Afghanistan : Action contre la faim va reprendre ses activités, "encouragée" par les talibans, selon son président
"Les circonstances nous semblent favorables", explique Pierre Micheletti qui ajoute que dans les faits, le dialogue était engagé depuis "bien longtemps" dans certains sites où le pouvoir avait déjà basculé.
"Les talibans nous laissaient travailler et sur certains des sites, ils nous ont encouragés à reprendre nos activités le plus rapidement possible", a déclaré lundi 23 août sur franceinfo Pierre Micheletti, président d’Action contre la faim. L'ONG va reprendre ses opérations d'aide, suspendues depuis la prise de pouvoir des talibans, dans quatre provinces d’Afghanistan.
franceinfo : Qu'allez-vous faire ?
Action contre la faim va reprendre des activités antérieures dans les quatre provinces où nous étions implantés à des niveaux significatifs. C'est une aide que nous apportons à plus de 400 000 personnes et que nous avons mis en sommeil en attendant de voir comment allait évoluer la situation politique et la sécurité pour nos équipes. Nous sommes en train de préparer le redémarrage de ces activités parce que les circonstances nous semblent favorables. Nous sommes attentifs à ce qui pourrait se passer en termes de déplacements autour de Kaboul et d'autres grandes villes.
Est-ce risqué de reprendre vos opérations ?
La seule nouveauté, c'est la prise de Kaboul et l'officialisation du pouvoir des talibans. Pour être réaliste, cela fait bien longtemps déjà que, dans les lieux où sont implantées les équipes d'Action contre la faim, le pouvoir local avait basculé. Donc sur un certain nombre de sites de travail les discussions étaient déjà ouvertes à ceux qui, avant la chute de Kaboul, avait pris les manettes. Les talibans nous laissaient travailler et sur certains des sites ils nous ont encouragés à reprendre nos activités le plus rapidement possible.
De quoi ont besoin les Afghans ?
La sous-nutrition aigüe chez les enfants, les problèmes de mortalité maternelle en couche, de sous-nutrition des femmes enceintes, les conditions d'hygiène, les diarrhées aigües qui sont une des principales causes de mortalités chez les enfants, tout ça demeure et va constituer le noyau dur des activités que nous allons reprendre.
Comment comptez-vous évoluer face au régime ?
Les lignes rouges de la reprise pleine et entière de nos activités sont sur la sécurité de nos équipes, d'avoir des moyens financiers pour le faire, parce qu'il y a quelques inquiétudes sur des bailleurs de fonds qui pourraient cesser leurs aides.
"La question que tout le monde a à l'esprit c'est qu'il n'est pas question de laisser la moitié de la population afghane, en l'occurrence les femmes et les filles, être mises à l'écart des programmes que nous allons mettre en œuvre."
Pierre Micheletti, président d’Action contre la faimà franceinfo
S'il devenait impossible que ces femmes bénéficient de nos programmes, nous nous poserions des questions. Ce qu'il faut entendre c'est cette majorité silencieuse, ces populations les plus défavorisées, les plus rurales qui seraient dans un autre type de désarroi si demain les aides extérieures cessaient. Dans le cas d'Action contre le faim, c'est 450 000 personnes que nous aidons et cette majorité silencieuse il faut aussi l'entendre.
Lancez-vous un appel à l'aide ?
Il y a des inquiétudes qui surgissent avec le retrait des États-Unis, la Banque mondiale met un point d'interrogation sur des prêts qui devaient être octroyés au pays et qui sont remis en cause. Action contre la faim a lancé la semaine dernière un appel aux dons et je le relaie aujourd'hui parce qu'entre ces inquiétudes sur les financements antérieurs et l'émergence de nouveaux besoins nous voulons avoir les moyens de travailler à des niveaux significatifs.
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