Cyclone Chido : à Mayotte, pourquoi le bilan humain devrait finalement être moins lourd que redouté

Le nombre de victimes du cyclone Chido, à Mayotte, se compte "en dizaines et pas en milliers", a affirmé le Premier ministre François Bayrou, lundi.
Article rédigé par franceinfo
Radio France
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Une vue de Mayotte après le passage du cyclone, le 17 décembre 2024 (HANDOUT / MAXPPP)

Cela n'enlève rien au drame vécu par les habitants de Mayotte dont l'archipel est dévasté, mais le bilan humain de cette catastrophe pourrait être beaucoup moins lourd que certains pouvaient le redouter. Sur BFMTV, lundi 23 décembre, le Premier ministre François Bayrou a estimé que le nombre de victimes du cyclone Chido "se compte en dizaines et pas en milliers". Mardi matin, sur franceinfo, le préfet François-Xavier Bieuville, affirme que cette estimation est plausible. Des sources locales officielles et non officielles jointes par l'équipe de décryptage de franceinfo vont dans le même sens.

Dans les premiers jours après le passage du cyclone Chido, des bilans chiffrés très inquiétants ont circulé, relayés par la presse locale et quelques élus. On a même évoqué le nombre terrifiant de 60 000 morts. Des estimations liées notamment au fait qu'à l'approche du Cyclone, 10 000 habitants seulement des bidonvilles sur les 100 000 estimés, se sont mis à l'abri dans les 120 centres de secours officiels.

Mais ce que l'on a appris depuis, c'est que beaucoup de clandestins qui n'ont pas rejoint ces lieux de peur d'être expulsés ensuite, se sont néanmoins réfugiés dans des bâtiments en dur, dans des mosquées notamment, des parkings, ou chez d'autres habitants.

Une odeur de mort et des rumeurs de charnier

Parmi les témoignages qui faisaient craindre le pire, il y a cette odeur pestilentielle qui a régné ces derniers jours dans certains quartiers très sinistrés. Mais pour le préfet de Mayotte, François-Xavier Bieuville, beaucoup d'habitants des quartiers informels avaient des congélateurs ou des frigos pleins et "vu les coupures électriques, ces denrées ont dû dépérir et pourrir. Cela pourrait constituer une hypothèse pour expliquer les odeurs de putréfaction dans les quartiers", dit-il. C'est l'hypothèse, selon lui, la plus plausible. Des rumeurs relayées par l'élue, Estelle Youssoufa, faisaient, par ailleurs, état de présence de charnier. "On est face à des charniers à ciel ouvert (…) Personne n'est venu récupérer les corps ensevelis", a déclaré la députée centriste lors d'un échange avec Emmanuel Macron.

Mais depuis, des drones ont survolé les quartiers détruits les plus escarpés et il n'y a pas de traces de charnier, selon le ministère de l'Intérieur. Il y a, en revanche, des tombes fraîches mais qui se comptent, nous dit-on, en unités. Rappelons que la tradition musulmane impose d'enterrer au plus vite les morts. Il y a donc, sans doute, des corps qui n'ont pas encore été comptabilisés. Le travail est en cours. Pour lister les disparus, les autorités s‘appuient notamment sur les Cadis, ces membres de la communauté musulmane en charge des questions de la vie religieuse courante. C'est ce travail macabre qui permet sans doute d'établir un bilan provisoire moins alarmiste. Pour affiner, un autre indicateur sera le retour des enfants à l'école expliquent les autorités.

Bilan humain difficile à établir en raison du nombre d'illégaux

Le nombre important de résidents illégaux à Mayotte rend le comptage difficile, mais il y a, dans les quartiers informels, un maillage associatif solide. Là aussi, les premières remontées sont rassurantes. Une source locale, un éducateur de rue, joint par téléphone, a pu s'assurer qu'il n'y a pas de disparus ou de victimes dans le quartier où il exerce. Cela reste néanmoins de simples indices. Il faudra consolider ce bilan, ce qui prendra, sans doute, des semaines, voire des mois.

Ce qu'il faut ajouter pour expliquer le flou des premiers jours sur le bilan humain de ce drame, c'est que l'urgence était, jusqu'alors, de soutenir les vivants. Il fallait rétablir l'électricité, l'accès à l'eau, soigner les blessés. Mardi matin, le préfet a redit que clandestin ou non, l'aide est la même : "J'ai des compatriotes et des concitoyens, des personnes qui vivent à Mayotte, et on n'a jamais fait la distinction."

"Une vie est une vie, martèle le préfet qui précise que dans la phase de préparation de la population avant l'arrivée du cyclone, avec l'ouverture de 120 centres d'hébergements, à aucun moment on n'a fait un filtre quelconque. C'est la politique que le gouvernement m'a demandé de poursuivre", conclut-il. Le préfet a annoncé que l'accès à eau est rétabli dans les principaux points du territoire, même si, dit-il, c'est un peu difficile à délivrer.

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