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''Il n'y a pas assez de fonctionnaires pour répondre aux alertes'': la difficile régulation des contenus haineux publiés sur les plateformes

Alors que Marlène Schiappa reçoit mardi les patrons français de plateformes telles que Facebook, Twitter ou Snapchat, critiquées pour avoir relayé les contenus qui dénonçaient le cours de Samuel Paty, assassiné vendredi dernier, les experts que franceinfo a interrogés sont unanimes sur les difficultés que posent les tentatives de régulation.

Article rédigé par franceinfo - Mathilde Vinceneux
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Des policiers de la plate-forme de signalement Pharos, le 15 mai 2019. (SYLVIE CHARBONNIER / FRANCE-BLEU PARIS)

La ministre déléguée à la Citoyenneté Marlène Schiappa reçoit mardi matin les patrons français des grands réseaux sociaux que sont Facebook, Twitter, Google pour Youtube, Tiktok et Snapchat, sous le feu des critiques pour avoir permis le relais de messages et vidéos qui dénonçaient le cours de Samuel Paty, décapité en pleine rue vendredi à Conflans-Sainte-Honorine, quelques jours après avoir montré des caricatures du prophète Mahomet en classe.

>> DIRECT. Assassinat de Samuel Paty : les patrons en France des principaux réseaux sociaux convoqués par Marlène Schiappa

Si Marlène Schiappa a fait part de sa volonté de lutter contre le "cyber-islamisme" ''qui se développe sur internet", les difficultés subsistent, tant la régulation des contenus haineux publiés sur les plate-formes est un indicible casse-tête. Depuis 2004, la loi oblige les plateformes à supprimer ou bloquer ("promptement", dit le texte), les contenus manifestement illicites. Sauf que, dans les faits, certaines publications passent entre les mailles du filet. Selon Me Olivier Iteanu, il faut contraindre ces plateformes à investir davantage dans la modération.

Il faut envisager que les plateformes justifient d'un minimum de modération, par un prestataire ou des ressources internes.

Me Iteanu

à franceinfo

Sauf que cette modération est opaque : quand elle n'est pas faite par des algorithmes, ce sont des personnes dont on ignore les compétences qui s'en chargent. ''Comment ces personnes sont-elles formées à réagir face à des contenus violents ?, s'interroge Emmanuel Netter, professeur de droit à l'université d'Avignon. En cas de doute, comment leur est-il recommandé d'agir ? Ce sont autant de paramètres qui nous sont totalement inaccessibles...''

Selon lui pour être efficace, il faut donc que l'État prenne les choses en mains et instaure des permanences judiciaires chargées de contrôler les contenus en ligne. ''Ces mécanismes de décision rapides par des juges ne sont pas mis en oeuvre, déplore Emmanuel Netter. Et il n'y a rien qui puisse permettre une réponse à la fois étatique, judiciaire et rapide. Pour cela, il faut des moyens..." 

Donner davantage de moyens à la justice

Attention par ailleurs aux ''faux sujets'' qui pourraient faire surface, comme l'anonymat en ligne, prévient Tristan-Mendès France, maître de conférences associé à l’université de Paris, spécialiste des cultures numériques : ''Ce n'est pas un bon moyen d'appréhender la problématique, indique-t-il. Il faut donner davantage de moyens à la justice : on est loin de ce qui est nécessaire. Il n'y a pas assez de fonctionnaires pour répondre aux alertes qui sont envoyées par le citoyen lambda....''

''Comme la modération, c'est-à-dire la censure qui est exercée par les plateformes numériques, est en fait complètement opaque, renforcer la demande de censure pose problème par rapport à la liberté d'expression'', complète Sophie Jehel, maitresse de conférence à l'université Paris 8. ''Au fond, ce qui pose problème, poursuit-elle, c'est qu'on a des plateformes numériques qui sont des plateformes commerciales étasuniennes, qui ont donc des règles et des modes de pensée qui sont différents de ceux de l'Europe, et appliquent les règles à leur façon : tout ce qui est incitation à la haine raciale ou à l'antisémitisme est considéré comme éventuellement pouvant faire partie de la liberté d'expression...''

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