Le gouvernement a annoncé mercredi une série de mesures pour lutter contre les violences faites aux femmes
Le Premier ministre a annoncé le lancement d'une expérimentation de surveillance par bracelet électronique pour contrôler les auteurs de violences faites aux femmes, à l'image de ce qui existe en Espagne.
François Fillon a également fait part de la création d'un délit de violence psychologique.
Le chef du gouvernement s'exprimait à l'occasion de la Journée internationale pour l'élimination de la violence à l'égard des femmes.
675.000 femmes ont été victimes de violences lors des deux dernières années, soit de leur compagnon, soit d'un autre membre de la famille. 156 femmes sont mortes en 2008 sous les coups de leur compagnon.
La lutte contre ce fléau a aussi été choisie comme "grande cause nationale" en 2010. Pour le "Collectif pour la grande cause nationale 2010 contre les violences faites aux femmes", composé de 25 associations de défense du droit des femmes, l'année prochaine sera l'occasion d'évoquer, sous forme de colloques, de débats et de campagnes de communication, toutes les formes de discriminations à l'encontre des femmes.
Quelques mesures annoncées
"En matière pénale, le délit de violences psychologiques au sein du couple va être consacré par le législateur", a déclaré François Fillon mercredi. "C'est une avancée considérable: la création de ce délit va permettre de prendre en compte les situations les plus sournoises, ces situations qui ne laissent pas de traces à l'oeil nu, mais qui mutilent l'être intérieur des victimes."
En matière civile, le chef du gouvernement a annoncé vouloir créer un "régime juridique de référé-protection" afin de protéger dans l'urgence certaines victimes avant même que celles-ci n'aient décidé de porter plainte. Dans ce type de violences, en effet, les victimes hésitent à porter plainte contre leur agresseur.
Dans le même esprit, les mesures d'éloignement des auteurs de violences, actuellement applicables aux seuls conjoints mariés, vont désormais être étendues aux personnes pacsées ou vivant en concubinage.
"L'ensemble de ces modifications" légales "sera introduit dans notre droit avant l'été 2010, si toutefois les parlementaires travaillent à un rythme suffisant", a lancé le Premier ministre. "Le gouvernement est également prêt à examiner" la création d'un délit de mariage forcé, a-t-il aussi précisé.
Ces mesures s'appuient sur certains points d'une proposition de loi de plusieurs députés de tous bords présentée à l'Assemblée nationale en fin de matinée.
Par ailleurs, "nous allons lancer l'expérimentation d'un dispositif de surveillance électronique pour contrôler l'effectivité de la mesure d'éloignement du conjoint violent", a poursuivi le chef du gouvernement. Cette mesure sera testée "dès le début de l'année 2010" comme "une alternative aux poursuites ou une modalité d'exercice de la peine." La secrétaire d'Etat à la Famille Nadine Morano a précisé que le bracelet électronique serait expérimenté en 2010 dans "deux, voire trois départements".
En Espagne, les autorités ont mis à disposition des tribunaux du pays 3000 bracelets. Actuellement 58 hommes en sont munis sur ordre d'un juge. La victime se voit quant à elle dotée d'un boîtier qui sonne si son agresseur approche de trop près son domicile ou son lieu de travail.
Information, prévention, déculpabilisation
"Multiformes, ces discriminations (contre les femmes) s'inscrivent dans un continuum" qui passe par le travail, le couple et qui peut aller jusqu'aux mariages forcés ou aux mutilations sexuelles, a expliqué Annie Guilberteau, directrice du Centre national d'information sur le droit des femmes et des familles (Cnidff) lors d'une conférence de presse mardi. Selon Annie Guilberteau, elles sont "le produit d'un système patriarcal de domination masculine" qu'il s'agit de "déconstruire".
Pour le réalisateur Patric Jean, dont le documentaire " La domination masculine" est sorti en salles mercredi, les discriminations contre les femmes sont en effet "un fait culturel" ancré dans la société, qui commencent "avec le fer à repasser qu'on offre à Noël pour apprendre aux petites filles à être des bonniches".
Plusieurs membres du collectif ont aussi indiqué "attendre beaucoup du gouvernement" notamment en matière de fonds pour les associations. La CFDT a demandé dans un communiqué "l'instauration d'une loi cadre contre sur le modèle de la loi espagnole". Les associations membres du collectif se sont en revanche dites "partagées" sur la nécessité de légiférer alors qu'un arsenal législatif existe déjà. Bien souvent, le problème c'est que les femmes victimes de violences n'osent pas pousser la porte du commissariat, ont pointé plusieurs membres du collectif, appelant à davantage de prévention ou en intervenant auprès des auteurs de violences.
Réactions à l'arsenal gouvernemental annoncé
La secrétaire générale du mouvement Ni Putes ni Soumises (NPNS) Asma Guénifi, s'est dite réservée sur le système du bracelet électronique. Toutefois, la vice-présidente de NPNS Chahrazad Belayni, elle-même grièvement brûlée en 2005 par son ex-petit ami qu'elle refusait d'épouser, estime qu'il "faut l'essayer".
Si plusieurs des mesures annoncées répondent aux demandes des associations féministes, certaines organisations, comme la Ligue des droits de l'Homme, auraient aimé un dispositif plus large, de type loi-cadre.
La Fédération nationale solidarité Femmes a aussi demandé des "moyens financiers supplémentaires" pour les associations spécialisées et pour la justice.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.