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Groenland : une base secrète de l'armée américaine menace de refaire surface à cause de la fonte des glaciers

Les militaires américains voulaient y stocker des missiles capables d'atteindre l'ex-URSS. Le projet a été abandonné en 1967, mais les déchets sont restés.

Article rédigé par franceinfo avec AFP
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Le fjord de Sermilik, au Groenland, le 15 mai 2009. (M. LOHMANN / BLICKWINKEL)

Avec le réchauffement climatique, la guerre froide refait surface. Au Groenland (un territoire autonome qui dépend du Danemark), la fonte des glaciers menace d'exhumer une base secrète forée à la fin des années 1960 pour mettre le territoire soviétique à portée des missiles américains. Problème : à cause de cette fonte, les eaux usées et les résidus radioactifs risquent, à terme, de se déverser dans l'océan. 

La base devrait être peu à peu mise au jour à partir de 2090, alors que ses constructeurs espéraient qu'elle repose dans la glace "pour l'éternité", selon une étude publiée dans le journal Geophysical Research Letters (en anglais)"Personne ne pensait que [la base] ferait surface (...) mais le monde a changé", explique William Colgan, glaciologue à l'université canadienne de York. 

D'un laboratoire scientifique à une cache pour missiles

En 1959, des ingénieurs de l'armée américaine creusent "Camp Century" à environ 200 kilomètres à l'est de la base aérienne américaine de Thulé, dans le nord du Groënland. Officiellement, il s'agit d'établir des laboratoires de recherche sur l'Arctique. L'armée perce, dans la calotte glaciaire (épaisse de plusieurs centaines de mètres), des tunnels pour accueillir les laboratoires, un hôpital, un cinéma et une église, le tout alimenté par un petit réacteur nucléaire. 

Trois ans plus tard, les militaires américains soumettent à leur état-major un nouveau projet intitulé "Iceworm" ("vers de glace") dont le but est de creuser au même endroit, dans le glacier, un réseau de galeries afin d'y stocker 600 missiles balistiques. Les travaux sont lancés, mais les ingénieurs réalisent que la glace est vivante, mouvante, et qu'elle menace de broyer les tunnels. Le projet est abandonné en 1967. Le réacteur nucléaire est extrait, mais les déchets demeurent.

Face au risque écologique, des voix s'élèvent pour exiger une grande opération de nettoyage. Mais aucun pays ne se prononce pour la faire, encore moins pour la financer.

Tensions entre les États-Unis et le Groenland

Le ministre des Affaires étrangères du Groenland, Vittus Qujaukitsoq, se dit "préoccupé" par ce sujet et déterminé à établir les responsabilités. Le Pentagone a, de son côté, assuré "reconnaître la réalité du changement climatique et les risques qu'il pose" dans cette affaire et promet de "continuer à œuvrer avec le gouvernement danois et les autorités groenlandaises pour régler les questions de sécurité communes".

Kristian Hvidtfelt Nielsen, chercheur en histoire des sciences à l'université d'Aarhus, au Danemark, estime que Washington et Copenhague devraient partager ces responsabilités. "D'un point de vue moral, je crois que le Danemark et les Etats-Unis ont tous deux le devoir de nettoyer. Ce sont les Américains qui ont construit la base, et ce sont les Danois qui leur ont donné l'autorisation de le faire", plaide-t-il.

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