Cérémonie de clôture des JO 2024 : "C'était sur ma 'to do list'"... Arthur Cadre, danseur "Golden Voyageur" venu du breakdance pour clore les Jeux

Thomas Jolly a choisi le Breton pour le rôle principal de la pièce-opéra "Records", qui se déroulera dimanche au Stade de France.
Article rédigé par Simon Bardet
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié
Temps de lecture : 7 min
Arthur Cadre dansera à la cérémonie de clôture des Jeux olympiques de Paris, le 11 août 2024. (JOEL SAGET / AFP)

Il a vécu dans cinq pays, dansé dans une cinquantaine de villes à travers le monde, de Rome à San Francisco en passant par Le Caire et Zanzibar… Arthur Cadre sera le "Golden Voyageur" de la cérémonie de clôture des Jeux olympiques, dimanche 11 août. Le danseur – qui multiplie les casquettes – sera le rôle principal de la pièce-opéra "Records" au Stade de France, "l'histoire d'un voyageur interstellaire qui arrive au stade et qui va découvrir les vestiges des Jeux olympiques et les réanimer", a expliqué le scénariste Damien Gabriac à l’AFP. A 31 ans, le danseur est revenu pour franceinfo: sport sur cette aventure olympique.

Franceinfo: sport : Comment vous êtes-vous retrouvé dans ce projet olympique qu’est la cérémonie de clôture ?

Arthur Cadre : J'étais en contact avec Thomas Jolly, qui est un super metteur en scène. Il m'a demandé si ça m'intéresserait d’y participer, m'a dit qu'il avait peut-être un rôle pour moi, qui pourrait marcher avec ma personnalité et ce que je fais. Il m'a présenté le projet, on en a discuté, et j'ai trouvé ça hyperintéressant. Je me suis dit que je pouvais vraiment proposer quelque chose de personnel.

Dans ce que vous faites, il y a souvent cette impression de liberté. Là, nous sommes dans le cadre très codé des Jeux olympiques. C'était possible de trouver votre espace de création ?

J'ai l'habitude de travailler avec de grosses machines (Super Bowl, etc.), et c'est d'ailleurs souvent pour ça que les gens m'engagent. Je connais ces gros spectacles, ces grosses productions, et j'essaie à chaque fois d'apporter ma personnalité par petites touches. J'arrive, je propose beaucoup de choses. Certaines ne se font pas dans le spectacle final, mais j’ai effectué ce travail-là avec Thomas. Ainsi, le metteur en scène a pas mal de matière pour travailler derrière.

Quand a eu lieu la rencontre avec Thomas Jolly ? Vous vous connaissiez déjà ?

On se suivait sur les réseaux sociaux. J'ai vu le spectacle Starmania, qu'il a mis en scène et que j'ai trouvé très beau. On se suivait de loin, et c'est lui qui m'a ensuite contacté pour les Jeux olympiques. Je pense qu'il a vu un événement que j'ai fait il n'y a pas longtemps pour Cartier, à Vienne (Autriche), où j'avais fait un peu de lévitation, beaucoup de choses dans les airs, mais aussi sur le sol. Je pense que ma pluridisciplinarité l'a intéressé.

Une case de plus cochée dans sa "to do list"

Ce projet olympique, c'est une chose dont vous rêviez ?

Je n'ai jamais participé à une cérémonie olympique, c'est une première. C'est une expérience incroyable, et c'était quand même sur ma "to do list" de participer à ce genre de spectacles. J'avais déjà fait la cérémonie de clôture de l'exposition universelle, mais ce n'est pas exactement la même chose. Participer à ce projet, avec Thomas en plus, c'est génial. 

Vous avez participé à plusieurs événements sportifs (GP de Formule 1, Super Bowl...). Qu'est-ce que cela implique par rapport à votre création ?

Les organisateurs sont forcément des gens qui sont sensibles à la technique, aux acrobaties, à des choses très impressionnantes. Comme c'est destiné à un public très large, les metteurs en scène sont d'autant plus exigeants. Ce sont de très grosses machines, où je peux vraiment pousser techniquement ce que je sais faire, sans oublier le fil rouge du spectacle, évidemment. Ce serait complètement différent pour un public un peu plus théâtral, où la technique n'est pas forcément le sujet principal.

Arthur Cadre mêle danse, contorsion et lévitation dans ses œuvres. (JOEL SAGET / AFP)

Comment est née cette passion pour la danse, ce par quoi vous avez commencé ?

Je viens de Perros-Guirec, en Bretagne, et les hivers sont un peu longs parfois. J'ai vu une vidéo à la télévision, avec des breakdancers. Je ne savais pas ce que c'était, mais j'avais vraiment trouvé ça impressionnant. J'ai commencé à reproduire un peu la même chose dans ma chambre. J'ai ensuite pris quelques cours pour structurer un peu ce que je faisais, avant de commencer à faire des compétitions, toujours de breakdance. C'est de là que vient, je pense, ma liberté créative, mon envie d'essayer de faire des choses différentes, puisque dans cette discipline, on essaie vraiment de développer un style très personnel, contrairement au ballet par exemple.

"En plus de cela, je viens d'une famille très sportive. Ma mère était en équipe de France de volley, et mon père a fait les Jeux olympiques en 1988, en planche à voile."

Arthur Cadre

à franceinfo: sport

Je pense qu'ils m'ont transmis cet esprit de compétition. J'ai donc continué à en faire, tout en développant un style qui était un peu différent des autres, où je mélangeais la contorsion et les acrobaties. Quand j'arrivais en compétition de breakdance, les gens se disaient : 'Mais c'est qui ce mec ? Il s'est perdu ?' Quand j'étais petit, j'étais déjà très mince. J'ai dû développer ma danse par rapport à ça, et c'est là que j'ai ajouté de la contorsion par exemple. Ça m'a donné l'opportunité de créer un style plus personnel.

 

Vous n'avez pas eu de regrets d'avoir arrêté le breakdance quand vous avez vu que ça arrivait aux JO ?

Pour moi, c'est toujours irréel, je n'y crois toujours pas. C'est incroyable le chemin que la discipline a fait depuis le Bronx, aux Etats-Unis, jusqu'aux Jeux olympiques. C'est génial de donner un coup de projecteur au breakdance.

"Bon, il fait ses roulades"

Est-ce que vos parents sportifs vous ont toujours soutenu dans cette voie ?

Ils m'ont toujours soutenu, mais ils n'ont jamais vraiment compris ce que je faisais. Mon père était toujours là, à dire 'bon, il fait ses roulades.' Ils n'avaient pas vraiment conscience de ce que je faisais, et je ne voulais pas vraiment en faire mon métier à l’époque. J'ai fait des études qui n’ont rien à voir, des études d'architecture, à Rennes et à Montréal.

D'ailleurs, quand j'ai commencé ces études-là, mes parents m'ont dit qu'il allait falloir choisir. Réflexe de Breton, je me suis dit : non, je vais faire les deux ! C'est ensuite, quand j'ai terminé mes études et que j'ai exercé pendant six mois, que je me suis dit que ce n'était pas là que je voulais être. Du coup, j'ai rebifurqué vers la danse plus sérieusement.

Mais l'architecture vous sert encore aujourd'hui...

Oui, ça m'a beaucoup influencé dans ma danse, en termes de lignes, de proportions, de rythmes, et même en termes de gestion de projet quand je fais de la mise en scène. Je pense que ces études sont le juste milieu entre l'artistique et le concret. 

Vous avez déjà habité aux quatre coins du monde, dansé et donné des représentations presque partout. Vous n'avez pas peur de vous ennuyer à 50 ans ? 

Je n'ai pas eu le temps d'y réfléchir. Tant que je suis jeune, c'est cool de voyager, de voir des choses, mais il y a un moment où ça va me saouler parce que c'est quand même assez fatigant Pour l'instant, je ne vois pas cette partie-là, je vois le positif. 

"Je rencontre des gens tout le temps, je découvre des cultures très intéressantes."

Arthur Cadre

à franceinfo: sport

Même dans la pratique artistique, c'est génial, stimulant de rencontrer plein de gens d'univers différents, des danseurs, des architectes, des écrivains... Vraiment, tout ça m'inspire beaucoup, ça me donne des idées.

Par exemple, en ce moment, il y a une culture qui me choque et m'inspire beaucoup, c'est Bollywood. C'est assez incroyable, ils ont tellement d'énergie ! J'ai eu l'occasion de travailler avec Shekhar Kapur, un super réalisateur de Bollywood. C'est vraiment une vision qui est à des années-lumière de ce qu'on fait en Europe. Ils sont très connectés avec le ciel et je trouve ça intéressant de voir une vision artistique totalement différente dans un monde où tout est très mondialisé, où tout commence à être un peu similaire. Eux, pas du tout, ils sont toujours dans leur bulle artistique.

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