Guérini, bisbilles avec les écologistes : le PS marseillais débat, mais tient bon
Ils ne sont pas toujours d'accord, mais finissent par coller les mêmes affiches, y compris celles qu'ils viennent de critiquer. Reportage chez les militants de la section 309 du Parti socialiste de Marseille.
Ils sont moitié moins que d'habitude, selon Sylvain Borgni, le président de la section 309 du PS de Marseille. Mais une quinzaine de socialistes, c'est déjà assez pour débattre et se diviser. "Je ne veux pas que vous leur posiez des questions embarrassantes", avait prévenu le patron de la section. Mais lundi 5 décembre 2011, pas besoin d'aller chercher loin pour les lancer.
"Guérini, c'est fini"
Avant que la séance soit ouverte, on pose discrètement la question. Quid de l'affaire Guérini, dans laquelle le baron socialiste local est mis en examen pour prise illégale d'intérêt et association de malfaiteurs ? Blanc. Juste des petits haussements d'épaules, de légers hochements de tête.
"Ça m'a beaucoup peinée", concède finalement Michelle, militante depuis 1968. Elle connaît "Jean-Noël depuis trente ans", et estime "qu'il a le respect des militants". De toute façon, "s'il est condamné, ce ne sera pas une peine très lourde". En face, il y a René, retraité de l'Education nationale et militant au PS depuis cinq ans. Lui veut "qu'il démissionne". "Quand on a une responsabilité (président du conseil général), il faut être éthiquement irréprochable", assène-t-il. Mais le ton ne monte pas.
Les militants qui ne tranchent pas sont majoritaires. Pour Laurent, médecin : "Guérini est mis en examen, donc présumé innocent. Mais une mise en examen, c'est quand même pas bon signe." Cela dit, "ça se calme, dans la rue, au boulot, les gens n'en parlent plus trop." Ici, la position officielle semble être d'attendre que la justice passe. On verra ensuite si on s'engueule...
"Ce qui est regrettable, souligne quand même Fernand, c'est que ça salit le parti. Ceux qui prennent la parole pour s'accuser les uns les autres, c'est méprisable." Les militants qui écoutent acquiescent, les autres sont déjà assis autour de la table de réunion. "C'est ce qu'on s'est dit la semaine dernière ici-même, conclut René, l'affaire Guérini, c'est fini." En tout cas, à leur niveau.
"Le Vert est dans le fruit"
Parce qu'il y en a d'autres, des sujets à aborder. Notamment "l'affaire Vert". En bref, la 6e circonscription, dont dépend la section 309, a été promise à Europe Ecologie-Les Verts. Qui semblent faire la fine bouche. "S'ils n'en veulent pas, on la garde", balaye Elodie, 24 ans.
Si c'était si simple, soupire le groupe. D'un côté ceux qui feront la campagne du candidat de la gauche quel qu'il soit. Comme Sylvain, qui "est militant avant tout et pas là pour faire dans la dentelle". Le président de section n'a "jamais refusé de faire une campagne" en cinquante-trois ans au PS. Il "n'imagine pas qu'il n'y ait pas un bandeau 'soutenu par le PS'" sur une des affiches des candidats aux législatives. Une partie des militants opine du chef.
Mais pas Fernand, qui "a 90 % de chances d'être candidat en dehors du PS". Si la personne investie ne lui semble pas "légitime", si c'est "un de ces hurluberlus comme certains Verts", alors il ira. Derrière lui, beaucoup estiment en effet qu'il s'agit là d'une injustice. "Une fois c'est un Vert, l'autre fois c'est un candidat de la société civile, après c'est un Chevènementiste, jamais un candidat de la section", énumère Michelle. Ils remontent jusqu'en 1993 pour trouver un candidat à eux. Fernand regrette que ce ne soit pas les militants qui tranchent. Laurent estime que "c'est normal, on fait des accords, on donne des circonscriptions, mais pourquoi toujours la nôtre ?"
Surtout que, "au niveau national, là, ils représentent peanuts", souligne François, qui fait référence au plafonnement d'Eva Joly autour de 5 % dans les sondages. Beaucoup se disent "dans l'expectative" puisque rien n'est tranché dans les Bouches-du-Rhône. "Le Vert est dans le fruit", rit jaune un participant.
"Il faut qu'on arrête de courir après Sarko"
On enchaîne pour pinailler sur le texte d'un tract. Qui affirme : "la droite creuse la dette", et affiche pleine page "788 000 000 000 euros", soit l'augmentation de la dette publique imputable à la droite depuis 2002, selon le PS. Certains auraient voulu que ce chiffre soit traduit en Smic pour être plus lisible. D'autres en création de logements ou d'emplois. Voire même en couverture du Vélodrome, blague Laurent, qui estime que cela fait "200 000 couvertures" du stade mythique de l'Olympique de Marseille.
Elodie, elle, "c'est peut-être parce qu'elle a fait Sciences Po", mais ce chiffre, "elle le comprend très bien". Pour la jeune employée à la com' d'EDF, "le constat, c'est bon, maintenant ce qu'il faut, ce sont des propositions." Et là, la section 309 tombe d'accord. Pierre, qui râlait sur les positions de François Hollande sur le nucléaire, René et Claude, qui voulaient retourner aux racines du socialisme avec "un vrai discours à destination des ouvriers", se retrouvent. Ils attendent le programme !
Bien sûr, il y a toujours un rabat-joie qui précise qu'il était "aubryste" pendant la primaire, pour rappeler qu'ils en ont voté un, de programme. Celui du Parti socialiste, et qu' "en fonction de l'actualité, l'équipe du candidat est en train de refaire le projet au jour le jour". Il y a aussi celui qui cite François Mitterrand ("le centre n'est ni de gauche, ni de gauche"), et dénonce "la main mise" du think tank Terra Nova sur les propositions du candidat. Mais quand Merwan, la vingtaine, dit qu'il "en a marre de courir après Sarkozy", là, personne ne conteste.
Finalement François se résigne : "Ce tract-là, c'est un point de départ". Sylvain en profite pour clore la réunion. "N'oubliez pas, chacun prend un peu des deux piles de tracts", rappelle-t-il. Un petit tas de documents sous chaque bras, les militants quittent leur QG, "Le Cercle de la Renaissance".
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