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Mais pourquoi le gouvernement est-il si méchant avec Depardieu ?

"Minable", "déchéance", "attitude anti-citoyenne"... La majorité n'est pas tendre avec Gérard Depardieu, qui envisage de quitter la France. Francetv info décrypte la communication gouvernementale, entre bascule à gauche et diversion médiatique.

Article rédigé par Yann Thompson
France Télévisions
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Le Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, le 27 octobre 2012 au congrès du PS à Toulouse. (REMY GABALDA / AFP)

"Sa patrie a d'abord l'air d'être son compte en banque." Invité dimanche 16 décembre de l'émission "C Politique", le ministre délégué à l'Economie sociale et solidaire, Benoît Hamon, n'a pas montré de pitié à l'égard de l'acteur Gérard Depardieu, qui souhaite quitter la France pour bénéficier d'un meilleur régime fiscal en Belgique. Les lames étaient tout aussi aiguisées chez ses collègues du gouvernement. Tandis que le ministre de l'Education nationale, Vincent Peillon, dénonçait une "attitude anti-citoyenne" – pour ne pas dire "assez minable" comme le Premier ministre Jean-Marc Ayrault –, la ministre de la Culture, Aurélie Filippetti, regrettait, elle, "que Gérard Depardieu ne retourne pas au cinéma muet".

Des propos virulents au service d'une stratégie de communication ? Francetv info décrypte cette levée de boucliers et liste les bénéfices que le gouvernement pourrait retirer de cette affaire.

Pour assurer le SAV de sa politique

Une bonne petite polémique fiscale, quoi de mieux pour faire un peu de pédagogie ? L'annonce du départ de Gérard Depardieu a braqué les projecteurs sur l'action gouvernementale en matière d'impôts. Ainsi, quand l'acteur a affirmé, dimanche, avoir été imposé à hauteur de 85% en 2012, la machine médiatique s'est emparée du chiffre pour vérifier son exactitude. 

Depardieu, gros contribuable ou mauvais gestionnaire ? ( France 2)

Grâce à cette affaire, le gouvernement peut défendre sa nouvelle tranche supérieure d'impôt sur le revenu à 45% et sa taxe à 75% sur les très hauts revenus.

Pour se réconcilier avec la gauche

Chahutés par les communistes et les écologistes, Jean-Marc Ayrault et François Hollande sont accusés d'avoir donné une impulsion sociale-libérale à leur politique économique. Ils mécontentent leur base, mais aussi des élus PS, dont une quinzaine ont adressé, lundi, une lettre ouverte au président de la République afin qu'il n'abandonne pas les couches populaires.

L'affaire Depardieu donne à la majorité l'occasion de réaffirmer ses valeurs. Ainsi, pour Jean-Marc Ayrault, payer ses impôts est "un acte de solidarité""patriotique" auquel l'acteur, soutien de Nicolas Sarkozy, tente d'échapper. "Etre Français, c'est aimer son pays et contribuer à ce que son pays se redresse et à ce que les inégalités reculent", a affirmé le Premier ministre, mercredi. "C'est un discours traditionnel, un réflexe attendu de la gauche", confirme à francetv info le chercheur Gérard Grunberg, spécialiste de la gauche.

Ayrault juge "assez minable" l'exil de Depardieu en Belgique (Francetv info)

Pour faire oublier l'affaire Cahuzac

Les soupçons d'évasion fiscale du ministre Jérôme Cahuzac, la colère des salariés de Florange ou encore les divisions de la majorité ? Oubliés. L'agenda médiatique a repoussé ces sujets compliqués au profit de l'affaire Depardieu, devenue un contre-feux rêvé. "Ayrault applique à Depardieu la technique léniniste du 'social traître' pour détourner l'attention de ses insuffisances et des soupçons d'exil fiscal de son ministre du Budget", a estimé, lundi, Philippe Juvin, secrétaire national de l'UMP.

Pendant qu'elle ne parle pas de ses soucis, la majorité peut en profiter pour feindre l'unité. "Nous sommes dans une guerre économique", brandit Aurélie Filippetti, et "la France traverse une épreuve", ajoute Harlem Désir, suggérant un serrage de coudes collectif. Jouant l'appaisement, François Hollande a lui refusé, lundi, de "blâmer" Gérard Depardieu, préférant saluer "ceux qui acceptent de payer leurs impôts en France".

Pour préparer de futures lois

Interrogé sur l'affaire Depardieu, François Hollande a annoncé, vendredi, des mesures contre l'exil fiscal, indiquant qu'il n'y avait "pas d'autre moyen de faire" que de "revoir (les) conventions fiscales" avec les pays qui offrent une fiscalité avantageuse. Le chef de l'Etat n'a pas donné davantage de précisions, mais Vincent Peillon a esquissé une piste d'étude pour éviter de nouvelles affaires Depardieu : "Si on avançait un peu dans l'harmonisation fiscale européenne, ce genre de sujet n'aurait pas lieu", a-t-il dit dimanche.

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