo.

Article rédigé par Gaële Joly
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
Un manifestant est interpellé par des policiers lors de la manifestation contre la proposition de loi "Sécurité globale", à Paris, le 12 décembre 2020. (MARTIN BUREAU / AFP)

Le 12 décembre dernier, Alexis Baudelin, avocat, raconte qu'il manifeste tranquillement dans les rues de Paris contre la proposition de loi "Sécurité globale". C'est là qu'il se fait violemment interpeller par des policiers de la BRAV, ces policiers à moto. "Ils me sortent du cortège, et je leur demande immédiatement pourquoi est-ce qu'ils m'interpellent, et ces voltigeurs de la BRAV ne me répondent pas, se souvient-il. Je pense que les forces de l'ordre se sont rendues compte assez rapidement que j'étais avocat au barreau de Paris, et que s'ils me plaçaient en garde à vue, ça risquait de faire un scandale".

Entre le moment où Alexis Baudelin est interpellé, à 15 heures, et le moment où il sort libre du commissariat du 13e arrondissement, "il s'est écoulé cinq heures, purement et arbitrairement privé de toutes mes libertés."

>> Sécurité globale : Amnesty International dénonce des "arrestations arbitraires" lors d'une manifestation à Paris

Le fils de Lara, âgé de 16 ans, est élève en classe de première. Il a passé 24 heures en garde a vue. Lara, prévenue par des amis de son fils, a passé des heures à le chercher partout. "Tout de suite, ça m'a fait peur parce qu'on m'a dit 'il s'est fait tabassé', c'était plutôt agressif, raconte-t-elle. Je n'ai pas eu de nouvelles pendant très longtemps." Son fils n'a fait l'objet d'aucune poursuite. "Il a 16 ans, il n'est pas violent, assure Lara. Il est parti manifester, il a envie de dire ce qu'il pense et on le motive à ça. Toute cette génération, ils sont à fond, il faut leur laisser la possibilité de le faire."

"Il se retrouve à passer la nuit au poste, limite avec un matelas qui sent la pisse. Il y a un décalage énorme !"

Lara, dont le fils de 16 ans a passé la nuit en garde à vue

à franceinfo

Pour Anne-Sophie Simpère, chargée de plaidoyer Libertés à Amnesty international France, ces arrestations arbitraires sont le signe d'une dérive inquiétante. "On a l'impression que ces interpellations deviennent une nouvelle stratégie de maintien de l'ordre, explique-t-elle. Le problème, c'est que ça se fait en violation du droit international, c'est-à-dire le droit à la liberté et à la sûreté, le droit de ne pas être arrêté arbitrairement, et puis c'est une violation du droit de manifester parce que ça peut décourager des gens de descendre dans la rue pour exprimer leur opinion."

C'est justement ce qui se passe pour Mélanie, originaire d'Amiens, rompue aux manifestations des "gilets jaunes". Le 12 décembre dernier, elle a été détenue pendant 70 heures sans motif. La situation est difficile à vivre pour elle. "Aujourd'hui, par exemple, je m'étais engagée à aller à la marche sur Amiens, je n'ai pas réussi à sortir de chez moi, souffle-t-elle. Depuis le garde à vue, les trois quarts du temps, je suis enfermée chez moi."

Comme Alexis Baudelin, Mélanie a décidé de poursuivre le préfet de police Didier Lallement pour "arrestations abusives". Au total, 40 plaintes ont été déposés contre lui.

Sécurité globale : témoignages de manifestants interpellés au micro de Gaële Joly

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