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En pleine crise politique, l'Algérie fait face à des rumeurs de fuites de capitaux

L’Algérie, en pleine crise politique, voit-elle une partie de ses capitaux fuir le pays ? La rumeur a en tout cas été largement relayée par la presse algérienne. Au point que la Banque d’Algérie a affirmé le 26 mars que "ces informations visent à instaurer un climat de confusion et conduire en erreur l’opinion publique".

Article rédigé par Pierre Magnan
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
Manifestation contre le candidature à un 5e mandat et le maintien au pouvoir d'Abdelaziz Bouteflika, le 22 mars 2019 (RYAD KRAMDI / AFP)

"Les informations portant sur la fuite des capitaux vers l’étranger ne sont que des rumeurs", a indiqué la Banque d’Algérie"Les opérations de transfert des capitaux sont soumises à des contrôles très rigoureux", a tenu à affirmer la Banque centralealors que les accusations de fuites de capitaux se multiplient. 

Les crises politiques sont toujours risquées pour les détenteurs de capitaux. Ces derniers peuvent être tentés de les mettre à l'abri à l'étranger. Pas étonnant dans le contexte actuel que des Algériens s'inquiètent sur le devenir de leur monnaie et leurs réserves de change. 

Résultat, les rumeurs se sont multipliées ces derniers jours. Et des rumeurs pas toujours anonymes, puisque le Conseil de l'Ordre des avocats a pris une position publique sur la question. "Nous savons, assure Me Silini (bâtonnier d'Alger), qu’il y a actuellement des opérations de transfert de très fortes sommes d’argent par des opérateurs économiques très connus." Pour le site algérien d'information TSA, "la réaction des avocats d’Alger est très symptomatique du climat politique actuel. L’image de cercles dirigeants occupés à vider les caisses de l’Etat et à épuiser nos dernières marges de manœuvre financières est aujourd’hui largement répandue dans l’opinion nationale."

Le ton est plus accusateur dans le journal El Watan : "Pendant que les Algériens sont occupés à en finir avec l’ordre autoritaire, la caste des affairistes tente de sauver les fortunes accumulées. Il est vrai qu’en cette période pleine de doutes, les têtes d’affiche de la corruption seraient tentées de quitter le pays avec 'coffres et bagages.'"

La rumeur apparaît aussi dans le quotidien Liberté Algérie, où "l’économiste Smaïl Lalmas appelle les cadres de l’Etat au niveau des ministères, à la vigilance afin de préserver ce qui reste des richesses du pays : 'J’ai des informations de fuite de capitaux et d’octroi ces derniers jours de marchés antidatés. C’est un pillage organisé', assène-t-il."

Même la Fédération nationale des agences immobilières a adressé une note à ses adhérents pour les mettre en garde contre des opérations de vente qui seraient "douteuses", selon Algérie Patriotique. 

Même si l'Algérie est un pays très contrôlé et que la monnaie n'est pas convertible, des économistes notent que des personnes arrivent à mettre leur argent à l'étranger. "Il y a ceux qui se sont enrichis ces dernières années au moyen de la corruption et de la surfacturation qui s’adonnent à cette pratique. Ce fléau est favorisé également par l’érosion que connaît la valeur du dinar ; certains échangent leurs dinars contre des euros et des dollars qu’ils transfèrent par la suite vers l’étranger. Souvent, ce sont les capitaux mal acquis qui sont transférés à l’étranger avec, bien évidemment, la complicité des certains employés d’institutions et administrations officielles", notait Badreddine Nouioua, ancien gouverneur de la Banque d’Algérie en septembre 2018.

Quelle que soit la réalité ou non de ces transferts à l'étranger, le président Bouteflika ne devrait pas en être l'auteur. En effet, selon sa déclaration de patrimoine, déposée en vue de sa candidature (annulée) à la présidentielle de 2019, il déclarait en matière de biens mobiliers "n’être propriétaire d’aucun bien à l’intérieur du pays ou à l’étranger".

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