Qualité de l'air : les particules fines "les plus dangereuses pour la santé" passent "complètement en dehors des radars", regrette l'association Respire
Les particules fines PM 2,5 sont "les plus dangereuses pour la santé", mais elles passent "complètement en dehors des radars aujourd'hui en France", a regretté mardi 14 février sur franceinfo Tony Renucci. Le directeur de l'association Respire est revenu en détail sur l'épisode de pollution de l'air qui touche une bonne partie de la France en ce début de semaine.
franceinfo: Quels comportements adopter lors d'un pic de pollution ?
Tony Renucci: Il faut éviter de prendre la voiture ou si on doit la prendre qu'on puisse rouler en véhicule à faible émission, en véhicule électrique. Et puis prendre les transports en commun, privilégier le vélo. Quant au chauffage, c'est vrai que c'est un peu plus compliqué quand il fait froid. Mais au moins pouvoir éviter le chauffage d'agrément, le chauffage d'appoint, surtout si c'est du chauffage au bois. Enfin, il faut vraiment éviter de faire du sport en plein air parce qu'on aspire jusqu'à dix fois plus de polluants.
Faudrait-il intensifier les contrôles dans les zones à faibles émissions (ZFE)?
Aujourd'hui, on ne sait pas si les ZFE sont pleinement efficaces tel qu'elles sont appliquées en France puisqu'il n'y a pas de contrôle. Il n'y a pas de vidéo verbalisation. Mais le débat est plus large que simplement les contrôles. C'est la mesure même qu'il faut aussi faire évoluer. C'est une idée intéressante, mais on sait aussi qu'il y a quelques lacunes qui sont intrinsèques. On ne peut pas seulement dire que les véhicules les plus anciens sont les plus polluants. ll y a aussi la question de l'usage et du type de véhicule qu'on autorise en Crit’Air 1. Aujourd'hui, il y a des manquements, notamment par rapport aux SUV qui sont aussi polluants en centre-ville. Il y a des personnes qui roulent avec tous les jours. C'est malheureusement un peu un angle mort des ZFE.
Que faudrait-il faire de plus ?
Sur les pics de pollution, il y a de vrais manquements en France. Aujourd'hui, la réglementation n’observe des pics que sur les particules PM10. Tout le monde dit "particules fines", mais ce ne sont pas des particules fines. Les particules fines sont les PM 2,5 qui sont les plus dangereuses pour la santé. On passe complètement en dehors des radars aujourd'hui en France. Il y a eu un gros pic de pollution fin novembre, début décembre. On n'a rien vu. Il n'y a eu aucune mesure qui a été prise. Derrière, qu'est-ce qui se passe ? On a eu de gros pics de grippe, de bronchiolite, de Covid. On le sait que c'est directement lié. Il y a une étude de Jean-Baptiste Renard du CNRS en 2022 qui montre bien que quand il y a un pic de pollution derrière, on a une montée des cas de Covid et des infections. Maintenant, il faut changer la loi. Il faut vraiment observer les pics à partir des particules fines PM 2,5. Il faut qu'on ait des mesures automatiques qui s'appliquent, y compris des obligations, des restrictions. Il est peut-être temps aussi en France de sortir de ce tabou du chauffage au bois et d'aller vers d'autres alternatives.
La baisse de la vitesse sur les routes en cas de pic de pollution, c'est une mesure efficace ?
Ce n'est pas suffisant. Je ne peux pas dire que ce n'est pas efficace, mais la vitesse parfois est un faux débat. On va par exemple plus polluer si on s'arrête, si on redémarre, si on s'arrête. Si on roule tranquillement à une vitesse soutenue sur de grands axes où il y a peu d'habitation à côté, ce n’est pas vraiment le même débat. Je ne peux pas dire que c'est une mauvaise chose, mais dans ce cas, il fallait plutôt mettre en place la circulation différenciée si vous voulez avoir un réel impact. Il y a aussi la question du chauffage, notamment du chauffage au bois, sur laquelle on a que des recommandations et aucune obligation. C'est encore une lacune de la procédure actuelle.
Prend-on suffisamment cette question au sérieux en France ?
On a progressé et je l'ai vu au fil des années. Il y a une vraie progression, y compris dans le discours politique. Maintenant, tous les candidats, que ce soit à la présidentielle ou aux législatives, parlent de qualité de l'air. Les acteurs publics, y compris le gouvernement, ont aussi fait évoluer leur discours. La difficulté maintenant, c'est d'appliquer les mesures. On connaît les sources d'émissions, mais il faut qu'on applique les mesures pour réduire ces sources d'émission. C'est difficile socialement, mais il faut qu'on prenne notre courage à deux mains, sinon on continuera à avoir des conséquences sanitaires graves.
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