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Témoignage Afghanistan : "On a tellement peur de sortir", confie un ancien employé de l'Unesco, menacé de mort par les talibans

Ahmad* a travaillé pendant dix ans avec l'Unesco pour la préservation du site de Bâmiyân, où d'immenses statues bouddhistes avaient été dynamitées par les talibans en 2001. À ce titre, il est menacé et recherché par le nouveau pouvoir à Kaboul.

Article rédigé par Julie Pietri
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2min
Le site autour des bouddhas de Bâmiyân, dynamités par les talibans en mars 2001. (MOHAMMAD ALI SHAIDA / AFP)

"Ils m'envoient des vidéos de décapitation sur mon compte Facebook, en disant qu'ils vont venir me faire la même chose", raconte Ahmad* à franceinfo. Ce père de famille a travaillé pendant dix ans avec l'Unesco pour la préservation du site de Bâmiyân, en Afghanistan. Depuis le retour au pouvoir des talibans dans le pays, il craint pour sa sécurité.

Bâmiyân, c'est là où, en 2001, quelques mois avant de perdre le pouvoir, les talibans avaient dynamité trois bouddhas géants, sculptés au creux d'une falaise entre les IVe et VIIIe siècles. Ahmad était chargé de protéger le reste du site, ainsi que des monuments de la vallée alentour.

À ce titre donc, il reçoit désormais des menaces de mort des talibans. Sa maison, à Bâmiyân, a été fouillée, ses voisins interrogés. L'homme de 43 ans a dû fuir, avec sa famille et ses trois enfants, et vit aujourd'hui caché, dans une maison à Kaboul. "On a tellement peur de sortir, témoigne-t-il. Ils tentent de me trouver parce qu'ils disent que c'est une honte que des musulmans travaillent à préserver les monuments bouddhistes."

"Vous savez, ma fille de trois ans vient me voir, m'embrasse et me demande : 'papa, quand est-ce que l'on rentre chez nous ?' Je n'arrive pas à lui expliquer et lui dire 'ma chérie, on doit quitter notre pays, on doit tout quitter."

Ahmad, ancien employé de l'Unesco menacé par les talibans

à franceinfo

Impossible pour lui de parler à ses enfants ces derniers jours sans s'effondrer en larmes. Ahmad n'arrive pas à croire, "après avoir travaillé 20 ans à la protection de notre culture, de nos monuments, que je dois tout lâcher". Il n'arrive pas à croire non plus que "tout s'est écroulé en une journée". "Mon pays, c'est comme mon cœur. Et là, j'ai vraiment peur que les talibans refassent ce qu'ils ont déjà fait en 2001, avec notre patrimoine", explique le passionné.

L'Unesco a tenté d'évacuer Ahmad de Bâmiyân, mais trop tard. Les talibans avaient déjà pris la ville. Le père de famille attend des nouvelles de l'organisation internationale. Celle-ci a lancé jeudi 18 août un appel en faveur de la protection du patrimoine culturel de l'Afghanistan, "crucial" pour l'avenir du pays. Ahmad compte aussi beaucoup sur des contacts, des amis en France, pour lui obtenir une autorisation d'embarquer à bord d'un avion.

* Le prénom a été modifié.

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