Pourquoi l'Ile-de-France est-elle paralysée dès qu'il neige (beaucoup) ?
En 2010 et 2013, les Franciliens avaient déjà connu d'importantes difficultés pour se rendre au travail pendant des épisodes neigeux.
Un épais manteau blanc recouvre les trottoirs de l'Ile-de-France. C'est beau, certes, mais c'est l'enfer pour beaucoup de Franciliens. Dans la nuit du mardi 6 au mercredi 7 février, près de 2 000 automobilistes bloqués ont dû abandonner leur véhicule sur la N118, au sud-ouest de la capitale, et trouver refuge dans un gymnase. Au petit matin, les trains fonctionnaient au ralenti, tandis que les bus étaient à l'arrêt.
Pour beaucoup, cette pagaille fait écho à ce qu'ils ont connu en 2010 et 2013, lors de précédents épisodes neigeux de cette importance. Alors pourquoi est-ce le chaos en région parisienne lorsque la neige tombe abondamment, alors que d'autres régions parviennent à affronter les intempéries sans trop d'encombres ?
La circulation très dense complique le salage et le déneigement
"Soixante-dix saleuses ont été mobilisées dans la nuit de mardi à mercredi pour intervenir sur les axes gérés par l'Etat, ce qui représente des moyens importants", indique la ministre des Transports, Elisabeth Borne, au Parisien. Mais elle a concédé, mardi soir sur LCI, que dans le cas d'un épisode neigeux "assez exceptionnel", les moyens manquent. "On a anticipé au maximum, mais les moyens dont on dispose – le salage – ne sont pas suffisants quand il tombe trois centimètres par heure", a-t-elle reconnu. En effet, avec de telles quantités de neige, le sel n'agit plus et la neige tient au sol.
De plus, la circulation, très dense en région parisienne (surtout quand la neige s'accumule), empêche les engins déneigeurs d'intervenir. "Face à un épisode neigeux aussi important, c'est compliqué d'assurer une circulation normale", a encore expliqué Elisabeth Borne.
La neige est tombée au plus mauvais moment
Mardi, la neige s’est accumulée sur la chaussée à raison de trois centimètres par heure. Et elle est tombée principalement dans l'après-midi et en fin de journée, à l'heure de pointe. Les Franciliens qui rentraient du travail se sont donc retrouvés coincés sur la route.
Les véhicules ne sont pas bien équipés
Une autre explication tient à l'équipement des véhicules. Une raison avancée par l'ancien ministre des Transports Dominique Bussereau, sur LCI : "Peut-être parce que nous sommes dans une région, la région parisienne, où nous ne sommes pas habitués à ces conditions comme nos amis du Jura, des Vosges ou d'Auvergne, qui savent rouler sur la neige. Peut-être que nous n'avons pas forcément les bons réflexes." En effet, peu de Franciliens disposent de pneus adaptés à la conduite sur la neige, ce qui provoque des ralentissements et des accidents.
En 2010, le directeur des routes d'Ile-de-France, Gérard Sauzet, avait déjà expliqué à L'Express que "dans la culture des Franciliens, je ne pense pas qu'il y ait un réflexe d'utiliser des pneus neige, et c'est tout à fait normal car ces phénomènes sont très rares" dans la région.
De plus, un deuxième jeu de pneus représente un budget non négligeable et impose d'avoir la place de stocker des roues… Pas forcément évident pour les automobilistes franciliens.
De tels épisodes neigeux sont exceptionnels
La ministre des Transports a assuré que les moyens de l'Etat étaient en adéquation avec la fréquence de ces épisodes neigeux exceptionnels : "Six mille agents mobilisables 24h/24 sur le réseau qui appartient [à l'Etat]. (...) 750 camions équipés de lames et de saleuses. Et entre 100 000 et 200 000 tonnes de sel sont épandues chaque année suivant la rigueur de l'hiver. L'Etat est donc totalement mobilisé." C'est donc le hors norme qui poserait des difficultés.
D'ailleurs, la situation était scrutée de près par les agences de l'Etat et les concessionnaires. Lundi, la Direction des routes d’Ile-de-France (Dirif), qui s’occupe des 800 km de routes et d’autoroutes nationales de la région, et la Sanef ainsi que Vinci, qui s’occupent des autoroutes concédées par l’Etat au-delà du périmètre de la Dirif, tout était prévu, rapportait alors Le Parisien : "Il y a déjà eu trois salages préventifs sur l’A10. Nous avons beaucoup de caméras qui permettent de vérifier l’état des routes. Nous sommes prêts à agir", assurait Vinci Autoroutes. Par de miracle donc : la seule solution pour éviter la pagaille sur la route est de réduire la circulation.
La pagaille est difficilement évitable quand il neige beaucoup… même dans les pays froids
Alors que beaucoup comparent le chaos francilien à la capacité de villes comme Stockholm (Suède) et Montréal (Canada) à gérer des chutes de neige fréquentes et bien plus abondantes, la France n'est pas le seul pays à connaître de graves perturbations.
L'écologiste Pierre Serne, conseiller régional d'Ile-de-France et administrateur d'Ile-de-France Mobilités (l'ancien Stif), a listé des "pagailles" vécues par l'Allemagne, la Suède, le Québec ou encore la Russie, dans un post Facebook relayé par Cécile Duflot. A chaque fois, il est question de bouchons monstres, de transports en commun en panne et d'automobilistes sommés de rester chez eux.
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