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Mort de Zineb Redouane : une contre-enquête met en cause le rapport d’expertise, l’avocat des enfants dénonce le refus de la justice "d’investiguer correctement"

Le 1er décembre 2018, Zineb Redouane avait reçu une grenade lacrymogène, en marge d'une manifestation des "gilets jaunes" à Marseille, avant de mourir le lendemain. Une reconstitution vidéo des faits assure que la responsabilité du tireur de la grenade lacrymogène "reste clairement engagée" dans son décès.

Article rédigé par David Di Giacomo
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3min
Une femme allume des bougies devant un portrait de Zineb Redouane alors que les gens se rassemblent le 1er décembre 2019 à Marseille pour rendre hommage à la vieille dame. (CLEMENT MAHOUDEAU / AFP)

Deux ans après la mort de Zineb Redouane, 80 ans, touchée par une grenade lacrymogène lors d’une manifestation des "gilets jaunes" en décembre 2018 à Marseille, une contre-enquête du site d'investigation Disclose met en cause les conclusions du rapport d’expertise officiel. Après la publication de ce document, lundi 30 novembre, l’avocat des enfants de Zineb Redouane dénonce sur franceinfo le refus de la justice "d’investiguer correctement".

Le 1er décembre 2018, l’octogénaire est au téléphone avec sa fille et sur le point de fermer les volets de son appartement situé au 4ème étage d’un immeuble, quand elle est touchée par une grenade lacrymogène qui explose ensuite dans son appartement. Elle succombe à ses blessures le lendemain. Le rapport d’expertise officiel conclut à une mort accidentelle.

La responsabilité du tireur "clairement engagée", selon la contre-enquête

Mais dans une reconstitution vidéo des faits, basée sur le rapport balistique, des images de vidéosurveillance et une modélisation 3D, le site Disclose et le groupe de recherche basé à Londres Forensic Architecture assurent que la responsabilité du tireur de la grenade lacrymogène "reste clairement engagée" dans la mort de l'octogénaire. Ils ont analysé la scène image par image et concluent que Zineb Redouane a été tuée par un tir tendu, pourtant interdit avec un lance-grenade, en raison de sa dangerosité, d'autant plus que ce tir était dirigé vers des immeubles d'habitations.

Après avoir vu cette reconstitution, l’avocat des enfants de la victime, Maître Yassine Bouzrou, a déclaré à franceinfo qu'il pense "que le policier a tiré car il imaginait que Madame Redouane, qui était au téléphone avec son haut-parleur, filmait les violences policières qui avaient lieu en bas de chez elle."

"Nous demandons aujourd’hui, tout simplement, que les magistrats instructeurs en tirent toutes les conséquences en mettant en examen le CRS qui a tiré une grenade au visage de Madame Redouane."

Me Yassine Bouzrou, avocat des enfants de la victime

à franceinfo

Alors que l'affaire a déjà été dépaysée à Lyon en août 2019, après des soupçons de collusion entre le parquet de Marseille et les policiers mis en cause, les enfants de la victime "constatent que les juges d’instruction lyonnais refusent de réaliser ce qu’on appelle une enquête effective au sens de la Cour européenne des droits de l’homme, dans la mesure où les policiers, les CRS, et notamment le CRS qui a tué Madame Redouane, n’ont jamais été entendus par les juges d’instruction."

"Nous sommes donc malheureusement dans une situation où la justice refuse d’investiguer correctement et de mettre en cause des policiers qui ont pourtant tué une dame de 80 ans qui était à sa fenêtre, avec son téléphone, qui n’a fait de mal à personne, et on trouve ça totalement scandaleux", dénonce l'avocat.

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