Info franceinfo JO de Paris 2024 : l'eau de la Seine était de qualité insuffisante le jour où la maire de Paris et le préfet se sont baignés

Des données publiées sur le site de la Ville de Paris montrent que les seuils recommandés par les autorités sanitaires ont été dépassés le 17 juillet au Bras Marie, date et lieu de la baignade de la maire de Paris.
Article rédigé par Brice Le Borgne
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4 min
La maire de Paris, Anne Hidalgo, s'est baignée dans la Seine mercredi 17 juillet, en compagnie du préfet d'Ile-de-France et du président de Paris 2024. (VICTORIA VALDIVIA / HANS LUCAS)

"La baignade dans la Seine, certains en ont rêvé, beaucoup en ont douté, et nous, nous l'avons fait !" se réjouissait Anne Hidalgo, maire de Paris, mercredi 17 juillet, après s'être baignée dans la Seine. Ce matin-là, des dizaines de caméras et spectateurs étaient venus assister au plongeon de l'édile, accompagnée du préfet de la région Ile-de-France Marc Guillaume, et de Tony Estanguet, patron de Paris 2024. 

Mais une dizaine de jours plus tard, le site de la Ville de Paris a mis à jour sa "Météo de la Seine", où les résultats des prélèvements quotidiens sont publiés depuis la mi-juin. Les autorités scrutent en effet les taux d'Escherichia coli et d'entérocoques, deux bactéries dont la présence en trop grande quantité est indicatrice d'une eau considérée comme trop dangereuse, dans laquelle les nageurs pourraient attraper des gastro-entérites ou des maladies de la peau. Et pour la journée du 17 juillet, les résultats ne sont pas si bons. 

Sur le site de Bras Marie, où la maire et le préfet, accompagnés de quelques dizaines d'autres nageurs, se sont baignés, le site affiche une valeur en E. Coli de 985 npp/100ml d'eau. Un peu plus en amont, à Bercy, ce taux monte à 1017. Or, les seuils de qualité recommandée, tirés d'une directive européenne et tenus comme une boussole par les autorités, indiquent qu'au-delà de 900 npp/100ml d'eau en E. Coli, la qualité est insuffisante pour autoriser la baignade. Les valeurs du 17 juillet dépassent, donc, de peu, le seuil critique. Sur les deux autres points de mesure, situés plus en aval, les relevés sont conformes.

Au-delà de cet épisode, les relevés montrent une amélioration de la qualité de l'eau de la Seine par rapport au mois de juin, période où le débit était très élevé pour la saison. Une embellie, d'après les responsables de la Ville de Paris ou du gouvernement, à mettre au crédit des différents chantiers entrepris ces derniers mois. Comme le raccordement des péniches pour éviter qu'elles déversent leurs eaux usées dans la Seine, la mise en route du bassin de stockage d'Austerlitz pour éviter les déversements d'égouts dans la Seine en cas de fortes pluies, ou le lancement d'un autre réservoir, le "VL8", en Essonne.

Mais ce n'est pas la première fois qu'une baignade se tient dans une eau ne respectant pas les seuils de qualité. A l'été 2023, déjà, lors d'épreuves tests en vue des Jeux olympiques, des athlètes ont pu plonger dans le fleuve malgré une pollution trop élevée. La Fédération internationale de triathlon avait alors fait valoir, auprès de franceinfo, que la décision de maintenir l'événement était est le fruit d'un faisceau d'indices : les résultats des tests n'en étaient qu'une partie, et les autres (le courant, l'aspect visuel de l'eau...) étaient au vert. 

Des autorités sanitaires peu transparentes

Ces autorisations entraient aussi en contradiction avec les recommandations faites par les autorités sanitaires. Au mois de juillet 2023, l'Agence régionale de santé (ARS) d'Ile-de-France avait rendu un avis, à titre consultatif, sur la qualité de l'eau de la Seine en vue des épreuves du mois d'août. Dans ce document daté du 25 juillet 2023, l'ARS donnait un avis favorable. Mais assorti d'une série de conditions et de préconisations. L'agence demandait ainsi aux organisateurs de reporter les épreuves en cas de résultat supérieur à 900 npp/100 ml pour les E. coli et 330 npp/100 ml pour les entérocoques. Des seuils qui ont été dépassés, sans pour autant entraîner l'annulation de l'événement.

Un an plus tard, ces recommandations ont-elles évolué ? Impossible de le savoir. L'ARS Ile-de-France a bien rendu un avis, le 12 juillet 2024, sur le sujet. C'est sur la base de ce document que la préfecture avait autorisé la baignade du 17 juillet. Mais les autorités ont jusque-là refusé de transmettre ce document, alors même que la Commission d'accès aux documents administratifs (Cada), autorité habilitée à estimer si une administration est censée publier un document donné, avait rendu un avis favorable sur le même type de dossier, à l'automne 2023. L'ARS s'était ensuite plié à cet avis, nous transmettant les avis sanitaires demandés.

Cette fois, l'agence sanitaire nous renvoie vers la préfecture, qui ne nous a pas non plus envoyé le document. Interrogés sur la baignade du 17 juillet, les services du préfet indiquent que "tous les feux étaient au vert au moment de la prise de décision" et que "aucun des participants n'a fait état d'un désagrément". La Ville de Paris n'avait pas donné suite à nos demandes au moment de publier cet article.

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