Témoignages Paris 2024 : ces athlètes qui ont lancé des cagnottes pour financer une partie de leur préparation olympique

La route est longue avant de se qualifier aux JO, notamment en l'absence de gros sponsor ou de prise en charge par les fédérations. Pour ces sportifs, la compétition se joue bien en amont et se double d'un défi financier.
Article rédigé par Louis Mondot
Radio France
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Le lanceur de javelot Teuraiterai Tupaia, le 12 juin 2024 à Rome (Italie). (ANNE-CHRISTINE POUJOULAT / AFP)

Dernière ligne droite pour les athlètes qualifiés aux Jeux, après une préparation physique longue et exigeante. Une préparation qui peut aussi être très coûteuse, notamment pour ceux qui n'ont pas de gros sponsors ou peu d'aide de leur fédération sportive. Mais plusieurs d'entre eux ont pu récolter des fonds grâce à des cagnottes en ligne. Franceinfo a interrogé plusieurs de ces athlètes, pour qui le rêve olympique passe par internet. 

Lancer un appel aux dons en tant que sportif n'a pourtant rien d'évident. "A la base, je ne voulais pas tellement ouvrir de cagnotte, parce que je voyais beaucoup de sportifs le faire, et ça ne prenait pas tout le temps. Je n'y croyais pas tellement", raconte Valentin Houinato. Ce judoka de 27 ans concourt sous les couleurs du Bénin pour les Jeux, dans la catégorie des moins de 81 kg. C'est son entourage qui a été le déclencheur. "Il y a une jeune judoka de mon premier club en Seine-et-Marne qui m'a dit : 'Val, laisse nous faire ça pour toi'. Elle a été hyper motivée, elle m'a dit que ce sera leur contribution", ajoute-t-il.

Après une campagne à coups de vidéos sur les réseaux sociaux, des envois de mail et même du porte-à-porte, la démarche finit par payer. "Ce qui est assez terrible, c'est que 6 500 euros récoltés, c'est vraiment incroyable, mais la dure réalité c'est que ça compense à peine ce que j'avais dépensé de ma poche la saison passée." Un contrat avec un sponsor lui a permis d'arriver quasiment à 10 000 euros, soit à peu près le coût d'une saison, d'après plusieurs athlètes interrogés.

Enchaînement des compétitions et des frais

Pour avoir une chance de se qualifier aux Jeux, il faut enchaîner les compétitions pendant plusieurs mois, notamment à l'étranger. Et donc payer des transports, des hôtels, ou encore des visas. Autant de dépenses auxquelles il faut ajouter les frais quotidiens, comme la nourriture, les compléments alimentaires, des séances de kiné, ou encore l'achat de matériel.

Or, l'équation est simple selon Baboukar Mané, judoka de 38 ans qui va représenter la Guinée-Bissau aux Jeux : "Si je n'ai pas de fonds, je ne peux pas aller en compétition. Et si je ne vais pas en compétition, je ne marque pas de points et je ne peux pas me qualifier." Sa cagnotte, lancée à l'initiative de son club fin 2023, lui a permis de récolter environ 1 600 euros en trois mois. Une somme précieuse mais qui ne lui permet pas de mettre entre parenthèse son travail dans le milieu de l'assurance. 

"Si on n'a pas ce soutien-là via des cagnottes, on est obligé de travailler encore plus. Ce qui signifie moins de temps pour s'entraîner et se reposer, donc moins de performances par la suite."

Baboukar Mané, judoka

à franceinfo

Mêmes difficultés pour Valentin Houinato, qui doit jongler avec son métier de journaliste à Radio France. "Les moments où je suis en compétition ou en stage, je suis en congés sans solde, c'est-à-dire que je ne suis pas payé". Si ces deux sportifs ont reçu quelques aides de leur fédération, elles sont selon eux loin d'être suffisantes.

L'équilibre a été plus facile à trouver en revanche pour Teuraiterai Tupaia, avec un temps aménagé pendant ses études en Staps à Strasbourg. Ce lanceur de javelot polynésien de 24 ans a pu récolter un peu moins de 3 000 euros. "Sans la cagnotte, je ne partais pas une semaine et demie en Nouvelle-Zélande faire un stage avec un entraîneur de renommée internationale au javelot. Ce qui a pu être déterminant dans la suite de la saison." Le lanceur décroche en tout cas un record de France en mai dernier, ce qui lui a d'ailleurs valu des dons supplémentaires et de possibles nouvelles aides de sa fédération sportive à Tahiti.

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